"Gilets jaunes" : "Il n'y a pas grand-chose de commun" entre tous les mouvements qui apparaissent en Europe
Une manifestation de "yellow vests" doit avoir lieu samedi 12 janvier à Londres. D'autres mouvements porteurs de revendications sociales comparables sont apparus ces dernières semaines en Europe, mais ils ont peu en commun selon Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes et internationales.
Les revendications sur le pouvoir d'achat sont présentes dans tous ces mouvements. Mais "dans les autres pays de l'Union européenne, lorsqu'on obtient satisfaction sur le plan salarial, il n'y a pas d'autre point en commun avec les gilets jaunes", estime Patrick Martin-Genier.
franceinfo : Ce symbole des "gilets jaunes" a-t-il essaimé ailleurs en Europe ou s'agit-il d'opportunisme ?
Patrick Martin-Genier : Il n'y a pas grand-chose de commun entre tous les" gilets jaunes", en tout cas entre les "gilets jaunes" français et les autres. Il y a une première phase de revendication salariale, et s'il y a un point commun, c'est celui-ci. On s'aperçoit en effet qu'à Londres c'est un mouvement anti austérité, on a une situation économique qui est assez mauvaise, notamment chez les salariés, et vous savez qu'on est aussi en plein dans le Brexit, avec une situation extrêmement défavorable par exemple dans le service national de santé. Donc on peut dire qu'aujourd'hui, il y a cette espèce de revendication salariale, et le symbole c'est bien le "gilet jaune", mais ça ne va pas au-delà, car les personnes qui vont défiler aujourd'hui [à Londres] ne réclament pas le départ du gouvernement. On est aussi à la veille d'un vote très important sur le Brexit (mardi) au parlement, et beaucoup accusent Theresa May d'avoir trahi le vote des électeurs, et beaucoup parmi les "gilets jaunes" en Grande-Bretagne aujourd'hui veulent que ce pays parte de l'Union européenne.
En Allemagne, on a vu aussi fleurir des "gilets jaunes", et cela apparaît là-bas plutôt piloté par l'extrême droite...
Bien sûr, c'est un point extrêmement commun entre tous ces "gilets jaunes" malheureusement. En Allemagne, les "gilets jaunes", ce sont des gens qui manifestent contre Angela Merkel et ils évoluent essentiellement dans le cadre de l'extrême droite. C'est la conjonction des extrêmes, aujourd'hui à Londres, on va voir des gens d'extrême gauche, mais aussi des partis nationalistes d'extrême droite qui veulent absolument que ce pays sorte de l'Union européenne.
En Allemagne, c'est extrêmement lié à l'Afd, qui est le parti d'extrême droite qui a plus de 90 députés à l'Assemblée et qui revendique ce mouvement des "gilets jaunes". Donc on va endosser le "gilet jaune", mais ça n'a pas la même signification.
Il n'y a pas de contagion des "gilets jaunes" en Europe, car les revendications ne sont pas les mêmes
Patrick Martin-Genierà franceinfo
En France, dans un second temps, le mouvement des "gilets jaunes" est un mouvement extrêmement politique. La revendication est purement politique, c'est de dire 'il faut que le gouvernement d'Emmanuel Macron s'en aille'. On le voit également en Belgique, ce sont des personnes qui sont dans la mouvance de l'extrême droite et qui ont marché il y a quelques semaines contre les institutions européennes et on voit bien ici qu'il y a une démarche politique dans le cadre des élections européennes. Il y a des "gilets jaunes" aussi en Bulgarie, mais là ils veulent lutter contre la corruption du gouvernement. En Allemagne, il y a eu aussi cette semaine par exemple une mobilisation des agents de sécurité dans les aéroports. Plus de 23 000 agents ont revêtu un gilet jaune, mais la revendication était essentiellement salariale. Il s'agissait d'obtenir un salaire horaire de 20 euros, il n'y avait aucune revendication politique.
En Belgique, au plus fort de la mobilisation, ils n'étaient que 500 à défiler dans les rues de Bruxelles, ce n'était pas vraiment un succès ?
C'est une inspiration, et encore elle est largement politique. Dans les autres pays de l'Union européenne, lorsqu'on obtient satisfaction sur le plan salarial, il n'y a pas d'autre point en commun avec les "gilets jaunes". On aura quelques milliers de manifestants à Londres, on a eu quelques centaines à Bruxelles, et par conséquent on ne peut pas dire que ce soit un succès. Il faut éviter de parler de contagion des "gilets jaunes" en Europe, car les revendications ne sont pas les mêmes. Ce n'est pas la même mobilisation, tandis qu'en France il y a une très grande mobilisation, mais aujourd'hui le slogan est essentiellement politique.
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