Alors qu'une vague de froid sévit depuis le week-end, localités et associations se mobilisent pour aider les sans-abri
Le niveau 2 du plan grand froid a été déclenché dans au moins 20 départements tandis que les Ardennes ont déclenché le niveau 3 du plan hivernal.
Mais à Bordeaux, où la température est descendue à -3° dans la nuit de lundi à mardi, un sans-abri a été découvert mort dans "un contexte d'hypothermie importante".
"L'autopsie médico-légale, réalisée (mardi) soir, a révélé que la mort est consécutive à une décompensation cardio-respiratoire dans un contexte d'hypothermie importante, ayant entraîné un oedème pulmonaire", explique le procureur de la République, Claude Laplaud. "Le corps ne portait aucune trace de violence", ajoute-t-il dans ce communiqué, en précisant par ailleurs qu'"une analyse toxicologique des prélèvements sanguins a été sollicitée".
Le procureur précise que l'absorption éventuelle de médicaments découverts sur la victime, "si elle était confirmée, a pu, de la même manière qu'une consommation importante d'alcool, favoriser le processus de décompensation".
La mairie a invité la population "à composer le 115 lorsque chacun rencontre une personne sans domicile fixe dans la rue, dont l'état de santé semble nécessiter une prise en charge sanitaire".
Mais pour le collectif les Morts de la rue, la fréquence des décès de SDF n'obéit pas aux saisons. En hiver comme en été, lorsqu'ils ne peuvent se protéger de la chaleur, il en est un qui meurt chaque jour en moyenne.
Augustin Legrand dénonce "un tour de passe-passe"
"On n'arrive pas à sortir de la problématique des sans-abri en hiver. Le problème des sans-abri n'est pas lié au climat, il est lié au mal logement", dit Augustin Legrand. "Or, le mot logement est absent de la bouche de notre président, de François Fillon. Même dans la bouche de la gauche il n'apparaît pas", se désole-t-il.
Le président des Enfants de Don Quichotte, rendu célèbre par ses actions spectaculaires pour les sans-abri, regrette l'apitoiement sur le sort des sans-abri lorsque les températures deviennent négatives. C'"est un tour de passe-passe" qui arrange les "politiques-pompiers", affirme-t-il. "Les gens ne savent pas que 70% des Français peuvent prétendre à un logement social. Les politiques se servent de cette ignorance, ce n'est pas intéressant électoralement de parler du logement", ajoute-t-il.
Le plan grand froid : rappel
Le niveau 2 du plan grand froid est déclenché lorsque la température ressentie se situe entre -5 et -10 degrés la nuit et quand elle est négative le jour. Il implique d'accorder une vigilance particulière aux personnes vulnérables, de renforcer les équipes mobiles et les maraudes et de faciliter l'attribution des places en centre d'hébergement par le Samu social (115).
Le niveau 3 du plan hivernal est le seuil maximal qui correspond à un froid "extrême", avec des températures nocturnes sous la barre des -5°C au cours de la nuit.
Météo France prévoit des températures matinales négatives jusqu'à lundi prochain sur la quasi-totalité du pays.
Les dispositifs d'hébergement
Les associations évaluent à 10 millions de personnes le nombre de personnes concernées par la crise du logement. Selon un sondage CSA pour Emmaüs, 56% des Français pensent qu'ils pourraient un jour se retrouver à la rue.
"Ça ne concerne donc pas seulement les sans-abri, c'est pour l'intérêt général", dit encore le responsable des Enfants de Don Quichotte. "Ça coûte plus cher de mal agir en hiver, de louer des gymnases, c'est contre-productif pour notre pays", affirme-t-il.
Les associations continuent toutefois à collaborer avec le gouvernement. Benoist Apparu, nouveau secrétaire d'Etat au Logement, a repris leur idée de référent personnel pour les SDF.
Le secrétaire d'Etat au Logement, a assuré lundi que le dispositif d'hébergement d'urgence était "totalement au point" pour faire face à la vague de froid, même si des "progrès restent à faire" au niveau la politique d'accueil des sans-abris.
"On a 108.000 places tout au long de l'année, et on peut mobiliser 8.000 places supplémentaires en cas de grand froid, pour de la mise à l'abri", a expliqué le secrétaire d'Etat, qui s'exprimait en marge d'une visite dans un centre d'hébergement d'urgence de Villiers-sur-Marne (Val-de-Marne).
A Paris, un gymnase pouvant accueillir 90 hommes seuls en soirée a été ouvert et des maraudes régulières ont été mises en place dans les bois de Vincennes et de Boulogne, où vivent de nombreux sans-abri dans des conditions de grande précarité.
En cas d'activation nationale du plan grand froid, la mairie de Paris prévoit de mettre à disposition trois mairies et cinq gymnases pour de l'hébergement de nuit.
L'Armée du Salut a annoncé la mise en place d'une cinquantaine de couchages supplémentaires d'urgence à Neuilly-sur-Seine, Marseille, Reims et Rouen.
Dans la capitale, les associations s'organisent pour ouvrir leurs centres d'accueil de jour 24 heures sur 24. Selon Didier Cusserne, délégué général de l'association Emmaüs, l'ouverture de 2.150 places précaires cet hiver signifie qu'il manque au minimum ce volume de places à Paris.
Déjà 327 morts cette année
Outre le sans-abri de 35 ans découvert mort "probablement de froid" en plein centre de Bordeaux, six autres personnes sont décédées dans la rue la semaine dernière, selon le décompte des Morts de la rue, portant à 327 le nombre de décès cette année. Ce collectif avait recensé 360 décès de SDF en 2008.
Emmaüs estime à plus de trois millions le nombre de mal-logés et à 100.000 celui des sans-abri en France.
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