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Le suicide d'un cadre de La Poste déclaré comme accident de service

Le syndicat SUD a révélé aujourd'hui une série de documents laissés par Bruno P., à destination des organisations syndicales. Il y dénonce "un acharnement" de sa hiérarchie. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'entrée de la plate-forme de distribution de courrier où un cadre de La Poste en arrêt maladie a été retrouvé pendu le 11 mars, à Trégunc (Finistère).  (FRED TANNEAU / AFP)

Bruno P. a-t-il mis fin à ses jours en raison de son travail ? Un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) s'est réuni mercredi 14 mars à Vannes (Morbihan), à la suite du suicide de ce cadre de La Poste dimanche. Ses membres (direction et représentants du personnel) ont voté pour la reconnaissance de cet acte en "accident de service" ainsi que l'arrêt des réorganisations en cours ou prévues au sein de la société, ont indiqué les syndicats et la direction. La demande de reconnaissance du suicide en accident du travail devra être examinée par la Commission de réforme.

"Une enquête du CHSCT devra être menée pour déterminer les causes qui ont conduit à ce drame", ont-ils par ailleurs indiqué. Mercredi, jour des obsèques de Bruno P., 42 ans, le syndicat SUD a révélé plus tôt dans la journée un ensemble de documents rassemblés par ce père de famille désespéré. Un témoignage bouleversant qui accable son employeur.

Des enregistrements et des notes qui dénoncent "un acharnement"

Bruno P. a expliqué son geste par écrit. "Depuis plus de trois ans, j'ai l'impression d'un acharnement, d'une volonté hiérarchique de m'acculer", raconte le cadre, en arrêt maladie au moment du drame. Il écrit notamment qu'il "considère la hiérarchie de La Poste (à tous niveaux) à l'origine de [s]a perte de repères".

Dans un e-mail adressé le jour de sa mort aux organisations syndicales, Bruno P. indiquait avoir laissé chez lui des documents, à disposition de la CGC, de la CFDT, de SUD et de la CGT. "On nous a remis une chemise, une pochette où tout était préparé, explique Patrice Campion, délégué SUD dans le Finistère. Dans ces documents figuraient une série de courriers, des comptes rendus d'entretiens et deux CD, l'un avec des vidéos et un autre avec plein d'autres documents dont des enregistrements audio d'entretiens qu'il avait eus avec sa hiérarchie." 

Parmi les documents se trouve également un e-mail non envoyé adressé au PDG de La Poste, Jean-Paul Bailly, et daté du 11 mars, jour de la mort de Bruno P. Dans ce message, dont l'objet est "SOS", le cadre se dit "dos au mur" et considère que sa "carrière à La Poste est terminée", disant redouter, "dans le meilleur des cas", une mise au placard.

Ses dernières volontés : pas de représentant de La Poste aux funérailles

Dans une note baptisée "Mes demandes", Bruno P. transmet ses dernières volontés. Refusant toute réanimation, il dit être prêt à donner ses organes et réclame une inhumation "dans l'intimité familiale" sans "aucun représentant de la hiérarchie de l'entreprise, ni aucun message de cette même hiérarchie". Dans une autre note baptisée "Annexe", il demande si une pension pour sa famille est "envisageable", "en obtenant que [s]on geste désespéré soit requalifié en accident de travail". 

Trois enquêtes sont en cours sur ce suicide : une de la gendarmerie, celle du CHSCT et celle de l'inspection du travail.

Après son geste, survenu dix jours après le suicide d'un autre cadre à Rennes, les syndicats de La Poste avaient dénoncé le mal-être des salariés du groupe, qui emploie environ 240 000 personnes. La direction de La Poste a réagi en entamant un "cycle d'écoute et de dialogue sur la santé et le bien-être au travail". L'ensemble des syndicats doit être reçu par le PDG dans la semaine, à l'issue de quoi La Poste prévoit de faire "une première série de propositions".

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