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Mort de Patrick Henry : "Il a échappé à la guillotine, mais il n'a pas échappé à la réclusion criminelle à perpétuité"

Patrick Henry, l'un des plus anciens détenus de France et symbole de l'abolition de la peine de mort, est décédé dimanche à Lille (Nord). Son avocat, Maître Hugo Levy, a réagi sur franceinfo. 

Article rédigé par franceinfo
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Patrick Henry le 18 janvier 1977 au tribunal de Troyes (Aube).  (AFP)

"Il a échappé à la guillotine, mais il n'a pas échappé à la réclusion criminelle à perpétuité", a réagi Maître Hugo Levy, l'avocat de Patrick Henry, mort dimanche 3 décembre à 64 ans à l'hôpital de Lille (Nord).

Patrick Henry avait bénéficié d'une suspension de peine en septembre 2017, pour soigner son cancer du poumon. Il était l'un des plus anciens détenus de France, condamné pour le meurtre d'un enfant en 1977. Patrick Henry a été le symbole de l'abolition de la peine de mort, grâce à la plaidoirie de son avocat Robert Badinter.

franceinfo : Patrick Henry a-t-il pu profiter de ces dernières semaines de liberté ?

Hugo Levy : Je pense qu'il a pu profiter d'une ou deux journées de liberté avant de partir dans un processus qui l'a conduit inéluctablement à la mort. La perspective de la mort l'a rattrapé immédiatement. Il était déjà en soin au moment où il a été libéré. La chimiothérapie n'a pas pu être efficace, les traitements ont été arrêtés très rapidement. Mais il a pu profiter de la présence de sa sœur, de sa nièce et de Martine Veys et de son mari [qui le soutiennent depuis 25 ans]. C'était un homme qui avait beaucoup de pudeur, qui était devenu un détenu exemplaire.

Étiez-vous proche de lui ?

À partir du moment où on s'occupe des intérêts de quelqu'un, on ne peut pas ne pas être ému quand on apprend sa mort. Je crois que la décision de la cour d'appel du mois de mars 2016 qui avait infirmé un jugement du tribunal d'application des peines de Melun de janvier 2016 lui octroyant une libération conditionnelle, l'avait beaucoup marqué. À compter de cet arrêt, il avait compris qu'il n'obtiendrait plus de libération conditionnelle. Patrick Henry avait fait les efforts nécessaires de réadaptation sociale. En janvier 2016, un juge spécialisé lui octroie une libération conditionnelle et cette décision est annulée deux mois plus tard par la chambre d'application des peines, pour des motifs liés à la façon dont il s'est présenté au cours de l'audience. On se demande si la cour d'appel de Paris ne lui reprochait pas de ne pas avoir été assez empathique ce jour-là. Mais il fallait tenir compte de sa personnalité. C'est quelqu'un qui avait beaucoup de réserve et de pudeur. Alors peut-être qu'il n'a pas eu les bons mots pour satisfaire le désir des magistrats de Paris de le voir 40 ans après les faits manifester une contrition absolue. Ce qui m'a peiné, c'est de voir qu'on avait deux juridictions qui ne partageaient pas le même avis sur la question de savoir si Patrick Henry pouvait bénéficier d'une libération conditionnelle. À partir de ce moment-là, il a été très affecté du point de vue moral après presque 39 années de prison.

Avait-il perdu tout espoir de sortir de prison ?

Il aurait pu faire un pourvoi, mais vu la façon dont la cour d'appel a rejeté sa demande, il n'avait plus d'espoir. Il a employé le moyen qui tue, c'est-à-dire la maladie mortelle. On peut dire qu'il a, en effet, exécuté une peine de réclusion criminelle à perpétuité. Il a échappé à la guillotine, mais il n'a pas échappé à la réclusion criminelle à perpétuité.

"La perspective de la mort l'a rattrapé immédiatement." Hugo Levy, avocat de Patrick Henry à franceinfo.

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