Réforme des retraites : on vous explique pourquoi d'anciens apprentis déchantent face à la promesse du gouvernement d'un départ à 60 ans

Le diable s'est-il caché dans les détails de la réforme des retraites ? Lors de la présentation de son projet, le 10 janvier dernier, le gouvernement a vanté un texte "de justice" et "de progrès", qui rendrait "toujours possible de partir dès 60 ans grâce à un renforcement du dispositif carrières longues". L'exécutif a notamment cité l'exemple d'un mécanicien ou d'un boulanger ayant débuté sa carrière en apprentissage, à l'âge de 16 ans. Celui-ci pourra raccrocher le tablier avant l'âge de départ légal envisagé de 64 ans, à condition d'avoir cotisé pendant 44 ans (contre 43 actuellement), a assuré le ministre du Travail, Olivier Dussopt.

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L'exemple d'autres apprentis fictifs a été mis en avant, pour évoquer la possibilité de partir avant même le cap des 60 ans. Olivier Dussopt a cette fois évoqué "les assurés qui ont débuté leur carrière avant 16 ans" et qui "continueront, eux, de partir dès 58 ans dans des conditions facilitées par rapport à aujourd'hui." Encore une fois, cette disposition devrait permettre aux intéressés de prendre leur retraite après 44 ans de bons et loyaux services.

Dans son dossier de presse sur la réforme (en PDF, page 40), le gouvernement évoque également le cas de Delphine, née en 1975, qui a commencé son apprentissage à 15 ans et 9 mois. "Elle a donc cotisé cinq trimestres avant la fin de ses 16 ans et peut bénéficier du dispositif de départ anticipé pour carrière longue. (...) Après la réforme, elle pourra partir à 59 ans et 9 mois", assure le document. Mais sans donner plus de précisions.   

Dépenser plus pour partir plus tôt

Une telle présentation des faits est "fausse", s'insurge un ancien apprenti de 48 ans, lundi 30 janvier, dans les colonnes du Parisien. Christophe a réalisé une simulation de sa situation. Et il a découvert qu'en cas d'adoption de la réforme, il lui faudra racheter ses quatre trimestres d'apprentissage pour qu'ils soient pris en compte dans le calcul de sa future retraite. Total annoncé : près de 5 900 euros. "Ils se sont bien gardés de le dire clairement depuis l'annonce de la réforme", peste-t-il. Une autre personne concernée s'indigne sur Twitter : "Je vais devoir racheter mes trimestres d'apprentissage. Comment osez-vous parler de justice sociale ?"

Le gouvernement s'est-il montré trop imprécis ? Lors de la présentation du projet, l'exécutif ne s'est pas attardé sur son choix de maintenir le système actuel de prise en compte des trimestres d'apprentissage. Ce cadre prévoit que seules les périodes travaillées depuis 2014 sont validées pour le décompte de la retraite. Les apprentissages effectués avant cette date ne sont pas automatiquement convertis. Il faut donc racheter les trimestres auprès de la Sécurité sociale pour pouvoir partir plus tôt à la retraite, comme le confirme le site Info Retraite.

Un "tarif préférentiel" pour les anciens apprentis

"Elle est là, la véritable injustice", estime Christophe, qui se dit "floué" par la présentation de la réforme par le gouvernement. Sollicité par Le Parisien, Matignon reconnaît qu'il est "possible de racheter des trimestres à des tarifs préférentiels", avec un abattement par rapport à un rachat classique. Ces tarifs s'appliquent à ceux qui ont "été apprentis entre le 1er juillet 1972 et le 31 décembre 2013", précise Info Retraite. Mais en l'état, la réforme ne prévoit pas de prise en compte systématique des trimestres des alternants en contrat avant 2014. 

Pour autant, la Première ministre, Elisabeth Borne, défend sa ligne et son ambition de "protéger ceux qui ont commencé à travailler tôt". "J'entends beaucoup de fausses informations, a-t-elle affirmé, samedi 28 janvier. J'entends dire que les apprentis avant 2014 ne peuvent pas bénéficier des trimestres qu'ils ont acquis dans le cadre de leur apprentissage. (...) C'est exactement le contraire." A condition de mettre la main à la poche.