La crise économique aura-t-elle raison du commerce équitable ?
Depuis le début des années 2000, le commerce équitable a le vent en poupe, notamment avec l’arrivée de ses produits labellisés dans les linéaires de la grande distribution, longtemps évitée par les Max Havelaar, Artisans du monde, Minga et consorts (lire notre encadré ci-dessous). En France, les ventes de produits Max Havelaar (88% du marché) ont grimpé de 22% à 256 millions d’euros en 2008, contre moins de 10 millions en 2000. Aujourd’hui, 80% des Français connaissent la démarche équitable, contre 10% il y a neuf ans.
Mais 2009 s’annonce plus morose. Chez le label leader de ce marché, l’on s’attend à un ralentissement de la croissance cette année, ce qui serait une première depuis dix ans. "Avec la crise, les gens font particulièrement attention à leur bourse or, les produits équitables sont plus chers que les autres produits", reconnaît Laurent Levard, directeur d’Artisans du monde. Les prix des produits équitables peuvent en effet dépasser de 25% ceux des circuits traditionnels.
Aussi, la neuvième édition de la Quinzaine vient justement rappeler les bases de cette démarche : mieux rémunérer les producteurs grâce à un prix minimum garanti, qui se répercute sur les produits devenant plus chers par rapport à la moyenne du marché. Des expositions, conférences, témoignages d’agriculteurs et dégustations de produits sont organisés pendant deux semaines dans les grandes villes de France, dont Paris.
Le commerce équitable a vu le jour au lendemain de la deuxième guerre mondiale, grâce à des mouvements religieux. En France, c’est l’Abbé Pierre qui a lancé le mouvement dans les années 70.
Moraliser le marché, rassurer le consommateur
Longtemps réservés à des circuits de distribution "parallèles" (marchés, boutiques spécialisées), les produits équitables ont fait leur apparition au supermarché dans les années 80. Depuis quelques années, les grandes enseignes vendent même du café, du chocolat ou du jus de fruit équitables sous des marques de distributeurs. Une démarche que fustige Laurent Levard, pour qui "la grande distribution utilise le commerce équitable pour dire qu’elle a un comportement citoyen", alors qu’elle "continue à avoir des comportements inéquitables sur 99% de son chiffre d’affaires" - hyper et supermarchés ont totalisé 63% des ventes de produits équitables en 2007, ndlr.
Un groupe de travail va se réunir rapidement, sous l’égide du secrétariat d’Etat chargé du Commerce, afin d’établir des critères clairs de reconnaissance des organismes labellisant les produits du commerce équitable. Histoire de moraliser ce marché émergeant, mais aussi de rassurer le consommateur et de l’inciter à poursuivre dans sa démarche de générosité à l’égard des paysans et artisans du sud. Pour que la démarche philanthropique ne soit pas sacrifiée sur l'autel de la crise.
Gilles Halais, avec agences
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