Covid-19 : "anxiogène", "trop important"... Les Français jugent sévèrement le traitement de l'épidémie dans les médias
En vue des prochaines Assises internationales du journalisme, l'institut Viavoice a réalisé un sondage pour connaître l'avis des Français sur le traitement médiatique de la pandémie de coronavirus. Les critiques sont nombreuses.
Une enquête aux enseignements paradoxaux. L'institut Viavoice a sondé les Français sur ce qu'ils attendent des médias en cette période de pandémie, et sur ce qu'ils pensent de l'information concernant le Covid-19. Si les résultats montrent d'importants reproches, les Français sont néanmoins en demande d'une information "constructive". Voici ce qu'il faut retenir de ce sondage intitulé "Informer aux temps du Covid"*.
Trop de place a été accordée à l'épidémie
Parmi les leçons marquantes de cette étude : la sévérité du regard porté par les Français sur le traitement médiatique de la pandémie. "Pour l'opinion, les médias se sont montrés dans l'incapacité de favoriser deux attentes majeures : d'une part, fournir une information utile, qui protège, et d'autre part, donner une information qui apaise dans un climat incertain, analyse Stewart Chau, consultant en stratégie d'opinion chez Viavoice. Cela se traduit, dans la forme, par une première critique sur l'ampleur, excessive à leurs yeux, du traitement de l'épidémie."
Quelque 60% des Français considèrent en effet que la place accordée à l'épidémie dans les journaux, radios, télévisions et sites d'informations est "trop importante". Dans le détail, 66% des 35-49 ans, 61% des 50-64 ans et 65% des 65 ans et plus sont de cet avis. La proportion est moindre chez les plus jeunes : seuls 40% des 18-24 ans, et 56% des 25-34 ans partagent cette opinion.
Un rapprochement avec le public jugé "nécessaire"
Depuis le début de l'épidémie, les médias ont cherché à se rapprocher du public en lui donnant la parole (par exemple avec le dispositif #OnVousRépond sur France Télévisions). Cette démarche a été jugée "nécessaire" par 37% des sondés et "intéressante" par 19% d'entre eux. En revanche, près d'un quart des Français (24%) l'ont qualifiée de "démagogique", et cette proportion monte à plus d'un tiers (35%) chez les plus de 65 ans. A l'inverse, 11% ont estimé ce rapprochement "insuffisant" (chiffre qui grimpe à 20% chez les 25-34 ans).
Le travail de fact-checking approuvé
Le travail de vérification des faits (fact-checking) de la part des journalistes est majoritairement approuvé par les sondés. Selon l'enquête, 33% des Français le jugent "nécessaire", 16% "utile" et 29% "pas assez important" (39% des 65 ans et plus sont de cet avis). Seuls 8% l'estiment "inutile" et 7% "trop important". Enfin, 7% des Français ne se prononcent pas.
L'information sur la crise sanitaire jugée "anxiogène"
"Non seulement l'information sur l'épidémie est vue comme 'tensiogène', mais les personnes interrogées la trouvent contre-productive, et considèrent qu'elle ne répond pas à leurs attentes", pointe Steward Chau. En effet, 50% des Français estiment que l'information sur la crise sanitaire est "anxiogène", 45% d'entre eux la jugent "excessive", 28% "catastrophiste" et 19% "mensongère". Face à cette avalanche de critiques, il reste néanmoins 24% des sondés pour la trouver "utile" pour leur "vie quotidienne", 12% pour l'estimer "pédagogique", 10% pour la qualifier de "concrète" et 9% pour la juger "constructive".
Les médias accusés d'alimenter la peur de la pandémie
L’incapacité des médias et des journalistes à rassurer catalyse les critiques. Alors que la crainte de la pandémie est omniprésente depuis le début, 43% des Français estiment que le travail des journalistes "a alimenté cette peur", 32% considèrent que les médias ont "utilisé cette peur pour faire de l'audience" (44% des 65 ans et plus partagent cette opinion), et 13% seulement pensent que l'information a aidé à "maîtriser et combattre" cette peur.
La moitié des Français veulent des informations "constructives" sur l'épidémie
Questionnés sur leurs attentes pour être mieux informés sur la pandémie, plus de la moitié (51%) des Français veulent "des informations constructives, qui proposent des solutions pour se protéger de la maladie". Par ailleurs, 47% souhaitent des réponses de "chercheurs spécialistes des questions sanitaires", 45% des éléments de vérification des informations qui circulent, 28% des débats contradictoires entre experts sur les sujets de désaccord, et 15% seulement des "reportages de terrain".
(*) Étude réalisée par Viavoice pour les Assises internationales du journalisme de Tours (1er et 2 octobre), en partenariat avec France Télévisions, France Médias Monde, Le Journal du dimanche et Radio France. Interviews réalisées en ligne, du 4 au 8 septembre 2020 auprès d’un échantillon de 1 000 personnes représentatif de la population française de 18 ans et plus.
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