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Viols collectifs de Fontenay-sous-Bois : un nouveau fiasco judiciaire peut-il être évité ?
Après un verdict jugé trop clément en 2012, le procès en appel de huit hommes s'ouvre mardi devant la cour d'assises d'Evry (Essonne).
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Un an après un verdict jugé trop clément par les plus hautes instances, le procès en appel des viols collectifs de Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne) s'est ouvert devant la cour d'assises d'Evry (Essonne), mardi 26 novembre. Il se tient à huis clos, une majorité des accusés étant mineurs au moment des faits. Outre la délocalisation des audiences, prévues pour durer jusqu'au 13 décembre, quels éléments peuvent faire espérer une autre issue judiciaire ? Seule Nina viendra témoigner à la barre, l'autre plaignante, Aurélie, ayant renoncé à se constituer partie civile.
Pour rappel, sur les quatorze hommes poursuivis en première instance en novembre 2012, dix ont été acquittés et quatre condamnés à des peines allant de trois ans avec sursis à un an ferme - les auteurs de viols en réunion sont passibles de vingt ans de réclusion. Au terme de plus de trois semaines de débats difficiles, la cour d'assises du Val-de-Marne n'a reconnu les viols que sur Nina, pas sur Aurélie. Cette fois-ci, huit hommes sont renvoyés devant la cour d'appel : les quatre condamnés et quatre des dix acquittés pour lesquels le parquet avait réclamé une peine.
Un premier procès treize ans après les faits
Aurélie, hospitalisée une dizaine de jours après une tentative de suicide lors du premier procès, ne s'est pas présentée au procès. "Ce n'est pas un désaveu de ce qu'elle a vécu", a expliqué son avocate, Clotilde Lepetit, elle s'était préparée depuis quelques semaines mais la perspective de l'audience est devenue de plus en plus réelle et la peur est montée. Elle a subi un vrai traumatisme". Cette mère de trois enfants affirmait avoir été violée par quatre des accusés quand elle avait 16 ans, en 2001. Nina, elle, situe les six mois de viols collectifs quotidiens en 1999, alors qu'elle avait 15 ans. Selon les accusés, "tout le monde savait" que les deux adolescentes subissaient dans la cité des "tournantes", du nom des ces viols en réunion commis parfois dans des caves d'immeubles. Et ce parce qu'elles étaient d'après eux "consentantes", comme le rapportait Libération à l'époque du premier procès.
Par peur des représailles, les faits n'ont été dénoncés par Nina qu'en 2005, après une énième agression par l'un des accusés, qui l'a envoyée aux urgences. Ce délai, auquel s'ajoute celui des investigations, explique en partie le "naufrage judiciaire" de cette affaire, jugée treize ans après les faits, selon les avocates des deux plaignantes lors du premier procès, Clotilde Lepetit et Laure Heinich-Luijer.
Nouveau contexte, nouvel avocat
Un an a passé, éloignant un peu plus les acteurs du dossier des événements. Mais plusieurs choses ont changé. Le contexte, d'abord. Le procès en appel s'ouvre au lendemain de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et quatre jours après la présentation par le gouvernement d'un plan triennal visant à lutter plus efficacement contre ces violences, notamment sexuelles. Il est, entre autres, question de favoriser le dépôt de plaintes, d'améliorer le recueil de preuves en cas de viol et d'augmenter le nombre de places d'hébergement d'urgence pour les victimes. Trois points qui ont péché dans l'affaire de Fontenay-sous-Bois, Nina et Aurélie étant notamment contraintes de continuer à vivre à proximité de leurs agresseurs.
Autre élément nouveau, la défense de Nina est désormais assurée par Léon-Lef Forster, un avocat connu pour avoir plaidé dans des dossiers politico-financiers importants et pour avoir représenté des puissants, tels que Charles Pasqua ou Dominique Strauss-Kahn. Ce redoutable pénaliste, qui a notamment décroché la relaxe du premier devant la Cour de justice de la République, "continue à défendre des sans-grade, gratos", comme le racontait un de ses amis avocats à Libération en 2010. Et affiche à son compteur, selon le quotidien, "6 000 affaires correctionnelles et 800 dossiers d'assises plaidés en quarante ans".
Nina, "une jeune femme dans un état effrayant"
"Nina n'est pas dans un processus de vengeance mais de reconnaissance, explique Léon-Lef Forster. Elle n'attend pas la lourdeur des peines mais qu'on entende sa voix, qu'on la croie. Elle souhaite qu'on prenne en considération la destruction qu'elle a subie, que les accusés puissent ressentir la douleur qu'elle continue à vivre." La jeune femme le confirme à francetv info : "Je veux juste être reconnue en tant que victime afin de pouvoir aller de l'avant", dit-elle.
A 30 ans, le corps alourdi de 70 kilos, "c'est une jeune femme dans un état effrayant", qui doit "réapprendre à communiquer, essayer de récupérer son corps qu'elle rejetait elle-même, ajoute l'avocat. On fait en sorte qu'elle essaie de pouvoir se confronter au vécu du procès dans les meilleures conditions. En première instance, c'était très lourd pour elle."
Des associations féministes vigilantes
Face aux dénégations des accusés, trentenaires comme elle, aux questions incisives de la défense, la jeune femme est sortie plusieurs fois en pleurs lors du premier procès. Hervé Stéphan, qui présidera le procès en appel à Evry, parviendra-t-il à préserver la sérénité des débats ? "Habitué des dossiers difficiles", selon La Croix, le magistrat, qui a notamment présidé le troisième procès d'Yvan Colonna, "est unanimement reconnu pour son professionnalisme". Idem pour le procureur, Jean-Paul Content, présenté par Le Parisien en 2006 comme "l'homme des dossiers délicats", et qui, depuis, a porté l'accusation dans le procès du "gang des barbares" et dans celui d'Abel Ferrara pour le braquage de Joinville-le-Pont (Val-de-Marne).
Les associations féministes, elles, veillent au grain. Contactés par francetv info, Osez le féminisme, qui assimilait le premier verdict à un "permis de violer", et le Collectif national pour les droits des femmes, qui avait manifesté devant le ministère de la Justice et écrit une lettre ouverte à François Hollande, espèrent cette fois un verdict "plus proche des réquisitions prononcées en première instance" (cinq à sept ans de prison). Dans le cas inverse, les deux associations se disent prêtes à "monter au créneau". Pour en finir avec ces chiffres, communément admis : seules 10% des femmes victimes de viol portent plainte et seuls 2% des auteurs sont condamnés.
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