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Les quatre pistes d'Emmanuel Macron pour réformer le Code du travail

Le président de la République doit recevoir les représentants des syndicats et les organisations patronales à l'Elysée pour aborder ce chantier prioritaire et déjà controversé de son début de quinquennat.

Article rédigé par Elise Lambert
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le président Emmanuel Macron, au jardin du Luxembourg à Paris, le 10 mai 2017. (ERIC FEFERBERG / AFP)

"C'est une réforme majeure. (...) Nous allons désormais la discuter pour l'enrichir et l'expliquer", a déclaré le Premier ministre, Edouard Philippe, dans une interview au Journal du dimanche, publiée dimanche 21 mai, à propos de la réforme du Code du travail. Car il s'agit tout simplement du "chantier prioritaire" du début du quinquennat d'Emmanuel Macron.

Lors de sa campagne, le candidat d'En marche ! avait promis à ce sujet de réformer par ordonnances. Si les détails de la première mouture du texte ne sont pas encore connus, la réforme suscite déjà de nombreuses oppositions de la part des syndicats qui craignent une régression des droits des travailleurs.

Le chef de l'Etat les recevra donc, à l'instar des organisations patronales, mardi à l'Elysée, pour aborder ce dossier majeur qu'il compte faire entrer en application dès la rentrée. Voici quatre mesures souhaitées par Emmanuel Macron sur la réforme du Code du travail.

1Privilégier les accords de branches et d'entreprise

C'est le cœur de la réforme du Code du travail voulue par Emmanuel Macron. Dans son programme, il promet "de donner plus de place à l’accord majoritaire d’entreprise ou de branche" en inversant la hiérarchie actuelle des normes qui donne la priorité au Code du travail sur l'accord de branche, et l'accord de branche sur l'accord d'entreprise.

Actuellement, le Code du travail fixe un socle de règles et de droits qui s'appliquent à tout le monde comme la durée légale du travail, l'égalité hommes-femmes ou le salaire minimum, résume Capital. Les accords collectifs (de branche, de secteur ou d'entreprise) ne peuvent donc pas être "moins avantageux" pour les salariés que ce que stipule le Code du travail. 

En août 2016, la loi El Khomri a déjà "inversé" cette hiérarchie des normes, mais uniquement à propos du temps de travail, précise Le Monde. Emmanuel Macron veut aller plus loin en généralisant cette primauté des accords d'entreprise à d'autres domaines comme le salaire, les conditions de travail ou encore la formation. "C’est seulement à défaut d’accord d’entreprise que la branche interviendra", précise son programme. Le nombre de branches devrait aussi être réduit d’environ 700 à un nombre compris "entre 50 et 100".

Si les 35 heures resteront la durée légale de temps de travail, l'entreprise (ou la branche) pourra ainsi négocier des accords permettant de moduler cette durée hebdomadaire. Emmanuel Macron souhaite aussi que les entreprises puissent négocier des horaires réduits pour les plus de 50 ans, et plus importants pour les jeunes pour qui "35 heures, ce n’est pas long".

2Permettre aux patrons de convoquer un référendum d'entreprise

La loi El Khomri prévoit qu'un accord d'entreprise doit être "majoritaire" (c'est-à-dire signé par des syndicats représentant plus de 50% des salariés). Faute de majorité, pour valider l'accord, les syndicats minoritaires (représentant plus de 30% des salariés) doivent demander un référendum. Le chef de l'Etat souhaite que ce référendum puisse se tenir à l'initiative de l'employeur.

Cette initiative se fera aux mêmes conditions que celles déjà possibles pour les salariés : que le projet d’accord ait au préalable reçu l’aval de syndicats représentant au moins 30 % des voix, précise Libération. Si l'employeur reçoit une majorité de soutiens, alors l'accord sera validé, peu importe l'avis des syndicats majoritaires, indique Le ParisienUn outil en phase avec la volonté du président de placer le dialogue social "au plus près du terrain".

Les adversaires de ce projet craignent toutefois que les patrons n’exercent un chantage à l’emploi sur les salariés, ou que les votants ne soient pas toujours concernés par les changements proposés, reprend Libération, citant l'exemple de l'entreprise pharmaceutique Novo Nordisk. En février, les salariés du site de l'entreprise à Chartres (Eure-et-Loir) ont dû voter sur l'allongement de leur durée de travail. "Seuls 370 salariés sur un millier risquaient de voir leur journée de travail allongée. Or le 'non' a remporté 362 voix", développe le quotidien.

3 Plafonner les indemnités de licenciement

Le nouveau président souhaite "réduire l’incertitude sur les coûts de licenciement" en instaurant un plafond et un plancher pour les indemnités prud’homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse (hormis les cas de discrimination, de harcèlement, etc.). L'ancienne ministre du Travail, Myriam El Khomri, a défini en 2016 un barème indicatif d'indemnités (1 à 21,5 mois de salaires pour 43 ans d'ancienneté) prenant en compte l'âge, l'ancienneté et de la difficulté à retrouver un emploi, détaille Le Parisien.

Emmanuel Macron souhaite rendre ce plafonnement obligatoire, ce qui permettrait à chaque entreprise d'anticiper "au centime près" le coût d'un licenciement. L'ancien ministre de l'Economie a déjà tenté d'imposer un plafond dans sa loi mais la mesure a été censurée par le Conseil constitutionnel car il établissait une différence entre les entreprises selon leur taille.

Aujourd’hui, un licenciement justifié par une raison jugée sérieuse coûte très peu cher à l’entreprise. En revanche, lorsqu’il est dit "sans cause réelle, ni sérieuse", l’employeur s’expose à un recours en justice, qui fixe le montant des indemnités à verser au salarié, détaille L'Humanité. Les plafonds envisagés par Emmanuel Macron s’annoncent dans certains cas "tellement bas qu’ils risquent de ne même pas couvrir les frais de justice de l’employé licencié sans raison", s'inquiète toutefois le quotidien.

4Fusionner les instances du personnel

Pour un "dialogue social plus efficace" et pour "rendre plus souple le passage des seuils" sociaux, qui fixent les obligations des entreprises en fonction du nombre de salariés, le programme d'Emmanuel Macron prévoit une "instance unique de représentation" du personnel qui reprendrait "l'ensemble des attributions des comités d'entreprise, délégués du personnel et CHSCT (...) sauf accord d'entreprise visant à maintenir les instances existantes ou à en créer de nouvelles". Le CE, les délégués du personnel et le CHSCT seraient ainsi fusionnés, développe L'Express. "Le dialogue social a besoin de moins de formalisme et de lourdeur et de plus de vitalité", assure le président, qui promet en revanche que tous garderont leur pouvoir et leurs prérogatives.

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