Dette européenne : la Chine pompier ou pyromane ?
La Chine, nouveau chevalier blanc de l'économie mondiale ? En pleines discussions bilatérales avec l'Union européenne, Pékin enfile son costume de super-héros et promet au Vieux continent, secoué par la crise des dettes d'Etats, de voler à son secours.
Tout au long de la semaine, les dirigeants chinois ont multiplié les assurances. Le ministre du commerce, Chen Deming, a expliqué que Pékin était “très inquiet”. Le ministère des Affaires étrangères chinois rappelle pour sa part que la zone euro constitue l'une des principales zones d'investissement de la Chine.
Le vice-Premier ministre, Wang Qishan a donc assuré en tout premier lieu que son pays soutiendrait les mesures prises par l'UE et le FMI.
_ Et Pékin promet des gestes concrets. Les responsables chinois annoncent qu'il vont utiliser leurs immenses réserves monétaires, les plus importantes du monde, pour soutenir l'UE, comme ils le font pour la dette américaine. La presse portugaise a titré hier sur les intentions de la Chine d'acheter quatre à cinq milliards d'euros de dette portugaise. Des promesses ont aussi été faites à Athènes. Le Premier ministre Wen Jiabao s'était engagé à soutenir les efforts de la Grèce.
Les Chinois ont d'ailleurs déjà fait un geste conséquent dans ce pays. Conséquent... et révélateur. La Chine a en effet annoncé qu'elle investirait cinq milliards de dollars pour aider les armateurs grecs à acheter des navires chinois, pour qu'ils aillent chercher des marchandises chinoises. Le Pirée deviendrait la porte d'entrée du made in China en Europe.
AFFAIBLIR SON CONCURRENT, PUIS LE FINANCER
Certains spécialistes des marchés estiment que le double-jeu de Pékin va plus loin encore que ce genre d'opération. En refusant de laisser sa monnaie, le yuan, se réévaluer, la Chine maintient l'euro en situation défavorable pour les exportations. Une concurrence qui pénalise la croissance des pays de la zone euro. La balance commerciale européenne, lourdement favorable à la Chine, pèse directement sur leurs dettes.
En affaiblissant son concurrent européen sur le front du commerce mondial, la Chine vise la position de première puissance économique mondiale. Elle peut se payer le luxe de porter l'estocade en se coulant dans le rôle du sauveteur. Une fois les poches pleines d'argent chinois, les Européens se retrouvent encore plus lestés dans la course, sous assistance respiratoire et financière en quelque sorte. Il pourrait devenir difficile de faire pression pour faire modifier la politique monétaire de Pékin, ce qui redonnerait un coup de fouet aux exportations européennes. Et au passage, de plus en plus “souhaitable” de ne pas trop se montrer regardants sur les droits de l'Homme...
Grégoire Lecalot
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