"Je ne demande qu'une chose: qu'on me laisse travailler", a déclaré Dominique Strauss-Kahn jeudi soir sur France 2
"J'ai une mission à remplir" à la tête du Fonds monétaire international, a expliqué le directeur général du FMI au cours de l'émission "A vous de juger", alors qu'il était
interrogé par Arlette Chabot sur une éventuelle candidature à la présidentielle de 2012.
"Ce que que je fais me passionne, j'essaie de le faire le mieux possible", a-t-il dit.
Candidat ou pas candidat ?
"Je crois que le rôle que le FMI a joué depuis le début de la crise des subprimes est reconnu par tout le monde", fait-il valoir. C'est "sans doute grâce au FMI et pas seulement au FMI, mais notamment au FMI, qu'on a évité une crise aussi grave" que celle "de 1929".
"J'ai une petite tête et je ne sais penser qu'à une seule chose à la fois", a-t-il plaisanté alors qu'Arlette Chabot lui glissait que "peut-être", il a "dans sa tête une idée du moment où il faudra dire quelque chose". Alors qu'on le comparait avec Jacques Delors renonçant à une candidature présidentielle en 1995, DSK a répondu: "Vous me flattez beaucoup" mais "ce n'est pas ma question, je ne suis pas dans ce débat-là", "dans cette préoccupation-là".
Relevant cependant "des sondages, des articles, des choses", il a concèdé que c'est "très agréable que vos compatriotes vous apprécient", mais "ce n'est pas mon sujet, pas ma préoccupation".
Sera-t-il au côté de Nicolas Sarkozy en juin 2010, à la réunion du G20 ?" Je pense, oui", répond-il, laconiquement. Et le "pacte" de non-agression au PS avec Martine Aubry pour 2012 ? "Ce que je sais, moi !", répond, sèchement et tout aussi laconique, l'ancien ministre socialiste de l'Economie.
DSK et les retraites
Interrogé sur le "dogme" des 60 ans, Dominique Strauss-Kahn a expliqué: "Je ne pense pas qu'il faille y avoir de dogme. Le monde change très vite et on vit dans la mondialisation, qui a des avantages, des inconvénients, mais c'est la réalité il faut tenir
compte de cela".
En matière de retraites, "il y a plusieurs façons de faire les choses: une manière qui est assez évidente dans beaucoup de pays, c'est de dire si on vieillit plus longtemps, il faut qu'on travaille plus longtemps", a fait valoir le patron du FMI.
"Si on arrive à vivre 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans, il va bien falloir que d'une manière ou d'une autre, cela s'ajuste. Dans beaucoup de pays, c'est la voie qui est choisie", a-t-il dit. "L'âge de départ à la retraite est très différent selon les individus et les professions", a cependant insisté DSK.
L'ancien ministre socialiste affirme qu'il s'est toujours battu pour la prise en compte de "la pénibilité". "Selon que vous faites des carrières différentes, vous commencez plus ou moins jeune d'ailleurs (...). Et selon que vous faites un métier plus ou moins pénible, la justice c'est qu'à l'arrivée, vous puissiez prendre votre retraite plus ou moins tôt", a-t-il poursuivi.
Il faut "un pouvoir économique central" en Europe
"Je ne crois pas que la zone euro soit en risque d'exploser. En revanche, je pense que le risque, c'est qu'elle tourne mal, qu'elle fonctionne mal", a expliqué DSK.
"L'euro marche à condition qu'on se donne les moyens de le faire marcher", a-t-il dit.
"Une monnaie ne peut fonctionner qu'avec un pouvoir économique central" et "des ressources centrales", a-t-il estimé. Ce dont on s'est montré "incapable" jusque là. Il faut donc "avancer plus vite vers un leadership européen et des ressouces centralisées", a-t-il expliqué. Dominique Strauss-Kahn a implicitement évoqué la proposition, faite par Bruxelles, de contrôler les budgets des pays membres au nom de la rigueur en ironisant sur "les cris d'orfraie" qu'il dit entendre à propos de cette mesure.
"On ne peut pas partager une monnaie et ne pas partager d'autres décisions", a-t-il expliqué. Les Européens sont au "milieu de la rivière, s'ils reviennent sur la rive initiale, ils perdent l'euro (..), a-t-il averti. Il faut aller plus loin, la solution c'est "plus d'Europe". S'"il y a des attaques contre l'euro", c'est "parce que l'Europe est structurellement à la traîne", a observé le patron du FMI.
"Le vrai problème c'est la croissance"
"Le vrai problème de l'Europe, ce n'est pas vraiment la dette mais plutôt la croissance", a estimé Dominique Strauss-Kahn.
A ses yeux, celle-ci est notamment entravée par la "crise de confiance vis-à-vis de l'Europe". "Plus fort que la dette, il y a la croissance, et plus fort que la croissance, il y a le manque de confiance dans les politiques" menées, a poursuivi l'ancien ministre socialiste de l'Economie.
Il a estimé qu'il fallait s'attaquer à la spéculation, tout en s'attaquant aux "causes" de la spéculation, notamment le "manque de confiance".
"Il ne faut pas réduire les déficits à marche forcée"
Interrogé sur les risques que font peser sur la croissance les plans d'austérité en oeuvre ou envisagés en Europe, le directeur général du FMI a reconnu ce risque. Mais pour l'éviter, il a conseillé aux grands pays européens de ne pas ralentir trop vite, de ne pas mettre en oeuvre des plans d'austérité sur des périodes trop courtes.
"Si tout le monde se met à dire on va se serrer la ceinture, (...) on va casser la croissance dans la zone euro", a-t-il estimé. Il a mis en garde contre les dangers de vouloir réduire trop vite les déficits. "Il n'est pas écrit dans le marbre qu'il faille absolument qu'en 2012 ou en 2013 on soit revenu à 3 %" de déficit public par rapport au PIB, un des critères inclus dans les traités européens, a-t-il expliqué.
"Ce qui est très important pour rendre la confiance, c'est de montrer qu'on a un plan et qu'à l'arrivée les choses seront rétablies", a-t-il ajouté. Il faut réduire les déficits, mais, a-t-il souligné, "il ne faut pas le faire à marche forcé".
Réaction de Jean-Luc Mélenchon
"En dépit de questions convenues et complaisantes, aidé par une aisance personnelle notable, Dominique Strauss-Kahn n'est pas sorti un instant des ritournelles sans imagination de l'idéologie libérale et des recettes éculées qu'il met en oeuvre à la tête du FMI", a réagi le président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, dans un communuiqué. "Sa candidature en 2012 compliquerait très sérieusement les capacités de rassemblement et de dynamique de la gauche", avertit-il.
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