Un BTS Maintenance faute de place en Staps : Hugo fait partie des 10 000 recalés d'APB en filière sport
Alors que Paris a obtenu l'organisation des JO 2024, quelque 10 000 bacheliers qui voulaient entrer en filière sport à l'université sont restés sur le carreau à la rentrée. Certains s'interrogent sur les capacités d'accueil de la filière et les débouchés.
Quel avenir pour les métiers du sport en France ? Alors que Paris vient de décrocher l'organisation des Jeux olympiques 2024, quelque 10 000 bacheliers qui voulaient entrer à l'université en Sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) ont été recalés, victimes du tirage au sort de la plateforme Admission post-bac (APB).
La filière est saturée par un trop grand nombre de candidats mais certains acteurs du secteur affirment également qu'elle n'est pas assez valorisée.
Un BTS Maintenance à défaut d'une place en Staps
Hugo Clément est passionné de hockey depuis qu'il a six ans. C'est sur la glace de la patinoire, dans son équipement de gardien, avec son casque et sa crosse, qu'il se sent dans son élément. "Je fais environ huit heures de sport par semaine. J'aime bien coacher les plus jeunes et j'ai aussi un diplôme d'arbitrage", énumère le jeune homme.
Comme des milliers d'autres jeunes, il fait partie des recalés d'APB qui voulaient intégrer une filière Staps, formatrice aux métiers du sport. "C'est injuste, ça a été une déception, admet-il. Je suis maintenant en BTS maintenance systèmes, option maintenance agricole." Une orientation qu'il n'a pas vraiment voulue.
J'ai pris ça par défaut
Hugo Clément, candidat en Staps et recalé d'APB.à franceinfo
Face à la situation de son fils, Béatrice Clément a un sentiment de gâchis. "À la maison, il se mettait à pleurer, il a été très tendu", se souvient-elle. "Les conversations n'étaient pas envisageables parce qu'il était sur la défensive."
Si Hugo a finalement trouvé une place en BTS, la situation ne s'est pas améliorée pour autant selon elle. "Il est toujours fermé aujourd'hui donc j'ai un enfant qui est déprimé et moins épanoui qu'avant." Elle voit Hugo se renfermer sur lui-même : "Il ne côtoie personne en dehors des gens du sport qu'il fréquente régulièrement dans la semaine. Je trouve ça désolant parce qu'il a 19 ans et toute la vie devant lui."
Des clichés qui pèsent sur la filière
Sur le campus d'Orsay dans l'Essonne, les étudiants de 3e année sont écœurés de voir autant de jeunes motivés être recalés. "Avec la fermeture des concours kiné, par exemple, de nombreuses personnes sont arrivées en Staps et ça a créé une accumulation", explique Florian Strady, un de ces étudiants. La filière est pourtant formatrice pour des secteurs variés d'après lui.
Il y a vraiment un vaste potentiel qu'on n'imagine pas.
Florian Strady, étudiant en Staps à Orsayà franceinfo
Il tient à déconstruire les clichés qui pèsent sur la filière. "Pour tout le monde, un étudiant en Staps c'est quelqu'un qui se balade en survêtement et qui va finir prof de sport alors que c'est tout sauf ça. (...) Il y a des profils très différents, beaucoup de gens viennent alors qu'ils ne sont pas forcément des sportifs", affirme Florian Strady. Il explique que son option, celle du management, regroupe des jeunes intéressés par l'événementiel, des bacheliers S ou des personnes issues de filières économiques.
Une filière bouchée, à sept ans des JO parisiens
La directrice de l'UFR Staps, Christine Le Scanff, continue de recevoir chaque jour des courriels et des lettres de jeunes dont elle doit refuser les candidatures. Ces jeunes attendent selon elle "des désistements éventuels". Elle s'interroge :
Comment absorber les 5 000 prochains étudiants Staps l'année prochaine pour toute la France, qu'est-ce qu'on peut faire puisque toutes les universités et les UFR sont saturées ?
Christine Le Scanff, directrice de l'UFR Staps de l'université d'Orsayà franceinfo
Certains s'interrogent également sur les débouchés réels des filières Staps pour les étudiants. Y a-t-il véritablement un avenir pour ces passionnés de sport ? Orlane François, présidente de l'Association nationale des étudiants en Staps (Anestaps), en est convaincue. "Ce n'est pas comme si le secteur du sport avait des problématiques par rapport à l'insertion professionnelle. C'est un secteur qui emploie beaucoup", assure la jeune femme, étudiante à Nancy.
"Dans sept ans, on va accueillir les JO. Ce sont des choses qui vont augmenter considérablement le nombre d'emplois parce qu'on va organiser l'événement mais aussi parce que la pratique sportive va se démocratiser en France. Donc comment fait-on pour accueillir ces JO sans être capable aujourd'hui de former les jeunes qui vont pouvoir accompagner correctement cet événement ?"
La formation, une priorité à l'approche des JO ?
Certains affirment même que les carrières du sport devraient être une priorité. "Un héritage à sept ans, ça s'engage vraiment maintenant", affirme Hugo Pontais, professeur d'éducation physique et sportive en lycée et secrétaire académique du Snep-FSU en Seine-Saint-Denis. Il estime qu'il faut "des projets d'investissement, des formations Staps où on ouvre un peu les vannes, où on fait un plan de recrutement, un plan de construction dans les universités, de rattrapage au niveau des équipements sportifs en Seine-Saint-Denis parce qu'on sait que les lycées sont blindés aujourd'hui".
Il est convaincu qu'il y a urgence à mettre les moyens. "Quels que soient les choix de formation proposés, il y a une nécessité de construire et d'investir rapidement. Tant qu'on n'a pas ces messages-là, ça risque d'être du bricolage." Il insiste : "Avant de parler d'héritage des Jeux, pilier fondateur du dossier gagnant de Paris, il faudrait songer au rôle de la formation, en commençant par préparer le terrain."
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