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Après les premières corrections du bac : "Parfois, les candidats font des phrases qui ne veulent rien dire"

La première semaine d'épreuves du bac 2016 s'est terminée vendredi 17 juin. Les professeurs de philosophie et d'histoire-géo s'attellent à la correction des copies. Constatent-ils vraiment une baisse du niveau des candidats ?

Article rédigé par Marthe Ronteix
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Une professeure s'apprête à surveiller l'épreuve de philosophie au lycée Victor-Duruy, à Paris, le 15 juin 2016. (MAXPPP)

Les candidats du baccalauréat 2016 ont désormais passé les quatre premières épreuves. Ils ont entamé leur semaine marathon avec la philosophie, dont les sujets ont été jugés "relativement faciles" par Aïda N'Diaye, professeure agrégée de philosophie. La plupart des élèves devraient donc réussir cette épreuve, mais est-ce vraiment le signe que les candidats ont un bon niveau ?

En cette période de réforme du système scolaire, le baccalauréat est régulièrement contesté. "Il faut le supprimer", "Il ne sert à rien", "Il coûte trop cher" et surtout "Tout le monde l'a". Autant d'attaques régulières auxquelles la ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a répondu par avance lors de la présentation du baccalauréat, le 13 juin. Elle a déclaré que ces remarques dataient "d'avant la Ve République" et que le niveau des bacheliers ne baissait pas, contrairement à ce qu'affirment ses détracteurs.

Mais les premiers à pouvoir juger des connaissances des élèves de terminale, ce sont sans doute les professeurs qui corrigent leurs copies, et notamment ceux de philo et d'histoire-géo qui commencent déjà leur mission. Nous en avons donc interrogé trois : Lucile, Stephan et Stéphane. 

"C'est difficile pour eux de dégager un raisonnement"

Stephan reconnaît qu'il y a bien quelques élèves qui font des contresens, paraphrasent le texte qu'ils ont à étudier ou inventent des citations dans leurs copies. Mais ce que ce professeur de philosophie de l'Oise a surtout remarqué ces dernières années, c'est un sérieux problème avec l'écrit. "En philo, on prend les élèves en fin de scolarité, c'est une matière qui a beaucoup de pré-requis, comme une certaine maîtrise de la langue française et notamment de la syntaxe." 

Ce professeur, qui corrige des copies de bac depuis dix-sept ans, a toujours croisé quelques fautes d'orthographe au détour des copies. Et il reconnaît que ce n'est pas forcément gênant pour comprendre une argumentation. "En revanche, avec des phrases qui ne veulent parfois rien dire, difficile de dégager un raisonnement. Dans ce cas, la syntaxe ou le vocabulaire peuvent poser une vraie difficulté." 

"Souvent, les connaissances ne sont pas amenées de façon pertinente"

"Depuis sept ans que je corrige les copies du bac, je n'ai pas vu de réelle différence de niveau." Pour Lucile Peyre, professeur de philosophie, l'épreuve de sa matière n'a pas pour objet de sanctionner un niveau scolaire. "Il faut avant tout vérifier que les élèves se sont bien préparés. On ne cherche pas à les piéger avec des sujets compliqués." D'ailleurs, lors de la grande réunion qui a rassemblé tous les professeurs correcteurs de l'académie, la présidente de la commission a bien rappelé que ces connaissances scolaires devaient être prises en compte dans la note. 

Mais le simple étalage de connaissances peut rapidement devenir un défaut dans une copie de bac car il ne suffit pas de réciter un cours appris par cœur. Il est demandé aux candidats de construire une vraie réflexion. Or, "souvent, les connaissances ne sont pas amenées de façon pertinente. On sent que l'élève a eu des difficultés à comprendre le sujet et à le 'problématiser'." 

La professeure, qui a déjà commencé à corriger des copies de la série ES, a constaté ce problème avec le sujet "Savons-nous toujours ce que nous désirons ?" "Les candidats ont tendance à le reformuler en 'Savons-nous pourquoi nous désirons ?' C'est sûrement une façon de rapprocher le sujet donné du cours qu'ils ont eu dans l'année. Mais les deux formulations n'ont pas tout à fait le même sens." Comme les années précédentes, Lucile Peyre a une fourchette de notes comprise entre 7 et 15 sur 20.

"Il y a quinze ans, la dimension méthodologique était plus importante"

L'épreuve d'histoire-géographie est souvent redoutée par les élèves car elle demande une grande somme de connaissances. Selon Stéphane Leteuré, professeur à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), cela a toujours été le cas. "Depuis vingt ans que je corrige les épreuves du bac, j'ai toujours remarqué que les candidats avaient du mal à restituer précisément les faits, à éviter le hors sujet... Mais les exigences sont à peu près les mêmes qu'auparavant."

Pour ce professeur d'histoire-géo, ce n'est pas tant le niveau des élèves qui a changé, mais plutôt le format de l'épreuve. "Il y a quinze ans, la dimension méthodologique était plus importante. Les sujets recoupaient des parties moins importantes du cours et les élèves devaient faire un réel effort intellectuel pour s'y adapter en proposant un plan qui soit différent de celui qu'ils avaient vu en cours." Mais aujourd'hui, selon lui, on demande plutôt aux candidats de réciter le cours qu'ils ont appris à travers des sujets regroupant un chapitre entier.

"Il y a une telle pression qu'on est contraint de bachoter pendant toute l'année de terminale pour terminer le programme à tout prix", constate Stéphane Leteuré. Le professeur regrette que l'on n'encourage pas plutôt les candidats à développer leur esprit critique ou un vrai raisonnement sur les faits historiques. 

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