Sécurité routière : le téléphone au volant est "une triple source de distraction, manuelle, visuelle et cognitive", alerte la Prévention Routière

Le téléphone au volant est "une triple source de distraction, manuelle, visuelle et cognitive", a affirmé mardi 5 avril sur franceinfo Christophe Ramond, directeur des études et des recherches à l'association Prévention Routière. Près de 80% des automobilistes utilisent leur téléphone au volant, un chiffre record et en forte hausse par rapport à l'an passé, selon le baromètre 2022 Axa Prévention des comportements sur la route publié mardi.

Pour Christophe Ramond, la crise du Covid-19 "a amplifié le phénomène". L'association Prévention Routière demande notamment "un droit à la déconnexion" pour les professionnels "qui sont le plus souvent au téléphone" et ont "tendance à répondre aux sollicitations pour le boulot."

franceinfo : Comment est-ce que vous expliquez cette très forte utilisation du téléphone au volant ?

Christophe Ramond : Si l'on regarde ces deux dernières années, il y a eu un événement très important qui a été la crise du Covid. Et l'usage du numérique, de manière générale, a explosé dans notre vie quotidienne. On la retrouve sur les routes, que ce soit l'appel téléphonique, mais aussi la vidéoconférence, l'utilisation des réseaux sociaux et de tous les systèmes d'information et autres applications. C'est une tendance qui est ancienne. Et on le voit dans les enquêtes, que ce soit déclaratives ou en observation en bord de route : de plus en plus de conducteurs, de motards ou de cyclistes utilisent le téléphone tout en circulant. Cette crise du Covid a peut-être amplifié ce phénomène.

Le téléphone au volant multiplie-t-il très largement le risque d'accident ?

Oui, c'est une triple source de distraction : manuelle parce que vous allez manipuler le téléphone, visuelle parce que votre regard quitte la route pour regarder l'écran, et cognitive parce que plutôt que de faire attention aux cyclistes et aux piétons qui peuvent être tout autour du véhicule, vous allez avoir l'attention captée par la conversation téléphonique ou les messages que vous êtes en train de lire ou d'écrire.

"On a une estimation qui est que 10% des accidents sont liés à l'utilisation du téléphone. Mais en réalité, on ne sait pas vraiment, parce qu'aujourd'hui les smartphones sont connectés en permanence."

Christophe Ramond, directeur des études et des recherches à l'association Prévention Routière

à franceinfo

Vous avez en permanence des signaux qui arrivent sur le téléphone. Donc, c'est très difficile, en cas d'accident, de vérifier s'il y avait une distraction au moment de l'accident.

Est-ce qu'il faut passer par des campagnes chocs pour faire comprendre ces risques ?

Il faut passer par des campagnes de sensibilisation. Et il y a des mesures à prendre. Par exemple, mon association demande à ce qu'il y ait un droit à la déconnexion. Vous savez que les salariés, quand ils se déplacent à titre professionnel, ils ont tendance à répondre aux sollicitations pour le boulot. Il faudrait qu'il y ait dans la loi une mesure qui les protège de ces sollicitations. Lorsqu'on regarde les conducteurs dans les rues ou sur les routes, les conducteurs qui sont le plus souvent au téléphone, ce sont les conducteurs de véhicules professionnels, et notamment les camionnettes ou les poids lourds. Donc, il faut vraiment prendre des mesures pour limiter l'usage du téléphone, que ça soit de la téléphonie ou du numérique.

Quel message à envoyer à ceux qui utilisent leur téléphone au volant ?

J'ai deux conseils. Passez vos coups de fil avant de partir, notamment quand vous sortez du travail. Plutôt que d'appeler la famille ou de consulter ces messages tout en roulant, vous le faites deux minutes avant de partir. Et en cours de route, notamment si vous faites un long trajet, profitez des pauses, faites des pauses régulièrement, au moins toutes les deux heures, et profitez-en pour passer vos appels ou consulter vos messages. Et au volant, vous éteignez le téléphone ou vous le mettez en mode avion pour ne pas être sollicités.