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Troisième suicide en sept mois à La Poste

Un cadre, en arrêt maladie depuis novembre, a été retrouvé pendu dimanche à la plateforme courrier de Trégunc (Finistère). La direction a ouvert quelques jours plus tôt un chantier sur la santé au travail.

Article rédigé par franceinfo
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Le président de La Poste, Jean-Paul Bailly, a annoncé en mars 2012 l'ouverture d'"un cycle d'écoute et de dialogue sur la santé et le bien-être au travail". (LOIC VENANCE / AFP)

Un cadre de La Poste en arrêt maladie a été retrouvé pendu dimanche 11 mars à la plateforme courrier de Trégunc (Finistère). Douze jours plus tôt, un autre cadre du groupe s'est défenestré à Rennes (Ille-et-Vilaine).

L'employé, un "ancien directeur d'établissement à la direction du courrier Ouest Bretagne", "était en arrêt longue maladie depuis le mois de novembre dernier", explique un communiqué du syndicat des cadres CGC. Mais il est revenu dans un établissement de La Poste "pour accomplir son terrible geste", indique le syndicat.

Les précédents

• Un cadre de 28 ans s’est suicidé à Rennes, le 29 février. Ce jeune père s'est tué en se défenestrant du quatrième et dernier étage de son agence située en plein centre-ville, devant des dizaines de personnes, comme le relate Ouest France.

Avant de se donner la mort, il a laissé une lettre dans la salle de réunion d’où il a sauté. Il y exprime son "anxiété professionnelle" et son incapacité à vivre dans un "tel contexte opprimant". Trois enquêtes ont été ouvertes par la police judiciaire, l'Inspection du travail et le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

• Une salariée de 52 ans s'est elle aussi défenestrée, le 15 septembre 2011, au centre financier postal du 15e arrondissement de Paris, après un congé longue maladie pour dépression.

A la suite de ce suicide, un rapport effectué par un cabinet spécialisé dans la santé au travail et cité par Le Monde avait constaté que "les conséquences des changements organisationnels mis en place ne sont pas suffisamment prises en compte par la direction du site".

De plus, un rapport de l'Inspection du travail avait conclu à "une faute caractérisée" de l'entreprise et mis en cause le PDG de La Poste, Jean-Paul Bailly, ainsi que le chef du centre financier. 

La réponse de la direction 

Le PDG de la Poste a ouvert jeudi 8 mars la conférence de presse consacrée à la présentation des résultats du groupe en évoquant le suicide du jeune cadre rennais. "La Poste a été bouleversée et elle a fait part de sa compassion à la famille et à l'ensemble des postiers", a déclaré Jean-Paul Bailly. Il a rappelé qu'à la suite de ce drame, il avait décidé d'ouvrir "un cycle de dialogue sur la santé et le bien-être au travail", un "cycle bien sûr destiné à la décision et à l'action".

Il avait également indiqué qu'il souhaitait élargir ce cycle "à d'autres acteurs ayant compétence pour s'exprimer sur ce sujet infiniment complexe et difficile". Il avait aussi précisé que le groupe était "en train de réfléchir à la manière" de procéder. Le PDG de la Poste doit recevoir les syndicats la semaine prochaine.

La réaction des syndicats

• La CGT, majoritaire à la Poste, a souligné, mercredi 7 mars dans un communiqué, que l'organisation du travail mise en place au sein du groupe "cassait les salariés". Le syndicat relève que "les arrêts maladie sont en expansion et touchent toutes les catégories de personnel". Elle fait valoir que "le décalage entre les missions demandées et les moyens mis en place pour y parvenir est un des facteurs les plus forts de ce mal-être". Pour la CGT, "la baisse régulière et drastique des effectifs, l'augmentation de la productivité, les nouvelles tâches, ont influé sur le mauvais état de santé des salariés et leur mal-être au travail".

• La CFTC, qui dit avoir alerté la direction "à plusieurs reprises sur le mal-être au travail", craint que le dialogue annoncé sur les conditions de travail ne soit qu'une "mesure de replâtrage" et souligne que "de grosses réorganisations se profilent en 2012" au sein du groupe, notamment dans les centres de tri. Cité par Le Figaro, le syndicat "voit mal comment le quotidien des postiers pourra s'améliorer alors que la rentabilité attendue par les [actionnaires] est de 10% au bas mot, ce qui implique (...) de presser encore un peu plus le citron".

Le contexte social

La Poste, devenue le 1er mars 2010 une société anonyme à capitaux publics, emploie environ 240 000 personnes. En 2010, 11 700 postes y ont été supprimés par le biais de départs non remplacés. En 2011, environ 10 000 postes devaient subir le même sort.

Concernant l'emploi, comme le détaille L'Expansion, la direction a fait savoir mi-février qu'elle s'engageait à recruter au moins 10 000 personnes en CDI sur la période 2012-2014 dans le cadre d'un accord de Gestion prévisionnel des emplois et des compétences soumis à la signature des syndicats. La direction a ajouté que 7 500 contrats en alternance seraient proposés sur la même période.

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