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Où en sont les droits humains en 2018 ? Le directeur général d’Human Rights Watch répond

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Article rédigé par Brut.
France Télévisions

Les femmes, la France, les LGBT, les migrants… Le directeur général de l’ONG Human Rights Watch, Kenneth Roth, donne son point de vue sur l’état des droits humains en 2018. 

Les Femmes : "Nous sommes en train de faire un progrès important pour cesser ces abus contre les femmes."

"Cette année, on a vu les grands mouvements des femmes : aux États-Unis, le mouvement Me too, en France, le mouvement Balance ton porc. Ces mouvements ont mis en lumière le déséquilibre entre les hommes et les femmes qui existe toujours, surtout dans le domaine du travail. Je crois que nous sommes en train de faire un progrès important pour cesser ces abus contre les femmes. En même temps, il y avait d'autres progrès, par exemple dans plusieurs pays arabes tels que la Tunisie, la Jordanie, le Liban. Ils ont changé la loi pour que ceux qui violent une femme ne puissent plus marier la victime pour éviter la prison.

Les femmes rencontrent toujours de grands problèmes, par exemple en Arabie Saoudite où les lois des gardiens mettent les femmes sous l'autorité des hommes pour n'importe quelle grande décision de la vie. On parle beaucoup du droit de conduire une voiture et c'est une petite part de bonne direction. Mais les grandes lois de répression contre les femmes existent toujours même sous le soi-disant "réformiste" prince héritier."

La France : "Migrant, réfugié ou quelqu'un qui demande l'asile, c'est important que la police ne les maltraite jamais."

"Le défi pour Emmanuel Macron c'est de gouverner avec les mêmes valeurs qu'il a défendues pendant la campagne électorale. Il s'est opposé très fortement contre les idées populistes du Front National. Parfois, il était très fort en faveur des droits humains, notamment avec ses rencontres avec Vladimir Poutine, avec Recept Tayyip Erdogan, même avec Donald Trump. Mais ailleurs, il hésitait à en parler. Pendant sa visite en Chine avec sa rencontre avec Sissi d'Égypte par exemple… Chez lui en France, il a pris l'état d'urgence et il l'a normalisé, il l'a mis dans la loi commune sans nécessité.

Avec les migrants, il paraît qu’Emmanuel Macron reconnaît que personne ne peut être renvoyé forcément vers la Libye. Ça, c'est une fondation importante. Il a parlé aussi de l'importance d'investissements économiques dans les pays dont les migrants viennent et ça, c'est une autre partie acceptable de sa politique. Mais d'autre part, il parle d'accélérer l'évaluation de ceux qui demandent l'asile et moi je crains que cela puisse être un moyen rapide de rejeter les demandes qui sont bien fondées. Migrant, réfugié ou quelqu'un qui demande l'asile, c'est important que la police ne les maltraite jamais. Il doit y avoir une tolérance zéro pour les coups, les gaz irritants, la destruction de leurs abris. Les abus que Human Rights Watch a documenté à Calais doivent cesser."

Les LGBT : "On a fait de grands progrès avec le mariage pour tous et ça avance dans plusieurs pays autour du monde."

"La situation des personnes LGBT est un peu mixte en ce moment. On a fait de grands progrès avec le mariage pour tous et ça avance dans plusieurs pays autour du monde. Mais aussi pour faire son coming out, pour vivre plus ouvertement leur orientation sexuelle. Mais cette ouverture a créé une réaction. Par exemple en Russie, où Vladimir Poutine a changé de sujet en attaquant les LGBT et c'est à peu près la même chose au Nigeria ou bien en Ouganda. En Tchétchénie, le président local Ramzan Kadyrov est totalitaire, vraiment violent. Ils étaient en train d'arrêter, torturer et parfois tuer les LGBT. Heureusement, il y a eu un cri contre ces événements et même Poutine ne pouvait pas l'ignorer. Il se sentait obligé de dire à Ramzan Kadyrov qu'il faut cesser cette horrible maltraitance des LGBT de Tchétchénie et, pour l'instant, cette maltraitance a cessé."

Les migrants : "Le problème, c’est comment protéger les frontières de l'Europe sans renvoyer forcément les gens en Libye."

"Le grand problème pour les migrants en Europe, c'est que la plupart viennent de la Libye. Or les conditions de détention y sont si horribles, avec la torture, du travail forcé, de l'esclavage sexuel, que personne ne devrait jamais être renvoyé forcément en Libye. Le problème, c'est comment protéger les frontières de l'Europe sans renvoyer forcément les gens en Libye. C’est une difficulté que l'Union européenne et même l'Italie n'ont pas encore réussi à résoudre.

La meilleure solution, c'est d'investir dans des pays d'où les migrants viennent et de combattre contre la répression dans ces pays. Il y en a qui sont plus accueillants envers les migrants, surtout l'Allemagne, la Suède, même la France. Là, on voit une acceptation de la responsabilité de donner un endroit de refuge pour ceux qui fuient la répression et la guerre. Nous avons remarqué que les pays européens où il n'y a presque pas de migrants, comme en Hongrie, en Pologne, dans les pays d'Europe centrale, ce sont ces gouvernements-là qui s'opposaient à l'arrivée des migrants. C'est un peu ironique."

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