"Gilets jaunes" : "J'ai perdu un œil mais j'aurai essayé de faire changer les choses"
Après avoir manifesté début décembre, Patrice a perdu son œil droit. Cet ancien routier est désormais sans emploi mais ne regrette pas sa mobilisation.
Après plus de cinq mois de mobilisation, la vie de certains "gilets jaunes" a changé depuis le 17 novembre. Certains ont été condamnés, d'autres blessés lors des manifestations. C'est le cas de Patrice, un homme de 50 ans qui vit à Pau. Il a perdu son œil le 8 décembre lors d'un rassemblement sur les Champs-Élysées. "Je m'apprêtais à quitter la manifestation parce que la violence montait des deux côtés, dit-il. Je m'approche un peu bêtement des forces de l'ordre pour leur faire part que je veux quitter la manif". Quelques secondes après, il dit recevoir un tir de LBD dans l'œil droit.
La perte de son œil le conduit au chômage
Patrice assure qu'il n'y a eu aucune provocation de sa part. "Je ne suis pas venu en me disant, 'je vais me bagarrer en permanence'. Que les choses soient bien claires, mon père était un gendarme mobile" poursuit-il. Depuis, il affirme avoir porté plainte. Il dit avoir été auditionné par l'inspection générale de la gendarmerie nationale. Sa vie d'avant, il doit l'oublier, son cache-œil se charge de lui rappeler la réalité.
Alors qu'il avait une proposition d'embauche, ce chauffeur routier intérimaire a du faire une croix sur son métier. "La loi m'interdit en tant que borgne la conduite de véhicules lourds". Patrice était routier depuis 25 ans, "c'était un véritable métier de passion".
Tout de suite, on m'a dit qu'il y aurait plus rien à faire pour mon œil. Il est détruit à l'intérieur jusqu'au nerf optique. Je suis complètement borgne du côté droit.
Patriceà franceinfo
Juste après sa blessure, Patrice raconte subir depuis "des acouphènes lumineux". Il s'agit de "flash pendant dix jours à vous rendre dingue. J'ai perdu plus qu'un œil. Ma vie est décousue. Je ne dors plus la nuit, je somnole au petit matin, je suis comme un zombie. J'ai l'impression de ne plus avoir ma place dans cette société", déplore le quinquagénaire.
"J'en reviens dépouillé de ma vie"
Patrice a enfilé son "gilet jaune" par solidarité dit-il avec la jeunesse qui arrive. "Je gagnais bien ma vie", poursuit l'ancien routier. Malgré sa mutilation, l'homme ne regrette pas son engagement. "Même borgne, j'ai besoin de pouvoir me regarder dans la glace le matin. Tant pis, j'ai perdu un œil, mais au moins j'aurai essayé de faire changer les choses", conclut-il.
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