Un projet de loi antiterroriste pour "serrer tous les boulons possibles"
Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve va présenter ce mercredi en conseil des ministres un projet de loi qui viendra renforcer l'arsenal antiterroriste français. Confrontés au départ de nombre de jeunes volontaires ou résidents français pour la Syrie, et au retour de certains, les services de lutte antiterroriste et les magistrats spécialisés demandaient depuis des mois le renforcement de l'arsenal juridique en la matière.
Le but de ce texte, qui allie mesures phares et mesures plus techniques, sera "de resserrer au maximum les mailles du filet, de serrer tous les boulons possibles de la menace, tout en sachant que le risque zéro n'existe pas et qu'il est impossible de tout empêcher ", a expliqué à l'AFP une source proche du dossier.
Une interdiction de quitter le territoire pour mineurs et majeurs
Le projet de loi, dont l'exposé des motifs est disponible ci-dessous, prévoit notamment la création d'une interdiction de sortie du territoire français afin d'éviter que certains ressortissants, majeurs ou mineurs, ne se radicalisent à l'étranger pour représenter une menace à leur retour. Pour empêcher le départ des mineurs vers la Syrie, le gouvernement va mettre en place l'interdiction de départ sur demande des parents : le mineur est alors inscrit sur le fichier des personnes recherchées, et un signalement Schengen est lancé au niveau européen.
Pour les personnes majeures, le même dispositif est prévu, avec une interdiction administrative de sortie du territoire sous le contrôle d'un juge. Cette interdiction, de six mois maximum et renouvelable "aussi longtemps que les conditions seront réunies" pourra être décidée par le ministre de l'Intérieur et contestée a posteriori devant la justice. Si le candidat au djihad viole l'interdiction, il risque trois ans de prison.
La personne concernée pourra toujours voyager à l'intérieur de l'espace Schengen, mais son passeport lui sera confisqué et invalidé, l'empêchant par exemple de se rendre dans des pays comme la Syrie. Début juin, plus d'une centaine de personnes risquant de partir faire le djihad dans ce pays avaient été recensés à la suite de la création par le gouvernement d'un numéro vert et d'un site de signalement.
La déclinaison individuelle de l'entreprise terroriste
Les magistrats anti-terroristes pourront désormais poursuivre individuellement les candidats au djihad partis combattre et se former en Syrie ou au Moyen-Orient. Le projet de loi prévoit en effet la création de l' "entreprise individuelle à caractère terroriste", qui viendra s'ajouter à l'"association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste" déjà existante.
L'objectif est de "tenir compte de l'évolution de la menace terroriste" et de la possibilité pour une personne seule de préparer un acte terroriste, comme ce fut le cas pour Mohammed Merah ou, plus récemment, Mehdi Nemmouche.
Le renforcement de la répression sur Internet
Un autre chapitre du projet de loi prévoit le renforcement des moyens de lutte contre l'apologie d'action terroriste et d'incitation, principalement sur Internet. Le gouvernement se donne les moyens légaux de bloquer les sites qui diffusent des contenus islamistes, sur le modèle de ce qui existe déjà pour la lutte contre la pédo-pornographie.
Les fournisseurs d'accès pourront par exemple se voir demander de bloquer l'accès aux pages "provoquant au terrorisme ou en faisant l'apologie" : forums, comptes Twitter ou Facebook des filières du djihad... Mais le combat est inégal et difficile, même pour un état, face à des serveurs basés à l'étranger et des sites qui, aussitôt fermés, ouvrent ailleurs sur la toile.
Bernard Cazeneuve sera l’invité de Jean-François Achilli sur France Info, mercredi à 8h15.
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