Société Générale : les avocats de Jérôme Kerviel contre-attaquent
Il “n'a commis aucune malhonnêteté”, il “n'a pas détourné un seul centime”, il “n'a profité d'aucune manière des biens de la banque”. Ce sont les avocats de Jérôme Kerviel qui le disent, haut et fort. Leur client est toujours en garde à vue, dans les locaux de la brigade financière, à Paris.
Depuis que le scandale a éclaté, jeudi, la seule parole que l'on ait effectivement entendue, c'est celle de la Société Générale. Daniel Bouton a traité le courtier d'“escroc” et de “terroriste”.
_ Aujourd'hui encore, la banque a révélé, dans un communiqué, que le courtier avait pris des positions frauduleuses pour beaucoup plus d’argent. “La position frauduleuse découverte le dimanche 20 janvier s’élève à environ 50 milliards d’euros de nominal équivalent. La position a été débouclée en trois jours”, ce qui a abouti à la perte que l’on connaît : 4,9 milliards d'euros.
Autre précision, toujours communiquée par la Société Générale : le trader avait commencé “fin 2006, début 2007, sur de toutes petites transactions, et a développé ce savoir-faire de fraude pour pouvoir aboutir à la mise en place, début janvier 2008, de cette énorme transaction de 30 milliards d’euros équivalents sur l’Eurostock, 18 milliards sur le Dax et 2 milliards sur le Footsie” -- les bourses européennes.
Voici donc le contrepoint. Et il est cinglant.
Les avocats de Jérôme Kerviel estiment que la Société Générale veut “élever un écran de fumée qui détournerait l'attention du public de pertes beaucoup plus substantielles qu'elle a accumulées ces derniers mois, notamment dans l'invraisemblable équipée des subprimes”
Ils dénoncent en fait “les conditions volontairement précipitées et tout à fait anormales” dans lesquelles la banque “a liquidé des positions (50 milliards d'euros, ndlr) qui auraient pu se redresser avec le temps”". Conclusion sans appel : la banque “a ainsi provoqué elle-même des pertes de près de 4,5 milliards d'euros.”
_ Les positions prises par Jérôme Kerviel avaient permis au 31 décembre 2007 de faire gagner potentiellement à la Société générale 1,5 milliard d'euros, selon l'avocat. Ce n'est qu'en prenant ensuite des options concernant l'indice Dax de la Bourse de Francfort que les positions seraient passées dans le rouge et la Société générale aurait fait preuve de précipitation en liquidant ses positions.
Voilà qui éclaire en tout cas sous un nouveau jour toute cette affaire... Seule l'enquête, au final, permettra d'y voir clair. Une enquête “extrêmement fructueuse” disait hier en milieu d'après-midi le chef de la section financière du parquet de Paris.
La garde à vue de Jérôme Kerviel, entamée samedi après-midi, doit s'achever aujourd'hui. Il sera soit remis en liberté, soit présenté au parquet de Paris, qui pourrait alors ouvrir
une information judiciaire et transmettre le dossier à un juge d'instruction en
vue de sa mise en examen.
Au contraire, Christine Lagarde a estimé ce matin sur France 2 qu'il n'y avait aucune raison de croire que la thèse défendue par la Société Générale soit erronée : "Il n'y a aucune raison de penser à ce stade qu'il y ait autre
chose que ce qu'il y a eu, un seul trader". "La question qui se pose aujourd'hui, c'est +que faire pour éviter que ça se
reproduise?+", selon la ministre de l'Economie, qui remettra d'ici vendredi à François Fillon le rapport qu'il lui a demandé sur cette fraude.
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