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Croissance en hausse : pourquoi il ne faut pas s'enflammer

Selon l'Insee, la croissance de la France en 2013 a atteint 0,3% après avoir été nulle en 2012. Une bonne nouvelle qu'il faut toutefois nuancer.

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Même si cette hausse de la croissance de 0,3% est une bonne nouvelle, les défis à relever sont encore nombreux avant une sortie de crise.  (NOEL HENDRICKSON / DIGITAL VISION / GETTY IMAGES)

Les économistes s'attendaient une hausse de 0,2% du PIB français au 4e trimestre 2013. Elle a finalement été de 0,3%. Un léger rebond qui pourrait correspondre à un frémissement de reprise, et comme l'estime François Hollande, à "la confiance retrouvée par les acteurs économiques". Un bon nombre d'indicateurs sont en effet au vert, avec la hausse de l'investissement après deux ans de recul et la création de 14 000 emplois en fin d'année. Une bonne nouvelle donc, mais qui, sans jouer les rabat-joie, mérite d'être nuancée.

Parce qu'il en faut plus pour faire reculer le chômage

Loin de se satisfaire de ces 0,3% de croissance, Pierre Moscovici l'a reconnu lui-même : il en faut plus pour enrayer la hausse du chômage. Pour cela, il faudrait selon lui que la croissance dépasse 1%. Pour autant, le ministre de l'Economie reste confiant et place ses espoirs d'une véritable reprise dans le pacte de responsabilité que propose le gouvernement aux entreprises.

Croissance : "il faut aller plus loin pour faire reculer le chômage", estime Moscovici (FRANCE 2)

L'analyse du ministre sur le taux de croissance nécessaire pour stopper la hausse du chômage est même optimiste : l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) l'estime à 1,5%.

Parce la consommation a été artificiellement dopée

Des facteurs exceptionnels pour gonfler la consommation ont joués durant cette fin 2013, comme les achats de voitures avant le durcissement du malus écologique au 1er janvier 2014, le déblocage de l'épargne salariale par le gouvernement ou encore l'anticipation de la hausse de la TVA pour l'entretien des logements. Les économistes attendent donc un début 2014 moins solide de ce côté-là.

Parce que les investissements des entreprises restent faibles

Ce moteur attendu de la reprise est certes reparti à la hausse au quatrième trimestre (+0,6%) pour la première fois depuis fin 2011 et +0,9% pour les entreprises. Mais il est encore loin de compenser la terrible chute de 2,3% observée sur l'exercice 2013. "L'aspect positif, c'est que l'on assiste à une stabilisation de l'investissement. Ce n'est pas glorieux, mais c'est déjà ça", estime Henri Sterdyniak de l'OFCE contacté par francetv info.

Parce les dépenses publiques dopent la croissance

Si les investissements ont repris au quatrième trimestre 2013, ce n'est pas seulement grâce aux entreprises. Les investissements de l'État et des collectivités locales ont atteint 1,1% au quatrième trimestre 2013. "Nous sommes dans une année pré-électorale, rappelle Henri Sterdyniak. Les collectivités locales notamment ont mis le paquet pour que les chantiers se terminent." Les contrats d'avenir participent également à ce mouvement. Avec le salaire qu'ils touchent, ces actifs participent au soutien de la consommation. 

Parce que le taux de marge des entreprises reste en berne

Productivité en baisse, augmentation des salaires réels, hausse des cotisations sociales ou encore légère augmentation du prix des produits importés... Autant de facteurs qui rognent les marges des entreprises. Leur taux de marge, c'est-à-dire leur profit, a ainsi reculé de 0,5 point au troisième trimestre, selon les chiffres de l'Insee publiés en décembre. Il tombe à 27,7 % de leur valeur ajoutée soit " le plus bas niveau depuis le quatrième trimestre 1985", précise l'Institut. Le taux étant bas en 2013, elles pourraient être tentées de reconstituer leurs marges plutôt que d'investir en 2014. Le gouvernement a la parade et compte sur son crédit d'impôt compétitivité emploi dont les premiers effets se ressentiront prochainement. 

Parce que le PIB par Français diminue

Robert Rochefort, député européen et vice-président du MoDem, estime dans un communiqué qu'il n'y a pas de quoi se réjouir de ces chiffres de la croissance : "Si l'on tient compte de la progression de la population (environ 0,5% par an), ils montrent juste une stagnation durable de la richesse produite par tête. Aucun indice ne permet de déceler que notre pays s'accrocherait au train de la reprise qui démarre un peu partout autour de nous".

Une analyse partagée sur Twitter par Pierre Larrouturou, président du parti Nouvelle Donne, qui mesure la hausse de la population française à 0,4% par an.

Parce que le chiffre de l'Insee sera révisé

Cette hausse de 0,3% de la croissance n'est qu'un aperçu provisoire de notre économie. Pour avoir une vision beaucoup plus juste et précise, il faut attendre trois ans, et notamment la prise en compte des déclarations fiscales des contribuables et des entreprises. Pour Henri Sterdyniak, cette tendance peut très bien s'inverser : "On aura des surprises, mais on ne sait jamais dans quel sens..."

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