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Fax en panne, copié-collé, fautes de frappe : quand les vices de procédure font libérer des suspects

Le principal suspect d'un meurtre a été libéré, mercredi, car un fax n'est jamais arrivé : il n'y avait plus d'encre dans un télécopieur. Francetv info revient sur des histoires similaires. 

Article rédigé par franceinfo
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Le 5 février 2014, le principal suspect du meurtre d'un DJ amateur au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) a été libéré pour vice de procédure.  ( GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Un fax sans encre, une ordonnance judiciaire copiée-collée, un délai non respecté, et la sanction tombe : vice de procédure et libération du suspect, quels que soient son degré de dangerosité et les charges qui pèsent sur lui. Mercredi 5 février, le principal suspect du meurtre d'un DJ amateur au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), le 31 décembre 2011, a été libéré. Un fax n'est jamais arrivé

Francetv info revient sur les vices de procédure les plus surprenants de ces dernières années, ayant conduit à la libération de détenus. 

Le copié-collé d'ordonnance

En mai 2010, un jeune homme, déjà condamné à 14 reprises et accusé de violences volontaires avec arme, est remis en liberté. Selon France Info, le juge d'instruction a conclu son enquête en recopiant tout simplement les réquisitions du procureur de la République, ce qui est interdit. En effet, depuis l’affaire d’Outreau, la loi impose au juge d’établir des ordonnances à charge et à décharge. 

Une fois l’annulation prononcée, le tireur présumé, âgé de 23 ans et impliqué dans une fusillade en janvier 2009 dans la cité de la Grande Borne, à Grigny (Essonne), a aussitôt été remis en liberté.

Le non-respect des délais 

Le 11 juillet 2011, deux adolescentes sont arrêtées en flagrant délit de cambriolage à Plan-de-Cuques (Bouches-du-Rhône). Les policiers municipaux les emmènent au commissariat local, comme la procédure le prévoit. Mais contrairement au déroulé normal des faits, aucune équipe de la police nationale ne vient les chercher, raconte RTL. Quand les agents municipaux les emmènent eux-mêmes à Marseille, il est trop tard, le délai légal de deux heures au cours duquel la police nationale aurait dû être avisée des faits a été dépassé. Les deux voleuses sont relâchées.

Autre cas du même type, en 2009-2010 : la cour d'appel de Pau  s'est prononcée cinq mois trop tard concernant la mise en état du dossier dans l'affaire du meurtre de Nay (Pyrénées-Atlantique), qui a coûté la vie à Jérémy Censier, 19 ans, tué à coups de couteau le 22 août 2009. Pointée du doigt par l'avocat du suspect, la juridiction n'a pas respecté le délai de trois mois après sa saisine, défini par le nouveau Code de procédure pénal en cas d'affaire criminelle. Jonathan Fajardo est remis en liberté immédiatement. Mais son procès a bien lieu quelques années plus tard : le 20 avril 2013, il est condamné à quatre ans de prison pour violences aggravées, rapporte La République des Pyrénées.

Autre cas médiatique, celui d'un dealer ayant reconnu sa participation à l’un des plus importants trafics d’héroïne démantelé en Charente. Placé en détention le 15 juin 2013, il devait impérativement repasser devant un juge chargé de la liberté et de la détention avant le 15 octobre à minuit. Mais il n'est prévenu que le jeudi 10 octobre, alors que le Code de procédure pénale impose une notification remise au minimum "cinq jours ouvrables avant l’audience prévue afin de permettre à la défense de se préparer". Le chef de réseau est libéré alors que ses "petites mains, sans casier, sont incarcérées depuis plus de dix-huit mois", note La Charente Libre.

La faute de frappe

"La cour infirme" au lieu de "confirme". Et voilà un violeur récidiviste remis en liberté en octobre 2008. En effet, le président de la chambre d'instruction a signé sans relire un arrêt de la cour d'appel de Paris qui prévoyait, à l'origine, le maintien en détention du suspect, âgé de 48 ans, rappelle Le Monde"Le président [de la chambre de l'instruction] a signé cet arrêt que l'on est donc obligé d'exécuter", indique à l'époque le parquet général, pour qui il n'existe aucun recours. De justesse, le juge d'instruction impose à l'homme relâché un contrôle judiciaire très strict jusqu'à son procès aux assises. Ce dernier s'est tenu en octobre 2013. Jorge Montes a été condamné à 18 ans de prison, selon Le Figaro

La signature manquante 

Lors du premier procès d'assises, Jacques Maire, soupçonné dans l'affaire du meurtre de Nelly Haderer, une mère de famille tuée en 1987 près de Nancy, est condamné à quinze ans de réclusion criminelle. En appel, il est condamné à vingt ans de prison. Mais à la fin de ce second procès, "rendu très éprouvant par les quatre avocats de la défense, extrêmement coriaces", selon BFMTV,  la greffière oublie de parapher 32 pages du procès-verbal, le rapport qui retranscrit et valide l'audience. Conséquence : la Cour de cassation "casse" ce jugement pour vice de procédure et ouvre la voie à un troisième procès qui débouche, cette fois, sur l'acquittement de Jacques Maire. 

Le tribunal fermé

Alors qu'il doit assister son client un samedi après-midi, l'avocat de Franck Lasserre trouve portes closes au tribunal de Pau (Pyrénées-Atlantiques). Il dénonce : "Il fallait s'assurer de la publicité des débats et il appartenait au juge des libertés et de la détention de permettre l'accès du palais aux défenseurs convoqués à la hussarde." Le 21 mars 2012, le procureur considère que "l'ordonnance de prolongation de mise en détention qui a manifestement été réalisée dans la précipitation". Selon La République des Pyrénées, il requiert la remise en liberté sous contrôle judiciaire pour vice de procédure de Franck Lasserre, graphiste âgé de 41 ans, meurtrier présumé de Frédéric Nadau. Cette remise en liberté intervient quelques jours plus tard. Son renvoi devant les assises est tout de même confirmé le 2 novembre 2013, selon le quotidien régional.

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