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Réforme des retraites : en quoi consiste (vraiment) le geste d'Elisabeth Borne sur les "carrières longues" ?

Article rédigé par Mathilde Goupil
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La Première ministre, Elisabeth Borne, quitte l'Elysée, le 15 février 2023. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)
La Première ministre a fait, mardi, un nouveau pas vers Les Républicains, dont elle courtise les voix pour l'adoption de la réforme des retraites à l'Assemblée. Mais attention, toutes les personnes ayant commencé à travailler avant 21 ans ne devraient pas être concernées.

C'est une nouvelle concession qui pourrait être décisive pour emporter l'adhésion des Républicains. La Première ministre Elisabeth Borne a fait, mardi 14 février, un nouveau pas vers les élus LR, dont elle courtise le vote pour faire adopter son projet de réforme des retraites à l'Assemblée.

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Dans l'Hémicycle, la députée Véronique Louwagie a réclamé, au nom du parti de droite, qu' "aucune personne engagée dans les 'carrières longues' ne travaille  plus longtemps que 43 ans". Les Républicains ont en effet fait du départ de ceux ayant commencé à cotiser très tôt l'une des clés de leur négociation avec la majorité En lui répondant, la cheffe du gouvernement lui a donné satisfaction... mais en partie seulement. Franceinfo vous explique pourquoi.

Ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans intègrent le dispositif

Elisabeth Borne a d'abord confirmé une annonce déjà faite au Journal du dimanche début février . Ceux ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans seront, après la réforme, intégrés au dispositif "carrière longue", qui permet de partir en retraite à un âge anticipé. Ces personnes pourront partir un an avant l'âge légal, c'est-à-dire à 63 ans au lieu de 64 ans. A deux conditions : avoir cotisé la durée légale, c'est-à-dire 43 ans... dont quatre ou cinq trimestres avant 21 ans, selon leur mois de naissance.

"C'est une mesure qui concernera jusqu'à 30 000 personnes par an."

Elisabeth Borne, Première ministre

dans "Le Journal du dimanche"

Un amendement du gouvernement a d'ailleurs été déposé en ce sens mardi soir. Il crée une quatrième catégorie de "carrières longues" pour les assurés ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans, avec un départ possible à partir de 63 ans. Elle s'ajoute aux trois catégories prévues par la réforme. A savoir, les personnes ayant commencé à travailler avant 16 ans (départ possible à partir de 58 ans), avant 18 ans (départ possible à partir de 60 ans), et avant 20 ans (départ possible à partir de 62 ans).

Certains travailleurs "carrières longues" ne devront cotiser que 43 ans...

La Première ministre a par ailleurs fait une annonce surprise. "Dès lors qu'est atteint l'âge de départ anticipé, la réforme ne prévoit pas, pour les carrières longues, de durée de cotisation supérieure à 43 ans", a affirmé Elisabeth Borne. En clair : en cas de carrière longue, seul l'âge de départ anticipé et 43 années de cotisation sont nécessaires pour prendre sa retraite.

Dans le projet initial, le gouvernement avait conservé à 60 ans l'âge du départ anticipé pour ceux ayant commencé à travailler à 16 ou 17 ans. Mais il leur demandait pour cela de cotiser une année de plus que la normale (44 annuités). Ce qui aurait entraîné, pour  les personnes ayant commencé à travailler à 17 ans, un départ à 61 ans et non à 60 ans. Grâce à l'annonce d'Elisabeth Borne, qui devra être matérialisée par décret, cette génération conserve donc des conditions de départ à la retraite similaires à avant la réforme.

Les conditions de départ du dispositif "carrières longues", dans le système actuel, dans le projet initial du gouvernement et dans le projet amendé par Elisabeth Borne le 14 février 2023. (JEREMIE LUCIANI / FRANCEINFO)

Ceux qui ont commencé à travailler à 17 ans ne seront pas les seuls bénéficiaires de ce geste. C'est aussi le cas de ceux qui ont commencé à travailler à 15 ans. Dans le système actuel, ils peuvent en théorie partir en retraite à partir de 58 ans, mais doivent avoir cotisé 45 ans. Dans les faits, ils ne peuvent donc partir qu'à partir de 59 ans. Grâce à l'amendement proposé par Elisabeth Borne, ils pourront partir après 43 années de cotisation, soit à 58 ans. 

Ceux qui ont travaillé de manière discontinue pourront également bénéficier du geste proposé par la Première ministre. "Un jeune qui a commencé à travailler à 16 ans, avec une année où il n'aurait pas travaillé, (...) eh bien arrivé à 60 ans, c'est-à-dire à son âge légal, il aurait 43 années de cotisation et il pourrait partir à la retraite", a par exemple détaillé Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, à la sortie du Conseil des ministres.

... mais d'autres devront quand même cotiser 44 ans

Pour autant, tous les travailleurs concernés par une "carrière longue" ne pourront pas partir après 43 années de cotisation. Comme l'a rappelé le ministre du Travail Olivier Dussopt, sur France Inter, "on a un système de retraite qui a toujours fonctionné avec un âge de départ et une durée de cotisation". Ces deux conditions s'additionnent.

Ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans sans interruption restent pénalisés par la réforme, malgré l'annonce de la Première ministre. Aujourd'hui, ils peuvent prétendre à un départ à la retraite à 61 ans, après 43 années de cotisation. Après la réforme, ils pourront toujours bénéficier d'un départ anticipé, mais seulement à partir de 62 ans. Soit une durée de cotisation de 44 ans.

Ceux ayant commencé à travailler à 14 ans ou à 16 ans devront eux aussi cotiser durant 44 années. Une situation équivalente, voire plus favorable pour certains, au système actuel, dans lequel cette durée peut aller jusqu'à 45 ans.

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