Les chiffres du chômage de janvier sont-ils fiables ?
Selon Pôle emploi, le nombre de chômeurs de catégorie A a baissé de 0,8% en janvier. Mais ce chiffre est difficilement interprétable en raison de très nombreuses non-actualisation.
La ministre du Travail, Myriam El Khomri, est apparue tout sourire, mercredi 24 février, peu après 18 heures. Plutôt confiante, elle a commenté les chiffres du chômage face à aux journalistes. Entre décembre et janvier, en effet, le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie A, c'est-à-dire n'ayant exercé aucune activité, enregistre une baisse de 0,8%.
Pourtant, la Dares, l'agence statistique qui dépend du ministère du Travail, émet une mise en garde dans son bulletin mensuel. Elle évoque une hausse "inhabituelle" des sorties de Pôle emploi pour défaut d'actualisation. Autrement dit, ces chiffres sont difficilement interprétables. Francetv info tente d'y voir plus clair.
La Dares se veut prudente
"En janvier 2016, le nombre de sorties de catégories A, B et C pour cessation d’inscription pour défaut d’actualisation a enregistré un rebond inhabituellement fort, après la baisse observée en décembre, ce qui affecte à la baisse le nombre de demandeurs d’emploi en catégories A, B et C en janvier", souligne la Dares.
Le service des statistiques du ministère du Travail invite alors à interpréter les résultats "en tendance". En clair : pas sur un mois mais sur une période plus longue. Elle note alors que sur trois mois, le chômage a baissé de 0,8% en métropole, mais il reste en hausse de 1,8% sur un an.
Pour Myriam El Khomri, "il n'y a pas eu de bug"
Interrogée peu après 18 heures sur cette anomalie, la ministre du Travail a simplement répondu : "Les chiffres du jour sont honnêtes et corrects. Il n'y a pas eu de bug."
Peu après, elle est revenue sur ce point, plus longuement, au micro de RTL. "Les services du ministère disent qu'il y a eu un peu plus de défaut d'actualisation. Il ne faut pas que les auditeurs pensent que ces chiffres soient le fruit d'un bug, a-t-elle répété. Nous avons eu au mois de janvier plus de sorties de Pôle emploi à cause d'une augmentation de défaut d'actualisation." Et d'avancer une hypothèse, qui voit plutôt le verre à moitié plein :
Quand vous avez des personnes qui retrouvent un emploi, c'est légitime qu'elles ne s'actualisent pas.
Un dysfonctionnement comme en 2014 ?
Cet important défaut d'actualisation constaté en janvier rappelle un précédent sur de nombreux points. Le 25 septembre 2014, le nombre de chômeurs, sans aucune activité au mois d'août, enregistre sa première baisse significative depuis 2011, - 50 000 entre janvier et août. Michel Sapin, alors ministre du Travail, appelle à la prudence. En effet, les services des statistiques du ministère font apparaître "une hausse exceptionnellement forte" des sorties de listes faute d'actualisation.
Les chômeurs doivent déclarer leur situation à la fin de chaque mois auprès de Pôle emploi. Ils sont radiés des listes de l'organisme s'ils ne le font pas. Cinq jours plus tard, le ministère du Travail et Pôle emploi révèlent un "dysfonctionnement" chez l'opérateur SFR qui a amplifié la baisse "record" du chômage en août. Finalement, il n'y a pas 50 000 chômeurs en moins mais entre 22 000 et 29 000. Michel Sapin rappelle alors qu'il avait invité à interpréter ces chiffres avec des pincettes et que la Dares avait signalé une anomalie au moment de publier les chiffres.
Le lendemain, la presse apprenait que le ministre, "furieux", a convoqué de façon "sévère" le directeur général de Pôle emploi, ainsi que de celui de la Dares. Michel Sapin avait également demandé au directeur de Pôle emploi de tout faire pour "que de tels incidents ne puissent en aucun cas se reproduire". Reste à savoir si sa mise au point a été entendue.
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