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Policiers en burn out : il faut "remettre de l'humain" au sein de la profession

Frédéric Galéa, du syndicat Alliance, estime qu'il faut "agir en amont, sur les conditions de travail, sur l'organisation du travail".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a annoncé vendredi 12 avril la création d'une "cellule alerte prévention suicide" pour lutter contre le mal-être des policiers. (LIONEL VADAM  / MAXPPP)

Il faut "remettre de l'humain" au sein de la profession, a réagi sur franceinfo vendredi 12 avril Frédéric Galéa, délégué national chargé des conditions de travail au syndicat Alliance, après l'annonce du ministre de l'Intérieur de la création d'une "cellule alerte prévention suicide". Frédéric Galéa a dit prendre "acte des paroles fortes" de Christophe Castaner aujourd'hui, alors qu'"on connaît 43 suicides par an depuis une vingtaine d'années". Un malaise qui s'explique notamment parce que les policiers s'interrogent sur "leur véritable utilité", a-t-il assuré. Il faut "agir en amont, sur les conditions de travail, sur l'organisation du travail, sur le management et réussir à réconcilier vie privée avec vie professionnelle", a affirmé Frédéric Galéa sur franceinfo.

franceinfo : Y a t-il un tabou dans la police sur les suicides, comme le dit Christophe Castaner ?

Frédéric Galéa : Ce tabou existe. Quand vous êtes policier, le plus souvent la règle c'est qu'on fasse appel à vous quand on rencontre un problème et que les policiers sont amenés à intervenir pour résoudre ce problème. C'est plus difficile quand le policier rencontre lui-même un problème, que ce soit personnel ou professionnel. Il y a un tabou à briser en ce sens, mais c'est loin d'être le seul problème qui aujourd'hui explique le malaise et le phénomène suicidaire.

Le ministre de l'Intérieur a indiqué qu'une cellule de vigilance allait être mise en place, cela répond-il à un vrai besoin ?

Il existe déjà un certain nombre de dispositifs. On connaît 43 suicides par an depuis une vingtaine d'années. Des plans ont été mis en place successivement en 2010, 2015 et en 2018 et, à chaque fois, il est proposé tout un tas de mesures pour mieux accompagner les personnels qui sont fragilisés, un accompagnement et un suivi au niveau social, administratif, médical. On a des réseaux de soutien de psychologues. Ils sont perfectibles, il faut les renforcer. Mais tout ce qui peut permettre de détecter le plus en amont possible [ce mal-être], est une bonne chose.

Ne s'agit-il pas d'un énième plan ?

Les plans tuent les plans, mais on prend acte des paroles fortes de monsieur le ministre aujourd’hui, de sa volonté de vouloir lutter contre ce fléau en y impliquant la totalité des acteurs, donc cela est une bonne chose, mais ce qu'on attend aujourd’hui, c'est de remettre de l'humain qui nous manque clairement. Une hiérarchie défaillante ou un management trop défaillant, trop directif, peut mettre complètement en situation de souffrance toute une unité de police.

Les policiers ont-ils la sensation d'une perte de sens dans leur métier ?

Aujourd'hui, beaucoup d'entre eux s'interrogent sur le sens de leurs missions et sur leur véritable utilité. Quand on prend le temps de les écouter, ils disent, 'je ne suis pas rentré dans la police nationale pour faire la plante verte, pour faire des tâches qui ne correspondent pas véritablement à ma profession'. Ces tâches indues viennent rajouter à ce malaise qui petit à petit glisse vers un mal-être policier. Aujourd'hui la plupart des plans étaient de détecter des agents fragilisés, nous ce qu'on souhaite en tant que policiers, c'est de trouver les mesures qui empêchent les policiers d’être fragilisés par leur métier. C'est agir en amont, sur les conditions de travail, sur l'organisation du travail, sur le management et réussir à réconcilier vie privée avec vie professionnelle. Quand on n'est pas impacté par le terrorisme, on est impacté par le maintien de l'ordre, ou par une délinquance de plus en plus violente et puis aussi depuis Magnanville et certains actes terroristes, le policier est une cible. Et l'inquiétude supplémentaire, qui rajoute du stress, c'est qu'il comprend que sa famille peut aussi devenir une cible.

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