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Exclusif : le document qui accuse Jérôme Kerviel

En exclusivité, France Info s’est procuré l’ordonnance de renvoi signée des juges d’instruction Françoise Desset et Renaud Van Ruymbeke. Un document de 75 pages qui synthétise le travail des juges...
Article rédigé par franceinfo
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Durant l’instruction, Jérome Kerviel a été interrogé à 15 reprises et confronté 16 fois. Alors que le trader soutient que les responsables de la banque étaient au courant de ses activités, les juges apportent un démenti cinglant à de telles accusations.

Les magistrats soulignent que "l’analyse précise des courriels échangés entre M. Kerviel et les multiples services de contrôle montrent, sans ambiguité, que M. Kerviel leur a menti a de nombreuses reprises durant des mois, n’hésitant pas à produire de faux documents". Les juges relèvent que "ces faits ont été reconnus par M. Kerviel" et en concluent que "ce sont ces mensonges réitérés qui ont mis en échec les contrôles".

Ils s’interrogent enfin : "Comment M. Kerviel peut-il soutenir que les services de contrôle étaient informés de la réalité de ses prises de position (…) alors qu’il leur a toujours menti et produit de faux e-mails ?"

Pas de motivation financière

Dans leur ordonnance, les deux magistrats s’interrogent également sur les motivations du trader. "Le comportement de M. Kerviel était-il dicté par l’augmentation de son bonus ou de son train de vie ?" Renaud Van Ruymbeke et Françoise Desset considèrent qu’on ne peut faire un lien direct entre les opérations masqués de Jérôme Kerviel et un bonus de 300.000 euros qui devait lui être attribué, et qui d’ailleurs finalement ne lui sera pas versé. Ils précisent que "l’enquête menée par la brigade financière n’a pas permis de déceler le moindre mouvement suspect sur ses comptes bancaires. Aucune extravagance de quelque nature que ce soit n’a été relevée".

Un comportement irrationnel

Les juges constatent que, selon ses propres déclarations, Jérôme Kerviel a eu un "comportement irrationnel". " J’étais dans un monde virtuel", a déclaré le trader. "Les montants n’avaient plus vraiment de sens. J’étais pris dans une spirale. J’étais complètement déconnecté, grisé par le succès". Et le trader ajoute : "Je suis d’accord pour dire que tout cela n’avait aucun sens, ni aucune fin, ni aucun but pour moi".

Les juges, qui n’apportent pas plus de réponse que Jérôme Kerviel lui-même à ses motivations profondes, soulignent au passage avec un brin d’ironie que "les enquêteurs ont relevé l’existence de nombreuses communications de M. Kerviel avec une plate forme de voyance". Le trader, qui a fait perdre plusieurs milliards à la Société Générale, consultait donc des devins. Faut-il y voir une explication à son comportement irrationnel ? Cela demeure un mystère.

Rebondissement : la procédure gelée

Au lendemain du renvoi de Jérôme Kerviel devant le tribunal correctionnel de Paris, son avocat Me Olivier Metzner vient d’indiquer que la Cour de cassation a accédé, la semaine dernière, à une demande de l'ancien trader de la Société Générale, gelant de fait la procédure. Le dossier est donc bloqué dans l'attente de l'examen du pourvoi.

Matthieu Aron,
_ édité par Gilles Halais

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