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Déficit public : "On court à la catastrophe" (Jacques Attali)

Invité de France Info, l’économiste, écrivain et conseiller d’Etat honoraire Jacques Attali nous donne son diagnostic de la situation économique de la France. Croissance nulle, hausse du chômage et déficit public énorme, les symptômes sont inquiétants mais la situation n'est pas désespérée.
Article rédigé par Cécile Mimaut
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Selon Jacques Attali, la France a des atouts gigantesques mais souffre d'un manque de réformes et de confiance © Maxppp)

 La France malade de l’économie mondiale

"Le désordre du droit mondial et la série de chaos qui secoue la planète n’incitent pas à investir ", explique Jacques Attali. De plus, la force du progrès technique pousse tous les prix à la baisse, ce qui fait de la technologie "un facteur de déflation ", poursuit-il.

 

Si on a une apparence de croissance aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Chine et ailleurs, c’est à cause de la dette qui est "le seul moteur de la croissance aujourd’hui de façon extraordinairement inquiétante ", souligne l’économiste. "Et la crise de 2008 n’a donné de leçon à personne ", constate-t-il.

 

La France peut faire beaucoup mieux

 

"Je rage de voir que la France, qui a des atouts gigantesques, sa position géographique, son niveau d’éducation, sa démographie très positive, son niveau d’innovation, son extraordinaire capacité intellectuelle, aurait pu et pourrait encore être une nation en croissance ", affirme Jacques Attali. "Elle ne l’est pas parce que depuis 20 ans on n’a pas fait les réformes qui s’imposent et qui encore aujourd’hui s’imposent ", analyse  l’économiste.

  

Mais que fait le gouvernement ?

 

"Tout ne dépend pas du président de la République, tout dépend de chacun d’entre nous ", tient à préciser Jacques Attali en préambule à sa réponse à la question posée. "C’est à chacun d’entre nous de créer les conditions de la croissance", nous dit-il, mais "le président et le gouvernement ont aussi un rôle majeur pour créer les conditions de la confiance qui permet à chacun de ne pas épargner trop, de consommer, de prendre des risques et d’investir ", poursuit-il.

 

Le déficit public, une préoccupation majeure

 

Conséquence d’une croissance nulle, le déficit public de la France "est énorme ", alerte Jacques Attali. Il va être en 2014 de l’ordre de 5% du PIB quand le budget, lui, représente 20% du PIB. Ce qui revient en fait à un déficit de 25% du budget, décrypte l’économiste. "C’est comme si chaque Français dépensait tous les mois le quart en plus de ce qu’il gagne ! " image-t-il. "C’est ça la situation de la France, c’est terrible, c’est inacceptable, ce n’est pas possible, ça ne peut pas durer. Nous courrons à la catastrophe ", s’alarme Jacques Attali pour qui l’Europe "n’a rien à voir " là-dedans.

 

Il faut "faire des économies et des réformes de structures"

Jacques Attali est formel. "Il faut réduire les dépenses et créer les conditions de la croissance qui permet des recettes nouvelles sans impôts nouveaux" , explique-t-il. Pour lui, il y a cinq réformes urgentes et prioritaires : sur le logement, la formation professionnel, l’investissement et la réforme de l’Etat. Prenant le cas du logement, Jacques Attali estime qu’il faut des mesures choc en proposant par exemple que "tout logement qui est neuf, acheté pour habiter ou pour louer dans les deux prochaines années, puisse être légué sans droits de succession, et ce tout au long de la vie ".

 

Sur la formation professionnelle, l’accord passé entre les partenaires sociaux est "une catastrophe " selon lui, "parce que les partenaires sociaux se sont entendus pour préserver leur magot ", poursuit-il. "Il est urgent de ne pas mettre en œuvre cet accord et de le reprendre ".

Ecouter l’intégralité de l’interview de Jacques Attali, au micro de Mathilde Munos

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