Plan pauvreté : le directeur de l'Observatoire des inégalités dénonce un "double discours"
Le directeur de l'Observatoire des inégalités estime que le plan ne s'attaque pas aux racines de la pauvreté en France. Il déplore également un manque de proposition sur le logement et le transport.
Emmanuel Macron a dévoilé jeudi un plan de lutte contre la pauvreté de 8 milliards d'euros sur 4 ans, qui prévoit notamment des places supplémentaires en crèches, des petits-déjeuners gratuits dans les écoles des REP (réseaux d'éducation prioritaire) et un effort de formation. Louis Maurin, directeur de l'Observatoire des inégalités dénonce sur franceinfo un "double discours". Selon lui, "on ne lutte pas contre les inégalités de destin".
franceinfo : Le plan pauvreté se concentre particulièrement sur les jeunes. Tout se joue dès le plus jeune âge ?
Louis Maurin : C'est très bien de venir en aide aux enfants démunis, mais ils ne sont pas pauvres par eux-mêmes. Ils le sont parce que leurs parents sont pauvres. Ce n'est pas en leur donnant des petits-déjeuners gratuits dans les REP qu'on va s'attaquer à la pauvreté des enfants. Il faut aider leurs parents, et en particulier des mères de familles monoparentales, touchées par les bas salaires, le chômage et la précarité. On attendrait du gouvernement des mesures plus fortes là-dessus.
Il y a une reproduction sociale de la pauvreté dont il est difficile de sortir ?
Il ne faut pas exagérer la situation de la France par rapport aux autres pays mais effectivement, notre école est particulièrement inégalitaire. Le gouvernement n'a d'ailleurs rien prévu là-dessus, à part doubler les classes de CP dans les quartiers prioritaires, soit 10% du territoire seulement. On dit lutter contre les inégalités de destin, mais on ne le fait pas. A l'automne dernier, le gouvernement s'est empressé de baisser l'imposition des revenus financiers du patrimoine de 5 milliards d'euros. En comparaison, le plan pauvreté, c'est 2 milliards d'euros par an. Il y a donc un double discours parce que ces revenus du patrimoine que l'on favorise vont accroitre les inégalités de destin. Il faut donc des mesures beaucoup plus fortes pour permettre l'égalité des chances et l'accès des plus défavorisés à de meilleures places.
Il n'y a rien concernant le logement dans ce plan pauvreté. Vous le regrettez ?
Non seulement il n'y a rien sur le logement, mais rien non plus sur le transport, l'éducation, etc. On attend beaucoup plus dans des domaines très concrets. On pense aussi à l'accueil des personnes âgées démunies. Il y a très peu aussi sur les jeunes adultes. Entre 18 et 25 ans, vous avez le droit d'élire un président, mais celui-ci ne vous accorde pas de minimum social. C'est un plan qui manque beaucoup d'ambition, après on verra comment il sera exécuté. On espère une inflexion, de nouvelles mesures. C'est peut-être un premier pas.
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