Présidentielle 2017 : professeur, mère au foyer, diplômé... Ils n'iront pas s'inscrire sur les listes électorales
Contrairement à des milliers de Français, ces citoyens-là ont décidé de ne pas s'inscrire sur les listes électorales et donc ne pas voter à l'élection présidentielle de 2017. Franceinfo leur donne la parole.
En 2017, ils passeront leur chemin. Comme chaque fin d'année précédant des échéances importantes, c'est le rush dans les mairies pour s'incrire sur les listes électorales, mais certains Français ont délibérément choisi de rester chez eux. Pour ces citoyens, le 31 décembre rimera seulement avec le réveillon de fin d'année et non avec la date limite pour s'incrire ou se réinscrire sur les listes électorales.
Désabusés de la politique, fatigués des promesses non tenues, exaspérés par l'absence de reconnaissance du vote blanc... Ces hommes et ces femmes, qui viennent de toutes les couches sociales de la population, ont fait leur choix : pas question de voter pour l'élection présidentielle. Franceinfo les a interrogés.
Ils pensent que leur vote ne sert à rien
Depuis plusieurs années, ils ne se font plus aucune illusion sur les politiques. Certains évoquent leur situation personnelle, comme Sébastien : "Je ferai toujours partie des gens qui seront dans la misère en 2017, ça ne change pas et ça ne changera sûrement jamais". Il y a aussi Alexia, 30 ans, qui, depuis un déménagement dans la région lyonnaise en 2011, n'est plus inscrite sur les listes électorales. "Il y a trois ans, j'étais en CDI, on m'a licenciée, j'ai connu Pôle Emploi et maintenant je suis enquêtrice de sondage. Je n'ai eu droit à aucune aide. Je regarde les reportages sur les hommes politiques, c'est toujours les mêmes promesses non tenues", explique-t-elle.
Je suis désabusée
Alexia, 30 ansà franceinfo
D'autres ne se sentent pas représentés, à l'instar de Camille. Cette professeure des écoles de 26 ans a profité d'un déménagement en 2012 de Londres à Nantes pour ne pas se réinscrire sur les listes. "Mon père est marocain, ma mère française, j'ai souvent eu l'impression que ma voix ne comptait pas. Il est difficile de grandir avec une double culture, de ne pas se sentir représentée dans la sphère publique ou les médias et donc de s'impliquer dans la vie politique de son pays", raconte-t-elle. Lui aussi a 26 ans et lui non plus n'ira pas s'inscrire : Clément est pourtant diplômé d'un master recherche en sociologie politique mais ses études l'ont, dit-il, poussé à réfléchir à notre système politique. "J'estime le jeu électoral biaisé, une compétition d'ego médiatisée, dans laquelle est absent tout débat d'idée", critique-t-il.
Je ne veux pas légitimer ce système politique en votant
Clément, 26 ansà franceinfo
Enfin, il y a ceux qui sont persuadés que leurs candidats préférés n'ont aucune chance. "Je pressens très fortement ceux qu'il va y avoir au second tour et je refuse de voter pour eux", confie Katell. Cette mère au foyer de 35 ans a elle aussi profité d'un déménagement dans sa région de Loire-Atlantique en 2012 pour ne pas se réinscrire. Elle se dit intéressée par "Bayrou, Mélenchon ou Montebourg" mais, tranche-t-elle, "ils n'arriveront jamais au second tour".
Ils voudraient que leur vote soit pris en compte différemment
Le vote blanc. C'est bien l'un des outils, qui, s'il était comptabilisé, pourrait faire retourner ces citoyens aux urnes. "Je voudrais que le vote blanc soit pris en compte. Si c'était le cas, je me serais inscrite. Tant que le vote blanc n'est pas pris en compte, voter n'est pas un geste civique", soutient Katell. "Pour l'instant, je n'envisage pas un jour de voter à nouveau. Mais si le vote blanc était comptabilisé, je ferais l'effort d'aller revoter", renchérit Camille.
D'autres plaident encore pour une reconnaissance de leur opposition. "Notre système ne reconnaît pas la valeur de l'abstention et il n'est pas possible de montrer qu'aucun candidat en course me convient, je ne vois donc pas l'intérêt de mon inscription. Le jour où il sera possible de positionner un vote 'contre', ce sera une joie de retourner voter", confie un internaute. François, 51 ans, n'est pas loin de penser la même chose. Ce responsable d'agence n'est plus inscrit sur les listes électorales depuis "une bonne vingtaine d'années".
Il n'existe aucun moyen de comptabiliser mon opinion et je n'ai pas envie de voter pour quelqu'un qui ne m'intéresse pas
François, 51 ansà franceinfo
"Au second tour, on est obligé de choisir entre deux candidats, ce n'est pas normal", s'indigne-t-il. "Il faut trouver un moyen de comptabiliser un vote contre. Ça serait quelque chose de choisi et de réfléchi et ça devrait avoir un poids par rapport à ceux qui sont élus, ils devraient prendre cela en compte. Ce serait une sorte de contre-pouvoir", imagine-t-il.
Ils s'engagent autrement
Si ces Français n'iront pas glisser un bulletin dans l'urne, n'allez pas leur dire qu'ils ne font pas leur devoir de citoyen. "Mon devoir de citoyen ?" s'étranglerait presque Sébastien. "Je le fais chaque jour, pas en allant voter, non, mais en essayant à chaque moment de ma journée de me sortir la tête de l'eau, de me débattre pour ne pas plonger un peu plus".
D'autres, encore, sont engagés dans la vie de la cité. "Je ne suis pas désintéressé par la chose publique, je participe à des manifestations ou à des actions en faveur des sans-papiers, par exemple. Je trouve ça plus important que de voter, c'est ma manière d'être citoyen", assure Clément, qui indique qu'il suivra néanmoins attentivement la campagne.
Camille partage elle aussi ce point de vue. La jeune femme refuse également l'étiquette de "mauvaise citoyenne".
La citoyenneté ne s'incrit pas seulement dans le vote
Camille, 26 ansà franceinfo
"Pour moi, la citoyenneté se vit aussi au quotidien avec mon métier de professeure des écoles, j'opère aussi auprès de collectifs comme les mineurs isolés de Nantes", raconte la jeune femme. "Voter n'est pas secondaire, ça a une importance mais je fais le choix de ne pas y aller", conclut-elle.
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