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A Bercy, Bernard Cazeneuve et vieilles ficelles

Proche de Jérôme Cahuzac qu'il remplace, l'ancien ministre délégué aux Affaires européennes a pris ses nouvelles fonctions mercredi. Portrait.

Article rédigé par Yann Thompson
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Bernard Cazeneuve, alors ministre délégué aux Affaires européennes, le 29 mai 2012 à Bruxelles. (JOHN THYS / AFP)

"On peut succéder à Jérôme Cahuzac, on ne peut pas le remplacer." Au lendemain de la démission du ministre délégué au Budget, son "ami" Bernard Cazeneuve a pris ses nouvelles fonctions, mercredi 20 mars, dans les locaux de Bercy. Agé de 49 ans, le nouveau "monsieur calculette" du gouvernement quitte avec surprise (et une pointe de déception, explique un proche au Point) le poste de ministre délégué aux Affaires européennes, qu'il occupait depuis l'élection de François Hollande. Pour le chef de l'Etat, c'est le choix d'un homme discret, loyal et travailleur, qui doit reprendre les négociations sur le budget 2014 et imposer d'ici le mois de juin 5 milliards d'euros d'économies aux ministères. Portrait.

La passation de pouvoir entre Cahuzac et Cazeneuve (David Doukhan, David Da Meda - France 2)

De la Normandie à l'Europe

Bernard Cazeneuve est "un politique au parcours habile et sans accroc", selon Le Figaro. Après divers mandats locaux à Cherbourg-Octeville (Manche), où il est reconnu pour sa maîtrise des dossiers, cet avocat se fait remarquer à l'Assemblée nationale à la tête de la mission parlementaire sur l'affaire Karachi. Tenace, bon connaisseur de la Défense selon le blog spécialisé Le Mamouth, il y livre une intense bataille pour défendre les victimes de l'attentat de 2002 au Pakistan, pour la plupart originaires du Cotentin.

Une fois ministre, et bien qu'opposé au Traité constitutionnel européen en 2005, Bernard Cazeneuve se consacre à convaincre un par un les députés de la majorité en vue de l'adoption du traité budgétaire européen. Avec succès, et un surnom à la clé : "R2D2", clin d'œil au robot de Star Wars pour son "discours un peu mécanique", selon Libération (article payant). Dès lors, sa nomination à Bercy peut apparaître comme un message rassurant envoyé à Bruxelles, qui le connaît bien et l'a souvent entendu défendre la volonté française de réduire les déficits.

Un proche de Fabius adoubé par Hollande

"Ses fidélités socialistes vont à Laurent Fabius, au côté de qui il a, entre autres, défendu le non à la Constitution européenne", rapporte Libération. En 2011, en l'absence de Laurent Fabius, cet homme d'appareil ne soutient donc aucun candidat lors des primaires du PS. Pas rancunier, François Hollande, qui le connaît depuis vingt ans et l'a notamment convaincu, en 2004, de prendre la tête de liste de la Manche aux élections régionales, en fait un de ses quatre porte-parole de campagne.

François Hollande discute avec Bernard Cazeneuve, candidat PS de la Manche aux régionales, le 2 février 2004 à Cherbourg. (MYCHELE DANIAU / AFP)

Bernard Cazeneuve tisse alors avec le candidat des liens si solides qu'"en six mois, il n'y a pas eu entre nous une différence de l'épaisseur d'une feuille de cigarette", comme il le confiait à Ouest France l'an dernier. Connu pour ses positions en faveur du nucléaire, il pèse notamment dans la décision de poursuivre le chantier de l'EPR de Flamanville, dans la Manche, où se trouve aussi l'usine de retraitement de la Hague et l'arsenal de Cherbourg, son port d'attache.

Un homme qui faisait "toujours marrer" Cahuzac

Un point commun entre Bernard Cazeneuve et François Hollande est leur humour, "presque aussi british" que les costumes en tweed du nouveau ministre délégué au Budget, selon Libération. Fin 2012, Jérôme Cahuzac disait même passer "des Conseils des ministres très heureux à côté de Bernard Cazeneuve", qui le faisait "toujours marrer", comme le rapporte Le Point. Mercredi, son successeur a, lui, vanté "l'excellence" de son "ami", qu'il soutient.  

DLTFTV_MAM_3050901 (RTL)

Père de deux enfants, Bernard Cazeneuve possède "un talent de débatteur" et "un respect jamais mis en défaut pour tous ses interlocuteurs", estime Ouest France. C'est "un soldat qui a la loyauté chevillée au corps : il appliquera la feuille de route de la rigueur à la virgule près", ajoute un conseiller ministériel cité par Libération. Fils d'un instituteur laïc responsable du PS dans l'Oise, il est aussi connu, selon Le Figaro"pour sa très habile langue de bois, qu'il porte d'une voix basse - à la limite de l'audible". Il lui faudra sans doute hausser le ton, à l'heure des arbitrages ministériels.

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