Cheminots, avocats, enseignants... Quelles sont les professions qui craignent d'être perdantes avec la réforme des retraites ?
Alors que s'ouvre une longue période de concertation, des mobilisations sont déjà annoncées en septembre, notamment chez les agents de la RATP et au sein d'un collectif de professions libérales, des avocats aux kinésithérapeutes.
Vais-je y perdre ou y gagner ? C'est la question que se posent sans doute nombre de Français à chaque annonce d'un projet de réforme des retraites, et celui sur lequel travaille le gouvernement n'y échappe pas. Lundi 5 septembre, Edouard Philippe a commencé à recevoir les partenaires sociaux en ouverture d'une période de consultations qui pourrait durer un an.
Des orientations ont déjà été dévoilées mi-juillet sous la forme d'un rapport remis par Jean-Paul Delevoye, entré depuis au gouvernement. Et si Emmanuel Macron a depuis mis en doute une de ses principales préconisations, le texte devrait tout de même préfigurer la future loi. Déjà décortiqué par tous les acteurs du dossier, il inquiète particulièrement les représentants de certaines professions qui pourraient sortir perdantes – plusieurs journées de mobilisation sont déjà prévues, les 13, 16, 21 et 24 septembre. Franceinfo vous résume qui sont les mécontents.
Les professions avec des régimes spéciaux
C'est la grande idée de cette réforme, inchangée depuis le départ : mettre en place un nouveau système de retraite "universel". Et donc mettre fin aux fameux régimes spéciaux qui permettent aujourd'hui, dans certaines professions, des âges de départ et des modes de calcul des pensions différents par rapport au régime général. C'est le cas par exemple pour les employés de la SNCF ou ceux de la RATP. Ces derniers seront d'ailleurs les premiers dans la rue, le 13 septembre, et promettent une "journée noire" dans les transports franciliens.
Pour eux, la fin des régimes spéciaux signerait notamment la fin des départs anticipés à la retraite, même si l'exécutif et Jean-Paul Delevoye promettent des compensations, et notamment de remettre à plat la prise en compte de la pénibilité. Et leurs pensions seraient désormais calculées à partir des salaires de toute leur carrière, plus seulement des 6 derniers mois, une équation dont ils craignent qu'elle leur soit défavorable. "Nous avons tout à perdre !", résume ainsi la CGT RATP.
Certaines professions libérales
En première ligne de la contestation naissante, le collectif SOS Retraites regroupe des organisations représentatives d'un étonnant attelage de professions : des avocats, des médecins et infirmiers libéraux, des pilotes de ligne, des kinés... Autant de professions dont les retraites sont régies par des régimes autonomes, le troisième type de régimes de retraite existant en France. "Ce ne sont pas des régimes spéciaux, nous ne bénéficions pas de conditions dérogatoires sur les durées de cotisation par exemple, mais ils sont gérés par des caisses autonomes", explique l'avocat Matthieu Dulucq, élu au Conseil national des barreaux (CNB), l'organisation à l'initiative du collectif.
La réforme prévoit également la disparition de ces régimes autonomes, et ces professions libérales craignent une explosion du montant de leurs cotisations. Pour les avocats gagnant moins de 40 000 euros par an, celui-ci passerait de 14 à 28%, selon les calculs du CNB. "C'est un doublement qui concernerait un avocat sur deux", s'étrangle Matthieu Dulucq, le tout pour des pensions en baisse. De plus, les réserves constituées par ces différentes caisses de retraites autonomes seraient versées au "pot commun" du nouveau régime universel, ce que l'avocat dénonce comme "une spoliation".
Pour le représentant du CNB, la situation n'est pas comparable à celle des régimes spéciaux, et il met en avant la contribution des avocats "à la solidarité" à travers le versement d'une compensation démographique – liée au ratio entre le nombre d'actifs et de retraités, assez favorable à sa profession – qui représente 1 400 euros annuels par avocat. "Je crois qu'on fait les frais du simplisme", estime Matthieu Dulucq. Le collectif SOS Retraites appelle à une manifestation le 16 septembre.
Certains fonctionnaires comme les enseignants
Le projet de réforme implique aussi une évolution dans le calcul de la pension de retraite des fonctionnaires, qui se base aujourd'hui uniquement sur leurs six derniers mois de salaires. Si les revenus de toute une carrière étaient désormais pris en compte, l'évolution salariale dans la fonction publique deviendrait un handicap : "Dans la fonction publique, c'est en fin de carrière que les salaires sont les plus importants, et leur augmentation est tardive", explique Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, première fédération syndicale chez les enseignants.
Pour compenser, l'exécutif met en avant une mesure "d'égalité" : les primes des fonctionnaires seront désormais prises en compte dans le calcul de leurs pensions. "C'est très bien, mais nous sommes un secteur où il n'y a quasiment pas de primes", répond Bernadette Groison. Elles représentent en moyenne 10% de la rémunération des enseignants, et même 4% dans le premier degré. Un chiffre très éloigné des 22% de moyenne chez les fonctionnaires, détaille la FSU. Le syndicat, qui sera reçu vendredi par Edouard Philippe, espère donc que la réforme évoluera.
Cité par L'Express, le secrétaire national de la CFDT chargé des retraites Frédéric Sève mentionne un autre cas épineux, celui des aides-soignants : "Là, le sujet, c'est la question de la disparition de la catégorie dite 'active', qui permettait aux personnels soignants de partir à la retraite dès 57 ans."
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