Vrai ou faux La France est-elle "en train de sortir de la crise inflationniste", comme l’affirme Bruno Le Maire ?

Article rédigé par Léa Deseille
France Télévisions
Publié Mis à jour
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Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, à la sortie du Conseil des ministres le 31 octobre 2023 à l'Elysée (Paris). (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)
L'inflation a bien ralenti. Elle est tombée à 4% sur un an en octobre, contre plus de 6% à son plus haut en février. Mais, selon plusieurs experts, cette baisse ne va pas se répercuter immédiatement sur le pouvoir d'achat.

La flambée des prix serait-elle enfin terminée ? "Nous sommes en train de sortir de la crise inflationniste", a estimé le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, en réaction aux données provisoires publiées par l'Insee mardi 31 octobre. Selon ce rapport, l'inflation a nettement ralenti en France en octobre, s'établissant à 4% sur un an, après 4,9% en septembre. Le ministre a salué "un succès pour la politique économique du gouvernement". Mais qu'entend Bruno Le Maire par "crise inflationniste" ? Interrogé par franceinfo, son cabinet explique qu'il s'agit de "la situation que les Français vivent depuis plus d'un an". 

Les prix ont commencé à grimper à partir de 2022, "lorsque les conséquences de l'invasion russe en Ukraine se sont manifestées", note la Banque de France dans ses prévisions économiques publiées en septembre. L'inflation a atteint son pic en février, avec un taux de 6,3% sur un an, selon l'Insee. Depuis, elle diminue. 

"Les deux moteurs de cette surinflation, l'énergie et l'alimentation, sont petit à petit en train de se calmer", analyse Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques de Sciences Po (OFCE). Ce que confirment les chiffres de l'Insee. La hausse des prix de l'énergie s'est établie à 5,2% en octobre, contre 19,1% un an plus tôt. Quant à l'alimentation, l'inflation est de 7,7%, très loin des 12% d'octobre 2022.

L'inflation sur les services reste stable

Mais ce tassement en octobre pourrait être en trompe-l'œil. Il y a un an, l'activité des raffineries françaises était fortement ralentie par les grèves, provoquant une envolée des prix des carburants. "Cette situation exceptionnelle pourrait expliquer une partie de l'importante baisse d'inflation en octobre", avance Julien Pouget, chef du département de la conjoncture à l'Insee.

Reste que si l'inflation a marqué le pas pour les produits alimentaires, elle reste stable à 3,2% sur un an pour les services. Or, les dépenses de services, dans lesquelles "on peut compter, entre autres, les loyers, les abonnements, le transport, les loisirs, la santé", "représentent environ 50% du budget des ménages", souligne Julien Pouget. "Cette augmentation peut être moins visible que pour des produits du quotidien comme la baguette de pain, mais elle touche une part plus importante du budget des ménages", insiste-t-il.

Dans les mois à venir, l'inflation risque en outre de stagner. Dans une note de conjoncture publiée en octobre, l'Insee prévoit une légère remontée, à 4,1% en novembre puis 4,4% en décembre. De son côté, la Direction générale du Trésor, qui dépend du ministère de l'Economie, voit une poursuite de la baisse à plus long terme. Elle prévoit une inflation de 2,6% en 2024, soit un taux deux fois moins élevé qu'en 2022 (5,2%). 

L'incertitude autour du conflit au Proche-Orient

"La baisse de l'inflation ne signifie pas forcément une baisse de prix. Ça peut vouloir dire des prix qui augmentent moins vite", prévient Julien Pouget. Un avis partagé par Eric Heyer, qui va dans le sens des annonces déjà faites ces derniers mois : "On ne retrouvera pas les prix d'avant-crise". L'économiste ajoute que "personne ne constate de déflation, les prix ne baissent pas".

Des imprévus comme les pénuries et les grèves mais aussi l'évolution des conflits internationaux contribuent à l'envolée des prix. Avec une question en suspens : la guerre entre le Hamas et Israël va-t-elle avoir un impact sur les prix à la pompe ? Le gouvernement le craint. "Il faut rester vigilant avec les événements au Proche-Orient", juge également Eric Heyer, qui précise toutefois que "dans l'état actuel du conflit, ça ne devrait pas avoir de répercussions sur les prix du baril." 

 

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