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Le spectre de Lehman Brothers hante toujours les banques

DECRYPTAGE | Il y a cinq ans se produisait la plus retentissante faillite bancaire de l'Histoire. Lehmann Brothers, géant américain centenaire, s'effondrait, entraînant dans son sillage les secteurs financiers américains et européens. Depuis, les Etats confrontés à une crise budgétaire et économique ont tenté de corriger les errements révélés par la chute de Lehman Brothers. Mais les mesures réglementaires, encore en gestation pour la plupart, sont instables, et le système bancaire n'est pas encore vraiment sécurisé.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Toru Hanai Reuters)

Rarement l'expression "le roi est nu" n'a été aussi vraie que ce 15 septembre 2008, quand Lehman Brothers s'est effondré. La Reserve fédérale américaine avait refusé de sauver le géant centenaire de la finance. Et le paysage qui est apparu derrière ce rideau déchiré avait de quoi effrayer. Subprimes, actifs toxiques, dérégulation bancaire, bad bank , sont devenus des mots clés de l'actualité.

Après cinq ans d'une crise financière, budgétaire et économique d'une ampleur sans précédent, une timide embellie pointe son nez. Les gouvernements et les institutions internationales ont appris à se satisfaire de peu et une perspective de croissance molle est saluée avec de grands sourires. En espérant qu'aucun nouveau cyclone financier ne viendra arracher cette fragile pousse.

Le contribuable a payé

Car il semble difficile d'en être sûr, malgré le renforcement de la régulation bancaire des deux côtés de l'Atlantique. Réinjecter des règles dans un système financier auquel l'administration Clinton avait lâché la bride est devenu la priorité. Personne n'a été aussi loin que les Britanniques, qui ont été jusqu'à nationaliser des établissements bancaires agonisants. Mais globalement, la réponse a été la même partout : le contribuable a payé pour les banques. La contrepartie ? Séparer les activités bancaires : d'un côté les banques de dépôt, pour les particuliers et le crédit aux entreprises. De l'autre les banques d'affaires et leurs produits rentables mais risqués. Comme l'avait fait Franklin D. Roosevelt en 1933, pour sortir de la Grande dépression.

C'était du moins la promesse. François Hollande l'avait d'ailleurs écrit dans son catalogue de 60 propositions. Mais les législateurs n'ont pas été aussi loin, isolant seulement certaines activités hautement spéculatives, comme en France, ou traçant un cordon sanitaire autour des banques de détail, comme au Royaume-Uni. La Volcker rule adoptée aux Etats-Unis sous la pression du scandale Goldman Sachs ne va pas plus loin. Encore la plupart de ces dispositions ne prendront-elles vraiment effet qu'en 2015, voire... 2019.

Banques sous surveillance

L'autre levier sur lequel ont agi les Etats et les institutions internationales est le contrôle et la supervision. C'est le sens du Mécanisme européen de surveillance des banques, adopté la semaine dernière par les eurodéputés. La Banque centrale européenne sera chargée de la surveillance de 150 grandes banques européennes qui devront appliquer des normes pour éviter que la défaillance de l'une d'elles n'entraîne tout le système, comme Lehman Brothers. Mais pour l'instant, ce contrôleur n'a pas de bras. Il lui manque encore un véritable outil pour agir sur un établissement en crise, en le renflouant ou en le liquidant. Un texte en ce sens pourrait être discuté d'ici le printemps 2014.

Et en attendant, les banques européennes inspirent plus d'inquiétude que de confiance. Le secteur manque de transparence et le recours aux paradis fiscaux continue à brouiller les pistes.

Difficile aussi d'évaluer leur réelle solidité, tant les "stress tests", censés évaluer leur résistance à une crise, sont sujets à caution. Les déboires de la plus ancienne banque du monde, l'italienne Monte Paschi dei Siena, laissent en effet penser que nombre de bilans réels restent dans l'ombre. Difficile dans ces conditions d'inspirer la confiance, malgré le renforcement des règles.

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