Prêt in fine, prêt hypothécaire : on vous explique ces types de crédits sur lesquels le gouvernement compte pour relancer le marché

Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, veut développer de "nouveaux dispositifs de financement" pour "redonner du pouvoir d'achat immobilier". Des pistes accueillies timidement par le secteur bancaire.
Article rédigé par Alice Galopin - avec AFP
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Une pancarte d'agence immobilière sur la façade d'un immeuble à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), le 30 janvier 2024. (LAURE BOYER / HANS LUCAS / AFP)

Alors que l'octroi de nouveaux crédits immobiliers a atteint son plus bas niveau depuis 2015, le gouvernement entend "redonner du pouvoir d'achat immobilier aux Français". Pour débloquer l'accès au crédit et relancer ce marché, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, mise sur de "nouveaux dispositifs de financement", comme "les prêts in fine ou hypothécaires", a-t-il déclaré lundi 12 février dans une interview au Parisien.

En réalité, ces deux types d'emprunts existent déjà. Le crédit in fine permet à l'emprunteur de ne payer chaque mois que les intérêts et l'assurance. Le capital emprunté est remboursé en une seule fois, à l'échéance du prêt. Mais ce type d'emprunt n'est pas accordé à "monsieur et madame tout le monde", rappelle Maël Bernier, porte-parole du courtier en ligne Meilleurtaux, interrogée par RMC. Il s'adresse en général aux investisseurs locatifs ou aux ménages avec un patrimoine financier important.

"L'emprunteur doit prouver qu'il est très solide financièrement"

Ce crédit comporte un risque si l'emprunteur compte sur la revente du bien pour rembourser le prêt, car le prix de celui-ci peut avoir baissé entre-temps. Les établissements bancaires sont donc très regardants sur la capacité à pouvoir solder le crédit à son échéance. "Pour prétendre au crédit in fine, l'emprunteur doit prouver qu'il est très solide financièrement, insiste Maël Bernier. La banque vérifie que ce dernier dispose de fonds placés, et peut même veiller à ce que ce qu'il effectue des versements mensuels sur un contrat d'assurance-vie, par exemple". La constitution de cette épargne représente une garantie de remboursement à l'issue du prêt.

De plus, "un crédit in fine est, par construction, plus coûteux en intérêts qu'un crédit amortissable", souligne la Fédération bancaire française auprès de l'AFP. Dans le cadre d'un prêt immobilier amortissable, plus classique, l'emprunteur paye chaque mois des intérêts et rembourse une partie du capital. Puisque les intérêts sont calculés sur le capital restant dû, ils diminuent au fil du remboursement. A l'inverse, étant donné que le capital n'est remboursé qu'à la fin d'un prêt in fine, les intérêts sont constants pendant toute la durée du crédit.

Le prêt hypothécaire, lui, consiste "à mettre en hypothèque un ou plusieurs biens existants pour garantir le nouveau crédit", explique à Capital Cécile Roquelaure, directrice des études du courtier Empruntis. En cas de non-remboursement du prêt, la banque peut alors saisir le bien et le vendre aux enchères pour se rembourser. En France, ce dispositif est habituellement "réservé aux ménages déjà propriétaires", souligne la courtière.

La Suisse, un exemple à manier avec prudence

Bien que Christophe Béchu évoque les prêts in fine et hypothécaires, il imagine en réalité, dans sa réponse au Parisien, un dispositif qui s'apparente à une forme hybride de ces deux options. "Vous voulez acheter un bien, vous souscrivez un crédit sur 20 ou 25 ans, non pas sur 100% du prix, mais sur 80%, que vous remboursez classiquement au fil du temps", exposait le ministre lundi.

"Les 20% restants demeurent sous forme d'hypothèque sur lesquels vous ne remboursez que les intérêts et non le capital. Celui-ci ne sera remboursé qu'à la revente."

Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique

dans une interview au "Parisien"

Ce mécanisme "permet d'être propriétaire du bien et de son foncier, mais diffère le remboursement d'une partie du capital, ce qui permet d'obtenir des mensualités plus faibles ou d'emprunter plus pour plus grand", vante-t-il.

"L'idée, c'est d'aller plus loin que le prêt in fine qui existe et de pouvoir travailler avec les banques et le Haut Conseil de stabilité financière pour voir si le prêt in fine peut être utilisé différemment", explique le cabinet du ministère de la Transition écologique aux Echos. Le ministre fait, de son côté, valoir l'exemple suisse, où ce type de crédit associé à une clause hypothécaire "fonctionne très bien", assure-t-il. 

La Fédération bancaire française estime de son côté que le contexte économique, fiscal et juridique suisse est différent, et qu'il convient de rester prudent sur cette comparaison. "En France, les prêts in fine peuvent parfois être opportuns dans certaines opérations patrimoniales ou d'investissement locatif, et très rarement en accession à la propriété", complète-t-elle. Dans une publication sur les réseaux sociaux, le gouverneur de la Banque de France appelle pour sa part "à une certaine prudence sur les prêts remboursables in fine". François Villeroy de Galhau table plutôt "sur la stabilisation, voire la baisse des prix" immobiliers pour relancer le marché immobilier, même si celle-ci reste pour l'instant timide. Les professionnels du secteur bancaire ont rendez-vous avec Christophe Béchu, d'ici à la fin février, pour approfondir ces pistes.

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