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Vidéo Présidentielle : "On s'achemine vers le scénario catastrophique du crash démocratique", alerte l'ONG A Voté !

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Article rédigé par franceinfo
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"Les citoyens aujourd'hui veulent s'engager dans une démocratie beaucoup plus continue et surtout ils veulent retrouver la question du pouvoir", explique Dorian Dreuil, le co-président de l'ONG A Voté ! et membre de l'Observatoire de la vie politique de la Fondation Jean-Jaurès.

"Tout laisse à penser qu'on s'achemine vers le scénario un peu catastrophique du crash démocratique, d'une abstention autour des 30%, alerte Dorian Dreuil, le co-président de l'ONG A Voté ! et membre de l'Observatoire de la vie politique de la Fondation Jean-Jaurès, jeudi 7 avril sur franceinfo, quelques jours avant le premier tour de l'élection présidentielle dimanche.

>> Référendum, convention citoyenne, RIC... Que proposent les candidats à la présidentielle pour réformer la vie démocratique ?

franceinfo : S'oriente-t-on vers une abstention record dimanche 10 avril ?

Dorian Dreuil : Tout laisse à penser qu'on s'achemine vers le scénario un peu catastrophique du crash démocratique, d'une abstention autour des 30%. C'est ce que donnent en tout cas les projections un peu consolidées de plusieurs instituts aujourd'hui, qui iraient bien au-delà du record de 2002, qui était à 28,4% d'abstention. En 2017, on était autour des 22% d'abstention. Donc c'est un risque, mais ce n'est pas un accident électoral.

"Je pense qu'il faut le voir, d'une manière un peu plus globale, comme la dernière étape d'une longue dégradation de la relation entre le citoyen et le politique et surtout le citoyen et les institutions et le vote."

Dorian Dreuil, le co-président de l'ONG A Voté !

à franceinfo

Faut-il changer tout le système politique français pour lutter contre cette abstention 

En tout cas, il y a un problème du côté de l'architecture institutionnelle. Ce qu'on remarque et ce qu'on entend, c'est que les citoyens aujourd'hui veulent participer à la vie de la cité et veulent s'engager non pas seulement une fois tous les cinq ans en votant, mais dans une démocratie beaucoup plus continue, dans une démocratie du quotidien et surtout ils veulent retrouver la question du pouvoir. Les citoyens n'ont pas le sentiment que le politique et la politique ont le pouvoir d'avoir un impact sur les causes qui leur sont chères, le pouvoir d'avoir un impact sur leur quotidien, le pouvoir de changer la vie, en quelque sorte, et donc forcément, paradoxalement, ils se désintéressent du vote. L'autre paradoxe de cette configuration d'élection présidentielle est qu'on a l'impression de tellement connaître le deuxième tour qu'on a envie de le déjouer dès le premier, alors qu'il y a, sur les 12 candidats, un arc de pensée, un arc de réflexion et de philosophie politique qui est assez large et assez vaste pour qu'on puisse trouver en tout cas le début d'un vote d'adhésion, le début d'un vote de conviction. En réalité, les convictions ne sont plus forcément les "drivers" [pilotes] les plus forts, notamment sur les nouvelles générations et notamment chez les plus jeunes, qui pourraient être les premiers et les plus forts à s'abstenir ce dimanche. On s'achemine vers un record de désintérêt du vote du côté des jeunes.

Est-il possible de ramener les abstentionnistes vers les urnes ?

Il y a deux enjeux. Je pense à l'enjeu technique du système d'inscription sur les listes électorales. On est une des dernières démocraties à avoir un tel système qui conduit près de 7,6 millions de personnes à être mal inscrites sur les listes électorales et principalement des jeunes. C'est le premier enjeu, parce qu'on estime qu'être mal inscrit, c'est trois fois plus de chances de s'abstenir. Le deuxième enjeu, c'est la question du pouvoir qui doit se mettre en récit et on doit, du côté de la responsabilité des politiques, redonner envie aux citoyens d'exercer leur pouvoir en repensant le rapport du citoyen dans les institutions. On doit réfléchir évidemment au vote par correspondance, aux modalités de scrutin, à la durée du scrutin. Bref, tout ce qui peut favoriser une démocratie plus ouverte et plus inclusive. Ces projections d'abstention et le record vers lequel on s'achemine dimanche doit donner un peu le signal d'alarme de l'urgence.

"On ne parle pas de démocratie dans cette élection, c'est dommage."

Dorian Dreuil

à franceinfo

Il faut espérer qu'au lendemain du premier tour, au lendemain du second tour, ce soit la priorité des nouveaux élus ou de celui ou celle qui sera à la destinée du pays pendant cinq ans de repenser l'ensemble des règles démocratiques.

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