Congé menstruel : ces entreprises et pays qui ont mis en place un droit d'absence pour règles douloureuses
C'est la première fois en France qu'une grande entreprise s'empare du sujet de l'endométriose. Le groupe Carrefour annonce mercredi 19 avril, dans Le Parisien Aujourd'hui en France que toutes ses salariées qui souffrent de cette maladie rendant les règles très douloureuses vont disposer dès cet été de jours d'absence financés par l'entreprise, une mesure soumise à la présentation d'un document attestant de leur situation de handicap. Avant l'enseigne de grande distribution, une dizaine de PME avait déjà mise en place un congé menstruel pour les femmes, qu'elles soient atteintes d'endométriose ou non. Certains pays en ont carrément fait un droit en l'inscrivant dans la loi. Tour d'horizon de ces avancées pour la santé des femmes.
Absence pour règles douloureuses ou fausse couche
La Collective fait partie des pionnières en la matière. Comme le racontait franceinfo, dès janvier 2021, cette Scop basée à Montpellier et spécialisée dans le recrutement de donateurs au profit des ONG, a créé une journée de congé que les salariées peuvent prendre une fois par mois au moment de leurs règles. Un jour d'absence rémunéré et un seul. L'idée a été proposée par une employée puis votée en Assemblée générale. Quatre mois après sa mise en place, près de la moitié des membres de la coopérative avait utilisé ce dispositif.
D'autres entreprises sont allées un peu plus loin encore. Ainsi le fabricant de mobilier Louis Design permet, depuis mars 2022, à ses salariées souffrant de règles douloureuses de s'absenter un ou plusieurs jours, sans retenue sur salaire. Les femmes concernées sont invitées à remplir un tableau de suivi pour essayer, autant que possible, d'anticiper ces congés menstruels à venir. Aucun certificat médical n'est éxigé, tout comme chez Critizr. Cet éditeur de logiciel qui emploie une centaine de salariés a mis en place un congé menstruel d'un à deux jours ou une durée équivalente de télétravail supplémentaire.
La ville de Saint-Ouen-sur-Seine instaure le congé menstruel pour ses agents : " On ne pouvait pas ne rien faire", indique le maire de la commune pic.twitter.com/vDIj0iSEoR
— franceinfo (@franceinfo) March 27, 2023
"Je pense que la responsabilité d’une entreprise c’est de ne pas exiger de quelqu’un qui souffre de venir travailler, qu’il soit homme ou femme", défendait en février dernier sur franceinfo Xavier Molinié, le directeur des ressources humaines de Critizr. L'entreprise basée à Paris a aussi fait parler d'elle en créant un congé pour fausse couche. Cinq jours d'absence dont peuvent bénéficier tous les salariés, femmes et hommes.
Dans le secteur public aussi, des employeurs font sauter le tabou des règles. Ainsi depuis le 27 mars, toutes les agentes de la mairie de Saint-Ouen ( Seine-Saint-Denis) ont la possibilité de poser deux jours d'arrêt par mois si elles souffrent de règles douloureuses. Pour bénéficier de cette absence, sans retenue de salaire, elles doivent fournir un justificatif médical.
Espagne, Indonésie et Japon à la pointe
Alors qu'en France, des élus écologistes préparent une proposition de loi pour inscrire dans la loi le droit à un arrêt de travail spécifique pour les règles, l'Espagne a déjà franchi le pas. C'est une première en Europe. Les députés espagnols ont voté, jeudi 16 février, une loi créant un "congé menstruel" pour les femmes souffrant de règles douloureuses. Aucune précision ne figure cependant dans le texte législatif sur la durée de cet arrêt maladie, qui devra être accordé par un médecin et sera financé par la Sécurité sociale. La mesure fait partie d'une loi plus globale sur le droit des femmes renforçant notamment l'accès à l'avortement dans les hôpitaux publics.
Hoy es un día histórico de avance en derechos feministas: la nueva Ley del Aborto y la Ley Trans y de derechos LGTBI van a ser ley pic.twitter.com/tcW0kGheTT
— Irene Montero (@IreneMontero) February 16, 2023
Déjà connue pour ses dispositifs pionniers en matière de lutte contre les violences sexistes, l'Espagne n'est toutefois pas le premier pays à avoir légiféré sur la question de la santé gynécologique. Ainsi, au Japon, une nation plutôt conservatrice en termes de droit des femmes, s’absenter plusieurs heures ou plusieurs jours par mois pour cause de menstruations difficilement supportables est un droit depuis 75 ans. Le congé menstruel est inscrit dans le code du travail dont la première version remonte à 1947.
Mais le texte ne précise pas si cette absence est rémunérée ou non, le choix est laissé à l'employeur. Ce qui explique peut-être pourquoi la plupart des salariées japonaises ne l'utilisent pas. Moins d'1% des femmes éligibles prennent un congé menstruel, selon une étude du ministère japonais du Travail en 2020.
Plus récemment, l'Indonésie accorde, depuis 2003, un à deux jours de congés pour règles douloureuses aux salariées. L'application de ce congé repose sur des accords négociés dans le cadre de conventions collectives. Une disposition saluée par certaines ONG mais décriée par d'autres qui dénoncent le fait que certaines entreprises n'appliquent pas complètement ou pas du tout la loi. Au total six pays dans le monde (Japon, Corée du Sud, l'Indonésie, Taïwan, Zambie, Espagne) permettent aux femmes de prendre un congé pendant leurs règles.
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