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"Sortir" les élèves radicalisés des établissements : "Au moins à l'école, il y a un contre-discours", nuance l'ancien juge Marc Trevidic

L'ex-juge antiterroriste alerte sur l'influence familiale dans le processus de radicalisation.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Marc Trevidic, ancien juge antiterroriste, invité du 8h30 franceinfo, le 1er novembre 2023. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"Aujourd'hui, la radicalisation, c'est dans le milieu familial", a alerté l'ancien juge antiterroriste Marc Trévidic, invité du 8h30 franceinfo mercredi 1er novembre. Le ministre de l'Éducation Gabriel Attal a annoncé "travailler à des mesures" pour faire "sortir" les élèves radicalisés des établissements scolaires. Une annonce faite après l'attentat d'Arras, qui a coûté la vie au professeur Dominique Bernard

"Si on commence à sortir des élèves parce qu'il y a des signes de radicalisation, on ne va pas régler le problème" et "on va les rendre à leur famille qui est généralement la source de leur radicalisation", a estimé Marc Trévidic. "Au moins à l'école, il y a un contre-discours", a poursuivi le président de chambre à la Cour d’appel de Versailles. L'ancien juge antiterroriste se montre plus réservé après les annonces du ministre de l'Éducation qui entend placer les élèves radicalisés dans "des structures spécialisées".

Le risque d'une radicalisation "familiale"

Pour l'ancien juge antiterroriste, l'influence familiale est indéniable dans le processus de radicalisation. "Il faut voir s'il faut les laisser dans leur famille", a-t-il déclaré, citant le cas de l'attentat d'Arras commis par un jeune individu radicalisé dont le frère aîné a été condamné pour association de malfaiteurs terroriste ou encore de Mohammed Merah, qui avait abattu en mars 2012 trois militaires et quatre personnes, dont trois enfants dans une école juive de Toulouse, dont la radicalisation était "familiale". "C'est un peu comme Obélix, il y en a qui sont tombés dedans petit", a-t-il estimé. "C'est plus profond qu'une secte parce que ce sont les parents", a-t-il poursuivi. "Si vous naissez dans une famille très radicalisée qui prône un islam radical, qui dit qu'il faut tuer tous les mécréants, qu'il ne faut pas respecter la loi française, qu'il n'y a que la charia, le Coran, comment voulez-vous en faire un citoyen qui va vivre de façon harmonieuse en France ?", a-t-il souligné. 

"Ce n'est pas pareil d'être né, d'avoir été élevé dans une culture complètement radicale, et d'être un jeune homme qui se radicalise à l'âge de 17 ans par un environnement extérieur autre que familial."

Marc Trévidic, ancien juge antiterroriste

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Selon Marc Trévidic, pour éviter la radicalisation d'un enfant grandissant dans un foyer d'extrémisme religieux, il faut l'en sortir. "Un juge des enfants peut placer un enfant, le retirer de sa famille parce qu'il estime qu'il est en danger", a-t-il rappelé. "Moi, j'estime qu'à un certain degré de discours radicaux dans la famille appelant à la haine, la violence, on va former un enfant à être complètement opposant à cette société française (…) donc c'est un enfant en danger", a-t-il assuré. Avec "des parents très radicalisés qui disent qu'il faut tuer des mécréants, vous comprenez bien qu'en France ça ne peut pas marcher", a-t-il déclaré. "À ce degré-là, il faut retirer les enfants, les placer, qu'ils aient une éducation qui ne soit pas extrémiste", a-t-il jugé. L'expert reconnaît une solution "très dure", "très compliquée" mais "le droit existe", a-t-il souligné. "Il faut les placer dans des familles d'accueils, des foyers, mais les foyers eux-mêmes ne sont pas imperméables à la radicalisation, ce n'est pas aussi simple", a-t-il reconnu.

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