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Hommage aux victimes de la déportation : la force du témoignage pour dire "le danger"

Yvette Lévy, 91 ans, et Eveline Szpirglas, 89 ans, rescapées des camps de la mort, témoignent dimanche sur franceinfo de la nécessité d'entretenir la mémoire collective et livrent leur inquiétude à une semaine du second tour de la présidentielle.

Article rédigé par Sandrine Etoa-Andegue, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Yvette Lévy, ici en 2012 lors d'une cérémonie au Mémorial de Drancy, et son amie Eveline Szpirglas témoignent à l'occasion de la journée du souvenir des victimes de la déportation le 30 avril 207. (BERTRAND GUAY / AFP)

A l'occasion de la journée du souvenir des victimes de la déportation, célébrée partout en France, Yvette Lévy, 91 ans, et Eveline Szpirglas, 89 ans, témoignent dimanche 30 avril sur franceinfo de la nécessité d'entretenir le travail de mémoire collective. Ces rescapées des camps de la mort livrent aussi leur inquiétude à une semaine du second tour de la présidentielle, qui voit s'opposer Marine Le Pen, candidate du Front national à Emmanuel Macron, fondateur du mouvement En Marche !.

La nuit de l'arrestation et l'enfer

Comme le confirment les photos en noir et blanc qu'elles font défiler, Yvette Lévy et Eveline Szpirglas font partie des dernières rescapées des camps de la mort, encore en vie. Elles citent les prénoms de leurs amies disparues, puis se remémorent, avec émotion et précision, leur arrestation, en région parisienne, dans la nuit du 21 au 22 juillet 1944. Yvette, scoute et résistante de 18 ans et Eveline, orpheline de 16 ans, sont transférées à Drancy (Seine-Saint-Denis). Dix jours plus tard, dans des wagons à bestiaux, elles sont envoyées vers l'enfer du camp d'Auschwitz-Birkenau. À deux voix, elles se souviennent de "l'odeur nauséabonde" quand elles ont sauté sur le balustre. "Cette nuit-là, tout le camp des tziganes a été exterminé, pour nous faire de la place", témoignent-elles. "On est partis 1 300 de Drancy, 996 sont partis à la chambre à gaz", ajoute Yvette Lévy. Les deux jeune filles seront libérées le même jour, le 9 mai 1945 et se retrouvent 50 ans plus tard.

Le témoignage nécessaire

Yvette consacre une partie de sa vie à témoigner sans relâche, notamment auprès des scolaires de toute la France. Elle est retournée plus de 200 fois à Auschwitz. "J'y suis allée en 1978 pour voir, pour essayer de comprendre où j'étais. J'ai beaucoup témoigné, je suis beaucoup partie. Je suis tous les jours dans le camp", explique-t-elle.

Yvette Lévy, deuxième en partant de la gauche, en 1993 à Nancy, avec des amis, rescapés comme elle, des camps de la mort. (YVETTE LEVY)

C'est sur l'insistance de son amie qu'Eveline se rend à Auschwitz (Pologne) pour la première et unique fois en 2015. Elle fuit les cérémonies et les journées de commémoration et si elle avait pu, elle n'aurait rien dit de son histoire à ses enfants. "Je n'ai jamais voulu qu'on en parle. C'était passé", dit-elle. Ce qui ne l'empêche pas d'apprécier la nécessité de la mémoire collective, surtout "pour les jeunes et les moins jeunes qui ne savent même pas" et disent qu'"ils ne connaissent pas Hitler".

Il ne faut pas les laisser croire que le monde est très beau, surtout en ce moment.

Eveline Szpirglas

Le présent qui fait peur

Toutes les deux estiment que le discours xénophobe et antisémite se banalisent, à l'écoute de "choses qu'on ne disait pas avant" et qui s'étendent "aux musulmans". Une victoire de Marine Le Pen à la présidentielle au second tour le dimanche 7 mai, relève d'une configuration qui les terrifie.

Les gens ne se rendent pas compte du danger, ils ne l'ont pas vécu.

Yvette Lévy

"J'ai peur de retomber dans une France d'extrême droite fasciste, peur que le Front national passe", ajoute Yvette avec son souci de la vigilance.

Hommage aux victimes de la déportation : la force du témoignage pour dire "le danger" : le reportage de Sandrine Etoa-Andegue

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