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Et si Hollande avait intérêt à se soumettre à une primaire à gauche ?

A en croire certains de ses proches, le chef de l'Etat ne serait pas hostile à une primaire pour désigner le candidat de la gauche à l'élection présidentielle de 2017. Une prise de position plus tactique que sincère.

Article rédigé par Ilan Caro
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
François Hollande, le 13 novembre 2014 à l'Elysée. (PATRICK KOVARIK / AFP)

L'hypothèse d'une primaire pour désigner le candidat de la gauche à la présidentielle de 2017 prend chaque semaine un peu plus de consistance. Mardi, pour la première fois, un membre du gouvernement, Thierry Mandon, a publiquement affirmé qu'il était favorable à une primaire réunissant toute la gauche. Cette possibilité ne serait pas rejetée en bloc à l'Elysée. François Hollande commencerait même "à être convaincu par la primaire", selon un proche cité par Europe 1. Y a-t-il intérêt ? Explications.

Pourquoi pas, si l'ensemble de la gauche y participe

Pour François Hollande, l'intérêt de l'exercice serait d'évacuer le risque d'une multitude de candidatures à gauche. Il pourrait ainsi aborder le premier tour de l'élection présidentielle en étant le seul candidat de la gauche modérée et limiter la possibilité d'être éliminé d'entrée.

Un tel scénario suppose que la primaire concerne la gauche et pas seulement le PS. En 2011, seuls les radicaux de gauche avaient participé à la primaire socialiste. Or, après un mandat houleux au cours duquel Europe Ecologie-Les Verts (EELV) a retiré sa participation au gouvernement et a mis un pied en dehors de la majorité, pourquoi les écologistes se priveraient-ils de la caisse de résonance que pourrait leur offrir une campagne présidentielle ? Le sénateur Jean-Vincent Placé, conscient que les écologistes n'ont jamais brillé à la présidentielle, se verrait bien participer à une primaire ouverte avec le reste de la gauche. Mais ce n'est pas la ligne de Cécile Duflot, qui juge "avoir les épaules" pour 2017, et qui pourrait être tentée par une alliance avec la gauche de la gauche.

La question écologiste n'est pas la seule en suspens. Que compte faire Martine Aubry ? Quid de Manuel Valls ? L'aile gauche se lancera-t-elle unie ? Toutes les parties se mettront-elles d'accord sur un calendrier et des règles communes ? En définitive, trop d'inconnues subsistent pour affirmer qu'une primaire à gauche puisse éventuellement bénéficier à François Hollande. Un sondage publié samedi 22 novembre par Le Figaro montre qu'elle pourrait même, selon les configurations, s'avérer fatale pour le chef de l'Etat. Les signaux d'ouverture émis par l'Elysée tiennent davantage de la prise de position tactique : ils permettent de dédramatiser l'enjeu en évitant de braquer l'aile gauche. Un bon moyen d'enterrer le débat.

Non, cela révélerait son manque d'autorité

Jamais la légitimité d'un président sortant à se présenter pour un second mandat n'a été aussi discutée. En 2011, Nicolas Sarkozy, dont la popularité accusait jusqu'à 15 points de retard sur son Premier ministre François Fillon, n'a jamais été sérieusement contesté par sa famille politique.

A travers ce débat sur la nécessité ou non d'organiser une primaire en 2017, François Hollande paie son absence d'autorité naturelle sur sa famille politique. Une situation due autant à la tradition très peu légitimiste de la gauche qu'à l'impopularité du chef de l'Etat, arrivée à un niveau jamais atteint pour un président sous la Ve République. François Hollande ou son entourage ont beau faire mine d'entrouvrir la porte, l'organisation d'une primaire à gauche en 2016 ou 2017 serait une humiliation pour lui.

Certains, y compris au sein de la frange sociale-démocrate du PS, militent toutefois pour la tenue d'une primaire. Ainsi, pour la députée Karine Berger, "la primaire, c’est une chance, une modernité. Cela donne au candidat une vraie force politique. Il serait dommage d’y renoncer".

Non, il ne peut pas être "président la journée et candidat le soir"

A devoir faire campagne tout en remplissant les obligations qui lui incombent, le président se trouverait dans une position inconfortable. "Vous imaginez pendant six mois le président de la République candidat le soir avec d'autres candidats qui auront tous une certaine valeur, et président de la République le lendemain ? Je vois mal comment cela peut être organisé", a réagi le président de l'Assemblée, Claude Bartolone, sur LCP.

Surtout, la participation du président sortant à une primaire le priverait de la maîtrise de son propre calendrier, une arme essentielle en pareilles circonstances. Mitterrand en 1988 et Chirac en 2002 en ont usé pour faire durer le suspense, ou au contraire créer la surprise. Si François Hollande devait se soumettre à un premier round avant la grande explication, il serait placé au même niveau que ses concurrents.

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