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Quand Google se penche sur le marché illégal des tissus humains

Le groupe organise une conférence sur les réseaux illégaux.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Google organise pendant deux jours une conférence intitulée : "Réseaux illégaux : les forces en présence", mardi et mercredi 18 juillet. (ER PRODUCTIONS / BRAND X / AFP)

Le marché des tissus humains, un trafic méconnu qui préoccupe Google. A l'occasion d'une conférence organisée par le géant du Net, mardi 17 juillet, des journalistes ont signalé l'existence d'un trafic illégal de tissus humains en provenance d'Europe de l'Est. "C'est une industrie légitime pour sa plus grande partie, mais le marché légal peut être fourni par des tissus humains illégaux", prélevés sur des cadavres sans consentement des familles, a alerté Katherine Willson, spécialiste des réseaux illicites au sein du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ).

A quelque 70 km au nord-ouest de Los Angeles (Californie), cette conférence de Google, organisée par le groupe de réflexion de l'entreprise, Google Ideas, est consacrée pendant deux jours aux "réseaux illégaux : les forces en présence" (voir le post de blog, en anglais). Elle vise à définir les moyens de lutter contre les réseaux du crime organisé qui utilisent internet, en faisant se rencontrer victimes, police, experts en sécurité et membres de gouvernements. L'opération a été conçue notamment avec Interpol.

Trafic dans les morgues

L'enquête présentée par Katherine Willson, fruit de huit mois de travail dans onze pays, cite des recherches faites en Ukraine où les autorités ont découvert en février qu'un trafic illégal d'organes avait lieu dans une morgue de Nikolaev, près de la mer Noire. "Les documents saisis laissent à penser que des restes d'Ukrainiens morts ont été envoyés à une usine en Allemagne, détenue par une filiale d'une société américaine, RTI Biologics, basée en Floride", indique l'étude.

Une vidéo a par ailleurs été projetée pour montrer des images insoutenables de morceaux de peau retirés sur des cadavres, découpés en rectangles et placés ensuite dans des bocaux étiquetés. Un couple d'Ukrainiens, interviewés dans ce documentaire, raconte avoir découvert que leur fils défunt avait des coupures sur ses poignets, ce qui a porté à conclure que le corps avait été utilisé comme "matériel anatomique". "Ils ont fait de l'argent sur le dos de notre malheur", a dit le père, ému.

Jusqu'à 170 000 euros par corps

Les tissus humains ainsi volés servent à fabriquer des produits dentaires et médicaux qui sont couramment implantés sur des patients dans le monde entier. Aux Etats-Unis en particulier, deux millions de tels produits dérivés seraient vendus chaque année. Mais si c'est un marché légal, "les responsables américains et de nombreux autres pays n'ont pas de moyen fiable de retracer l'origine de la peau recyclée et d'autres tissus et leur destination", indiquent les travaux de la journaliste disponibles sur le site www.icij.org.

Cette enquête a conduit à des recherches sur plus de 200 entreprises, selon Katherine Willson. Elle suggère que des ressortissants slovaques exporteraient des bouts de cadavres vers l'Allemagne, celle-ci exportant à son tour des produits finis vers la Corée du Sud et les Etats-Unis qui, enfin, réexpédient les produits vers plus de 30 pays. "La nature fragmentée de ce commerce fait que les produits se déplacent d'un endroit à l'autre sans beaucoup de contrôles". Sans trop de risques, les profits potentiels sur ce marché sont immenses : un corps sain peut rapporter entre 65 000 et 163 000 euros.

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