Port du burkini dans les piscines de Grenoble : "Le Conseil d'Etat va devoir être en pointe sur la notion de la laïcité", estime un avocat
Le tribunal administratif de Grenoble a décidé de suspendre la disposition autorisant le port du burkini dans les piscines municipales de la ville.
"Le Conseil d'Etat va devoir être en pointe sur la notion de la laïcité", estime ce mercredi sur franceinfo l'avocat spécialiste en droit des libertés fondamentales Patrice Spinosi. La ville de Grenoble a annoncé, par la voix de son maire Eric Piolle sur Twitter, qu'elle allait faire appel de la décision du tribunal administratif de suspendre la disposition autorisant le port du burkini dans les piscines municipales de la commune. "Une décision assez créative", estime Patrice Spinosi qui note que le tribunal avait pu être saisi grâce à un référé laïcité "qui est une création de la loi séparatisme."
franceinfo : que pensez-vous de cette décision du tribunal administratif ?
Patrice Spinosi : C'est une décision assez créative. On pouvait penser que le recours du ministère était assez fantaisiste et que la question de la laïcité n'avait pas vocation à s'appliquer aux usagers d'une piscine. C'était en tout cas le sens d'une jurisprudence du Conseil d'Etat, mais le tribunal administratif a été plus loin en considérant que, à partir du moment où on changeait la règle commune pour des raisons religieuses, il y avait une atteinte au principe de la neutralité du service public. On verra bien quelle sera la position du Conseil d'Etat.
C'est la loi séparatisme qui a permis cette décision, comme l'affirme le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin ?
Ce qui est certain, c'est que le ministère a déposé un référé laïcité qui est une création de la loi séparatisme et qui permet à l'Etat d'agir à très bref délai contre des actes qui porteraient gravement atteinte à la laïcité.
"Toute la question, c'est donc de savoir si oui ou non il y a cette atteinte au principe de laïcité."
Patrice Spinosi, avocatà franceinfo
Le tribunal administratif a tranché mais maintenant le Conseil d'Etat va être saisi et devra réviser dans un sens ou un autre la solution rendue par le tribunal.
À quoi peut-on s'attendre du Conseil d'Etat ?
Puisque la décision du tribunal administratif est globalement nouvelle, ella va pousser le Conseil d'Etat à adopter une posture assez en pointe sur la notion de laicité. On verra bien s'il est prêt à aller jusque là ou s'il restera sur une approche classique tel que dans de précédentes décisions sur le burkini. A l'époque, le Conseil d'Etat avait considéré que de toute façon, il n'était pas possible d'interdire le burkini dans l'espace public. Il s'agissait alors des interdictions engagées sur les plages par un certain nombre de communes du Sud. La question qui sera certainement posée et qui a été décisive pour le tribunal administratif, c'est de savoir s'il y a eu une volonté spécifique de la ville de Grenoble d'autoriser le burkini pour des raisons religieuses.
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