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Manifeste contre l'antisémitisme : "Il ne s'agit pas de critiquer l'ensemble des musulmans", pour le signataire Luc Ferry

Luc Ferry, ex-ministre de l'Éducation nationale, a expliqué, dimanche sur franceinfo, avoir signé le manifeste "contre le nouvel antisémitisme", signé par plus de 250 personnalités, pour que les "autorités prennent conscience" de la situation.

Article rédigé par franceinfo
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Le philosophe et ancien ministre de l'Éducation nationale, Luc Ferry, le 12 décembre 2016. (JEAN-PIERRE CLATOT / AFP)

Plus de 250 personnalités ont signé un manifeste "contre le nouvel antisémitisme", publié dimanche 22 avril dans le quotidien Le Parisien. Parmi les signataires, des hommes et des femmes politiques de droite et de gauche, des artistes, des intellectuels, des responsables religieux juifs, musulmans et catholiques. Le texte est écrit par Philippe Val, ancien directeur notamment du journal satirique Charlie Hebdo. Luc Ferry, ancien ministre de l'Éducation, fait également partie des signataires. Interrogé, dimanche par franceinfo, il déclare : "On n'a pas dénoncé assez tôt les choses parce qu'on risquait d'être accusé d'islamophobie."

franceinfo : Pourquoi avez-vous signé ce manifeste ?

Luc Ferry : Comme l'indique le manifeste, plus de 50 000 Français juifs ont dû déménager, car ils n'étaient plus en sécurité. En tant qu'ancien ministre de l'Éducation nationale, ce qui me frappe le plus, c'est le fait que dans certains quartiers aujourd'hui, il n'y a plus un élève juif dans les établissements scolaires publics. Ils ne se sentent plus en sécurité et ils ne le sont plus. Dès qu'on dénonce ce nouvel antisémitisme, dès qu'on dit qu'il est d'une origine islamiste fondamentaliste, car il ne s'agit pas de critiquer l'ensemble des musulmans, on est traité d'islamophobie par une catégorie de l'extrême-gauche par les islamo-gauchiste professionnels et on se fait insulter. C'est ça qui a empêché de nommer les choses. C'est ça le problème que ce manifeste essaye de faire comprendre, c'est qu'on n'a pas dénoncé suffisamment tôt les choses, parce qu'on risquait toujours d'être accusé d'islamophobie.

Qu'espérez-vous en signant ce manifeste ? Voulez-vous créer un électrochoc ?

Je voudrais que nos autorités prennent conscience [de la situation]. On parle aujourd'hui de mettre en place un islam de France. Mais d'abord, il faut nommer les choses, les comprendre. Je suis très frappé par exemple, qu'on fasse venir pour le ramadan plusieurs centaines d'imams d'Algérie ou du Maroc comme si c'était la première urgence d'haranguer les quartiers français avec des imams étrangers, alors qu'on parle de créer un islam de France. Aujourd'hui, il y a vraiment un certain nombre de mesures à prendre de manière très claire et pas se laisser impressionner immédiatement par l'accusation d'islamophobie. Je suis d'ailleurs très heureux de voir qu'un certain nombre de personnalités de culture musulmane ont signé ce manifeste, c'est important car on ne fera rien sans eux.

Dans ce texte, il est écrit que les Français juifs ont 25 fois plus de risques d'être agressés que leurs concitoyens musulmans. Est-ce que ça se compare ?

Oui, on peut comparer, ce sont les chiffres du ministère de l'Intérieur. Quand j'étais ministre de l'Éducation [entre 2002 et 2004], j'ai vu 200% d'augmentation des actes antisémites notamment dans les collèges ou autour, c'est une réalité qu'il faut prendre en compte. Quand j'ai dit à l'Assemblée nationale que nous avions à faire à un nouvel antisémitisme, que ce n'était plus l'extrême-droite traditionnelle ni l'anti-judaïsme chrétien, je me suis fait insulter, j'ai été traité de "salopard", je m'en souviendrai toute ma vie, par un parlementaire de gauche, désespéré qu'on lui retire sa cible principale qui était le Front national.

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