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Attentat à Strasbourg : où en est l'enquête, trente-six heures après l'attaque ?

Cherif Chekatt est toujours en fuite après l'attaque commise dans le centre-ville de la capitale alsacienne. Le dispositif mobilisé est impressionnant mais les enquêteurs cherchent toujours des pistes pour retrouver le fugitif.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des gendarmes patrouillent dans l'un des sites du marché de Noël de Strasbourg (Bas-Rhin), mercredi 12 décembre 2018, au lendemain de l'attaque terroriste commise dans le centre-ville. (SEBASTIAN GOLLNOW / DPA / AFP)

La traque se poursuit trente-six heures après l'attentat de Strasbourg, qui a fait au moins trois morts et treize blessés mardi 11 décembre. "L'enquête ne fait que commencer", a prévenu Rémy Heitz, procureur de la République de Paris, mercredi après-midi. Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait des opérations en cours.

>> Attentat de Strasbourg : suivez les dernières informations en direct

Le suspect toujours en fuite

Où se cache Cherif Chekatt, l'homme le plus recherché de France ? Et pourrait-il frapper à nouveau ? Mercredi soir, les enquêteurs ont diffusé un appel à témoins pour tenter de retrouver le suspect de. Est-ce le signe d'une impasse ? Pas nécessairement, explique à franceinfo Stanislas Gaudon, du syndicat de police Alliance : "Il ne faut pas faire de procès d'intention."

Le temps médiatique n'est pas le temps judiciaire et le temps de la traque. Rappelez-vous, en janvier 2015, avec la traque des frères Kouachi, ça a pris quelques jours mais nous sommes arrivés à nos fins.

Stanislas Gaudon

à franceinfo

Invité sur France Inter, Laurent Nuñez, secrétaire auprès du ministre de l'Intérieur, n'a pas écarté la possibilité que Cherif Chekatt ait pris la fuite en Allemagne, où il avait été incarcéré en 2016 après des cambriolages. Mercredi matin, les enquêteurs ont ainsi pensé un moment qu'il pouvait avoir passé la frontière et s'être réfugié à Kehl, juste de l'autre côté du Rhin, mais une intervention des polices française et allemande n'a pas permis de retrouver sa trace. La frontière franco-allemande est donc particulièrement surveillée et les contrôles ont été renforcés avec l'Allemagne. La Suisse, à 130 km au sud de Strasbourg, a également renforcé ses mesures de sécurité.

>> Comment s'organise la traque pour retrouver le suspect ?

D'importants moyens déployés

Dans cette affaire, les autorités françaises "sont bien entendu en lien avec les autorités allemandes", a repris Jean-Luc Marx, préfet du Bas-Rhin. Côté français, les moyens engagés sont considérables. Au total, 720 membres des forces de l'ordre sont déployés pour localiser Cherif Chekatt. Dans le détail, pas moins de 520 policiers de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), de la sous-direction antiterroriste (SDAT), du Raid et de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) sont sur les rangs. Quelque 200 gendarmes complètent le dispositif, dont deux équipes du GIGN et des hélicoptères.

L'importance du dispositif est évidemment justifiée par la gravité des faits et le profil du fugitif. Cherif Chekatt fait l'objet d'une enquête pour "assassinats, tentatives d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste et association de malfaiteurs terroriste criminelle". "Au regard du lieu ciblé, du mode opératoire employé par l'assaillant, de son profil et des témoignages recueillis auprès de ceux qui l'ont entendu crier 'Allah Akbar', la section antiterroriste du parquet de Paris s'est saisie des faits", a déclaré le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz.

Quatre proches de Chekatt en garde à vue 

En parallèle, les enquêteurs poursuivent leurs interrogatoires. Dans la nuit de mardi à mercredi, en effet, quatre perquisitions ont été menées dans des lieux susceptibles d'être fréquentés par Cherif Chekatt. Placés en garde à vue, ses parents et deux de ses frères étaient toujours entendus mercredi soir. L'un des deux frères fait l'objet d'un signalement du SRRT, le service régional du renseignement territorial, et appartient à la mouvance salafiste strasbourgeoise. L'une des principales questions est de savoir si le suspect a agi seul ou avec des complices, qui auraient pu l'aider notamment à organiser sa fuite.

Des questions encore en suspens

Cherif Chekatt n'est pas un inconnu, puisque son casier judiciaire comptait 27 mentions – dont 25 condamnations – essentiellement en France, mais également en Allemagne et en Suisse. L'auteur présumé de l'attaque "avait un comportement qui relevait déjà du pénal" dès l'âge de dix ans, a résumé le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, évoquant de premières condamnations à 13 ans. Inscrit au fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) et fiché S, Cherif Chekatt a fait l'objet d'un suivi par les services de renseignement français. Les enquêteurs pourraient donc disposer d'éléments leur permettant de progresser.

Avant l'attentat commis dans les rues de Strasbourg, le juge d'instruction avait délivré une commission rogatoire pour l'interpeller, dans le cadre d'une affaire de "tentative d'assassinat et association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime". Les gendarmes et la DGSI ont pourtant manqué le coche, lors d'une perquisition menée au domicile du suspect, le matin même de l'attentat, puisque Cherif Chekatt était absent. Comment le suspect a-t-il pu passer entre les mailles ? La question reste en suspens. En fouillant l'appartement, les enquêteurs ont découvert notamment une grenade défensive, quatre couteaux – dont deux de chasse – et un fusil 22 long rifle chargé. Autant d'éléments qu'il convient d'analyser, tout comme les échanges téléphoniques et les documents issus de la vidéosurveillance.

Enfin, les enquêteurs devront également comprendre comment Cherif Chekatt a pu frapper Strasbourg en plein cœur. Le préfet du Bas-Rhin assure ne pas avoir "relevé de faille dans le dispositif" de sécurité mis en place autour du marché de Noël. Dans ce contexte, et pour anticiper tout effet de "mimétisme" sordide, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé le déploiement de 1 800 militaires supplémentaires dans le cadre de l'opération Sentinelle pour assurer la sécurité des lieux recevant du public, notamment les marchés de Noël.

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