"Mouse jacking" : le vol de voiture 2.0
Le "mouse jacking", ce terme vous dit-il quelque chose ? C'est le vol de voiture à la souris, c'est-à-dire par piratage informatique. Il s'agit d'une technique de plus en plus répandue. Sans agresser le propriétaire du véhicule ou endommager la voiture, ce genre de cambriolage consiste à confondre les systèmes de sécurité de la voiture avec des techniques électroniques et informatiques. Dès lors, la technologie permet en quelques minutes et à distance, l'interception du signal des clés, le brouillage du signal, la reproduction de la clef ou encore coutournement de l'anti-démarrage via la prise de diagnostic.
La technique connaît un vrai boom depuis quelques années en France et selon une étude du cabinet d'expertise BCA, les vols à assistance électronique ont représenté en 2014 plus de 50% des cambriolages de voitures. "Les voitures sont aujourd'hui de plus en plus automatisées et connectées, et des techniciens de l'informatique peuvent démarrer les véhicules sans clefs et sans effractions ", note la BCA. C'est d'ailleurs ce qu'il s'est passé à Paris à la mi-mai 2015, où deux hommes ont été interpellés en flagrant délit de "mouse jacking ". Avec cette méthode ils avaient réussi à dérober au moins une vingtaine de 4x4 de luxe dans la capitale et les Hauts-de-Seine après avoir déjà sévi en Grande-Bretagne. Ils appartenaient d'ailleurs à un gang qui a été démantelé, selon les informations révéles par Le Parisien.
Abdo Bou Antoun est une des nombreuses victimes de cette nouvelle technique de vol 2.0. Ce concessionnaire pour une marque de voitures britannique du 17ème arrondissement de Paris, a été cambriolé une nuit d'avril 2015. Le lendemain matin, sept de ses 4X4 de luxe avaient disparu. Il n'oubliera d'ailleurs jamais la scène. "C’était un lundi matin. On avait besoin d’aller chercher une voiture pour un client alors un de nos salariés a été dans un parking et … c’était une vue horrible. Parce que quand il vous manque sept places cela se voit, mais surtout, (parce ce qu') ils ont cassé quatre voitures ", confie t-il comme encore sous le choc.
"On ne peut plus accepter que l'électronique embarqué soit aussi facilement accessible"
Ce qu'il s'est passé ? Les malfaiteurs ont forcé les voitures et une fois à l'intérieur, ils ont branché un boîtier sur les prises diagnostiques du véhicule, celles utilisées par le mécanicien lors des révisions. Avec ce boîtier, ils piratent le système de sécurité, puis démarrent la voiture. Cet outil coûte entre 1.000 et 5.000 euros sur Internet. et il est très facile de s'en procurer un, regrette Pierre Chasseray, délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes. "Malheureusement, c’est d’une simplicité enfantine, n’importe qui peut devenir demain voleur de voitures de luxe. Il y a donc là véritablement un enjeu ." Après avoir été utilisée par les malfrats, c'est aux constructeurs d'utiliser la technologie pour résoudre ce problème selon Pierre Chasseray. "Le constructeur doit maintenant proposer un véhicule qui sécurise l’accès à l’électronique embarqué, on ne peut plus accepter qu'il soit aussi facilement accessible sur nos véhicules ", s'indigne t-il.
La technique fonctionne avec toutes les voitures récentes. Généralement, les malfaiteurs achètent également une clef universelle mécanique, qui se vend sur la toile à environ 15 euros . Cette dernière ouvre les automobiles sans les forcer, ni les abîmer. Très utile pour les véhicules de luxe. "Pas de trace d’effraction, vous allez pouvoir soit partir faire une virée avec le véhicule et le redéposer (...) ou alors tout simplement le revendre à l’étranger, en maquillant le véhicule et là vous allez pouvoir faire un vol "qui vaut le coup ", dénonce Pierre Chasseray.
Pas d'effraction, pas d'indemnisation
Les victimes de ces vols ne sont pas au bout de leur peine. Puisque si la victime a la chance de retrouver son véhicule, un problème se pose, car "pas d'effraction" rime bien trop souvent avec "pas d'indemnisation" pour les assureurs, d'après Michel Benezra, avocat du droit automobile. "Les contrats d’assurance ont été rédigés avant les années 2000 quand les véhicules se volaient en touchant deux fils. Ce qui pose problème aujourd’hui c’est que les contrats n’ont pas été réadaptés puisqu’il y a un intérêt financier derrière. Chaque assurance va se réfugier derrière ce terme de "vol sans effraction" pour refuser l’indemnisation. Donc à charge pour le particulier, de démontrer que son véhicule a été volé en mouse jacking ", explique t-il.
Alors un conseil : ne laissez ni vos clefs, ni les doubles de vos clefs, ni la carte grise dans la boîte à gants de votre véhicule. C'est ce que votre assurance vous demandera en premier pour constater le vol par mouse jacking. Et pour éviter les vols, la bonne vieille canne qui bloque le volant reste encore la méthode la plus efficace.
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