Des pratiques tendant à interdire l'accès des centres d'hébergement aux sans-papiers se développent, selon Libération
Des préfectures ont demandé à des centres d'hébergement qu'elles financent de ne pas accueillir les étrangers en situation irrégulière qui sont à la rue, particulièrement les déboutés du droit d'asile, rapporte le quotidien.
Libération cite des documents envoyés par les préfectures de l'Yonne, du Calvados et du Haut-Rhin.
Dans un courriel à des associations, une administration préfectorale du Calvados, la direction départementale de la cohésion sociale (DDCS), déplore de voir les déboutés du droit d'asile abrités. On y lit que "la DDCS avait clairement annoncé que les déboutés ne seraient plus pris en charge dans les dispositifs d'hébergement." Une règle qui n'a aucune base légale, poursuit le quotidien.
Interrogée par Libération, la préfecture se défend en affirmant qu'elle n'a pas eu de "conséquences concrètes".
Dans le Haut-Rhin, le 115, chargé d'orienter les sans-abri sur les places d'hébergement, est prié de donner la priorité, en cas de saturation, au "public de droit commun", que la préfecture distingue des "demandeurs d'asile ou des déboutés du droit d'asile".
Là encore la préfecture affirme que l'hiver dernier "aucune personne n'est restée sans hébergement" et se défend d'exclure les sans-papiers.
Libération publie aussi des échanges de courriels dans l'Yonne, où la restitution d'un logement est refusée à une famille dont l'expulsion a été annulée par la justice.
"Le code de l'action social et des familles impose d'accueillir toutes les personnes sans abri et en détresse, quelle que soit leur situation administrative", souligne la présidente de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale. Dans une interview au quotidien, Nicole Maestracci rappelle que "en 2007, le président avait (...) réaffirmé ce principe de l'inconditionnalité".
"Ce n'est pas aux associations de contrôler les papiers. Dans les centres d'urgence on doit accueillir tout le monde, justement parce que ce sont des centres d'urgence", avait déclaré Nicolas Sarkozy lors de la Journée mondiale du refus de la misère, précise Libération.
Les réactions se multiplient
Des faits dénoncés par le secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu, qui a affirmé avoir "donné des consignes ce matin pour qu'on cesse ces pratiques". "Quand quelqu'un est dans une période de froid dehors, on ne se préoccupe pas de savoir s'il a des papiers ou pas", a-t-il déclaré sur RTL. "Il y a un principe qui a été fixé par le président de la République lui-même, réaffirmé à plusieurs reprises, c'est le principe de l'inconditionnalité de l'accueil d'urgence", a souligné le secrétaire d'Etat.
"Les étrangers sans-abri ne sont pas des variables d'ajustement", dit la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale, qui regroupe 850 associations s'occupant de près de 3.000 services d'aide aux sans-abri. La Fnars rappelle "le principe d'accueil inconditionnel des plus démunis" et cite l'article L 11-2 du Code d'action sociale qui "impose d'accueillir toutes les personnes sans abri ou en détresse, sans poser de condition de régularité de séjour". "Tous les centres d'hébergement sont donc dans la légalité lorsqu'ils accueillent des étrangers en situation de détresse, quelle que soit leur situation administrative", dit la Fnars.
Le groupe PCF-Parti de gauche attaque une forme de "xénophobie d'Etat", estimant que la droite française poursuit pour des "raisons électoralistes" son "offensive de destruction de la dignité humaine".
Le porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon, a rappelé les propos de Nicolas Sarkozy, qui avait réaffirmé le principe d'accueil "inconditionnel" des sans-abri en 2007. "La responsabilité de la République c'est d'héberger tout le monde et ne pas faire le tri entre les SDF avec papiers et les SDF sans papiers", a-t-il ajouté.
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