"On travaille 40 heures par semaine" : à Lille, des compagnons d'Emmaüs en grève depuis deux mois
Une marche de soutien est prévue ce samedi 26 août après-midi à Lille, en soutien à une vingtaine d'étrangers en situation irrégulière, accueillis en tant que "compagnons" au sein de la communauté Emmaüs de la Halte Saint-Jean à Saint-André-lez-Lille (Nord). Ils sont en grève depuis 57 jours et demandent leur régularisation car ils s'estiment exploités avec des allocations qui ne sont pas à la hauteur selon eux.
La direction de cette antenne locale d'Emmaüs dément fermement. Et Emmaüs France veut lancer un audit externe. Une enquête préliminaire pour "traite d'être humains et travail dissimulé" a été ouverte en mai par le parquet de Lille.
Des "activités solidaires" considérées comme du travail dissimulé
Parmi les grévistes soutenus par la CGT et le comité "Sans-Papiers 59", il y a Ibrahima Yattara, 28 ans, originaire de Guinée. Il dit être compagnon d'Emmaüs depuis bientôt cinq ans à la Halte Saint-Jean. Il espérait obtenir un titre de séjour prochainement, en participant à des "activités solidaires", c'est en ces termes qu'elles sont désignées par la direction de cette communauté Emmaüs de Saint-André-lez-Lille. Ibrahima Yattara, lui, y voit un vrai travail : "On travaille 40 heures par semaine (...) c'est du travail dissimulé. On ne gagne que 150 euros par mois", explique Ibrahima Yattara.
La direction de la Halte Saint-Jean a contesté point par point les accusations dans un communiqué de presse. "Il n'y a pas de semaine de travail, on n'a jamais recruté ni salarié, explique Pierre Duponchel, président de l'association. Il y a des allocations qui sont évaluées en fonction de la situation de famille et vous avez par exemple une des personnes qui témoigne qui est marié avec quatre enfants. Cette personne, au mois de mai, a reçu 1 200 € d'allocation. Par contre une personne seule, effectivement, va avoir une allocation, de l'ordre de 220 ou 250 € par mois".
Les grévistes demandent des régularisations
L'autre question est celle de l'obtention d'un titre de séjour. "Nous, de notre côté, on ne peut pas la donner cette régularisation. On peut s'engager en effet à faire toutes les démarches possibles pour les obtenir. D'ailleurs 45 familles et 55 enfants ont déjà été régularisés", précise Pierre Duponchel.
Au niveau national, Emmaüs France, là aussi dans un communiqué, ne "souhaite pas être résumé ou caricaturé par les éventuelles pratiques locales d'un groupe". Antoine Sueur, président d'Emmaüs France, a précisé à franceinfo avoir "demandé le retrait de la responsable, et nous avons mis en place un audit pour vraiment vérifier le fonctionnement pratique".
Le conseil d'administration de la Halte Saint-Jean a indiqué être "totalement solidaire" avec sa directrice et attend maintenant la fin de l'enquête préliminaire ouverte par le parquet pour accepter le lancement de l'audit voulu par Emmaüs France.
En début de semaine les compagnons grévistes de la Halte Saint-Jean ont été rejoints par une dizaine d'autres compagnons de l'antenne Emmaüs de Grande-Synthe, eux aussi en situation irrégulière, et désormais en grève illimitée.
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