Cet article date de plus de dix ans.

Témoignage : naître enfant d'un prêtre et d'une religieuse

Publié Mis à jour
vidéo : 38min
Ce replay n'est plus disponible.
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions

Un témoignage en forme de plaidoyer contre le célibat des prêtres. Dans un livre, la fille d'un prêtre et d'une religieuse brise le silence. Le récit bouleversant d'une existence honteuse et cachée mais aussi d'une passion amoureuse.

"Surtout, n'en parle à personne." Combien de fois ai-je entendu ma mère me mettre en garde. Je n'ai rien dit, mes parents avaient fauté.

A 63 ans, Anne-Marie Mariani a décidé de ne plus se taire. De ne plus avoir honte du passé de ses parents. Leur histoire commence à Oran, en Algérie, en 1948. Le jeune Prosper, exerce au ministère à la cathédrale du Sacré-Coeur. Il souffre de solitude et doute de sa vocation.

Mon père a obéi à ses parents, c'était l'époque qui voulait ça. Il fallait un prêtre dans la famille, surtout quand il y avait 3 fils.

De son côté, Soeur Marie-Paule est une orpheline. Elle est devenue infirmière chez les dominicaines et s'occupe de ce dispensaire. C'est là qu'elle le rencontre.

Ma mère avait une énergie folle, un charisme extraordinaire. Il a été séduit par cette oeuvre, ce dévouement.

Petit à petit, l'amitié entre ce prêtre et cette religieuse se transforme en amour, une situation intenable. Pour prendre du recul et avec l'accord de ses supérieurs, Soeur Marie-Paule part travailler comme infirmière dans le désert. Prosper finit par la rejoindre.

Ils ont vécu des moments très heureux. lls n'étaient pas connus, ils étaient libres. Ils ont vécu une très forte passion.

Soeur Marie-Paule découvre qu'elle est enceinte. Elle décide alors de quitter les ordres. Le prêtre est bouleversé par cette naissance à venir, mais il s'en remet à sa hiérarchie. L'Eglise refuse qu'il abandonne son ministère. Lorsqu'Anne-Marie Mariani naît en mars 1951 à Paris, son père resté en Algérie ne la reconnaît pas à l'état civil. Très vite sa mère tombe gravement malade. L'Eglise décide de confier l'enfant à une famille d'adoption à Oran.

Sa hiérarchie préférait qu'il vous abandonne vous.

Il fallait sauver l'honneur de l'Eglise. Il fallait étouffer le scandale.

Finalement, Marie-Paule Mariani reprend son enfant et se réfugie dans le sud de la France. Quand son père les rejoint, leur fille a 3 ans. Il a dû se résoudre à fuir l'Eglise en cachette. Au yeux de la société, sa faute est impardonnable. Ils déménagent plusieurs fois pour échaper au qu'en-dira-t-on. Même la famille les renie.

C'était un homme mort, on brûlait les photos, il ne fallait plus parler de lui.

Ses parents en ont tellement souffert qu'il lui on caché la vérité jusqu’ à ses 16 ans. Pour elle, la révélation fut un choc.

Tout d'un coup, on se demande qui sont nos parents. Ce qu'on nous a caché, ces sentiments d'insécurité.

Il a fallu des années à Anne-Marie Mariani pour surmonter la honte de ses parents. Elle en est convaincue, l'Eglise doit mettre fin au célibat des prêtres.

Je regrette que mon papa n'ait pas pu être a la fois ma maman et moi et poursuivre son ministère. Il aurait vécu beaucoup plus humainement. L'homme n'est pas fait pour vivre seul.

Malgré toutes ces épreuves, Anne-Marie Mariani a été élevée dans la religion. Comme ses parents, elle a gardé la foi.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.