Des fouilles à l'entrée des aérogares après l'attaque d'Orly : une "fausse bonne idée"
Après l'attaque à Orly samedi, le sénateur-maire du Bourget, Vincent Capo-Canellas (UDI) estime qu'il faudrait priviligier la mise en place d'une agence spécialisée et de profileurs pour sécuriser les aéroports.
Comment renforcer encore la sécurité dans les aéroports ? La question se pose après l'attaque samedi d'une patrouille de l'opération Sentinelle à l'aéroport d'Orly-Sud par Ziyed Ben Belgacem, au terme d'une équipée violente à travers la banlieue parisienne. L'homme a pu être abattu sans faire de victimes.
Vincent Capo-Canellas, sénateur-maire (UDI) du Bourget (Seine-Saint-Denis) et auteur en 2016 d'un rapport sur la sûreté du transport aérien, a estimé lundi 20 mars sur franceinfo que la présence de portiques de sécurité à l'entrée des aérogares, une "fausse bonne idée". En revanche, il faudrait, selon lui, réfléchir à la mise en place d'une "analyse comportementale dans les aérogares" et d'une "agence qui gère l'ensemble de la problématique".
franceinfo : Parmi les mesures possibles, il y a la fouille des voyageurs dès l'entrée de l'aérogare. Mais est-ce réalisable ?
Vincent Capo-Canellas : Il s'agit d'une fausse bonne idée. On l'a vu lors de l'attentat à l'aéroport d'Istanbul l'année dernière. La fouille à l'entrée est un point de filtrage extérieur. Cela expose la foule. Il est facile, à ce moment-là, d'atteindre le public avec une rafale. À l'aéroport Atatürk, on a aussi vu que les terroristes avaient pu mettre hors d'état de nuire ceux qui faisait cette première fouille pour entrer dans l'aérogare. Le véritable changement qui est intervenu l'année dernière, en terme de législation, est un changement de posture. Maintenant, on peut neutraliser l'individu, dès lors qu'on a des signes manifestes que son intention est une intention terroriste. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé samedi, puisque l'individu a pu être neutralisé. Il faut rendre hommage aux forces de l'ordre. Il y a cependant des leçons à tirer de ce qu'il s'est passé. L'individu en question a quand même réussi à entrer dans l'aéroport avec une arme et un bidon d'hydrocarbures. Mais je pense que le portique à l'entrée n'est pas la solution.
Pour rédiger votre rapport, vous êtes allés voir comment cela se passait à Tel-Aviv, en Israël. Avez-vous vu des choses intéressantes ?
Il nous faut réfléchir pour importer certaines de leurs techniques. Notamment l'analyse comportementale. Il s'agit de "profileurs", qui regardent si l'individu est fébrile. Ils peuvent ensuite déclencher un certain nombre de patrouilles. Cela existait au moment du passage au contrôle bagages, et au contrôle passager. Il s'agit de le généraliser dans l'ensemble des aérogares. Et puis il y a un contrôle différencié qu'il faut pouvoir réaliser en fonction de critères objectifs. Cela va poser quelques problèmes en terme de législation.
Le risque c'est qu'il y ait une forme de délit de faciès ?
Cela veut dire qu'on va regarder le profil de l'individu : comment il a acheté son billet, quel type de parcours il fait habituellement, est-ce que ce passager est connu ou pas. Il faudra qu'en France on sache aussi parfois tester ce genre de mesures, c'est ce que je propose dans mon rapport. Après il y a un souci de financement, notamment sur le système de vidéosurveillance [qui comporte à Orly 9 000 caméras, NDLR]. Il n'est pas assez doté. Il y a un débat entre l'État, les autorités aéroportuaires et les compagnies aériennes. J'ai proposé qu'on élargisse la base de la taxe qui est payée aujourd'hui par les seuls passagers, et que l'État prenne ses responsabilités.
Vous proposez aussi de mieux centraliser la sûreté dans les aéroports...
Aujourd'hui, on ne sait pas qui est le patron dans les aéroports. Quand c'est un aéroport parisien, Aéroports de Paris a souvent le rôle de leader, la DGAC est présente, tout comme beaucoup de services de l'État et une dizaine de services policiers. Moi je demande qu'il y ait une agence qui gère l'ensemble de la problématique : l'analyse du risque, l'évolution sur le terrain, la mise en œuvre des moyens, la gestions des accidents ou des attentats. Il s'agit de passer d'un système éclaté, qui n'est peut-être pas assez sensible aux signaux faibles, à un système centralisé. Les terroristes ne vont pas toujours s'attaquer à nous avec un pistolet à grenaille ou un bidon d'essence. Il peut y avoir des hackers. Ils peuvent contrôler des drones. Il faut qu'on s'adapte et qu'on rehausse notre posture.
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