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Clichy-sous-Bois : Muhittin Altun, le rescapé brisé du transformateur EDF

Le seul survivant parmi les trois adolescents électrocutés en 2005 a été entendu lundi au procès des deux policiers mis en cause. Le jeune homme est apparu très fragile.

Article rédigé par Simon Gourmellet - A Rennes,
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Muhittin Altun est le seul rescapé du drame de Clichy-sous-Bois en 2005. Il était interrogé par le président du tribunal correctionnel de Rennes (Ille-et-Vilaine) en tant que témoin, le 16 mars 2015.  (ELISABETH DE POURQUERY / FRANCETV INFO)

Dans son costume-cravate un peu trop grand, Muhittin Altun n'a pas l'air très à l'aise. Les cheveux gominés, les épaules voûtées et le regard fuyant, celui qui est entendu, lundi 16 mars, au procès de deux policiers à Rennes, semble toujours profondément marqué par ce 27 octobre 2005.

Ce jour-là, avec deux amis, il escalade les murs d'un transformateur EDF de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) pour échapper à un contrôle d'identité. Un geste malheureux provoque un arc électrique : Zyed et Bouna, 17 et 15 ans, meurent sur le coup. Lui s'en sort, mais est grièvement brûlé. La peau collée à ses vêtements, il parviendra à quitter les lieux et à donner l'alerte. C'est grâce à son témoignage en 2008 que le récit précis de la course-poursuite a pu être reconstitué.

"Pourquoi dix ans ?"

Dans ce nouveau procès, où deux policiers sont jugés pour "non-assistance à personne en danger", le jeune homme de 27 ans n'est entendu qu'en tant que témoin. Pourtant, il est immédiatement sur la défensive lorsque le président du tribunal l'interroge sur sa situation actuelle. Crispé, les mains accrochées à la barre, ce fils d'immigrés turcs est aidé d'une interprète. Il n'arrive pas à parler de lui, et les questions du président l'agacent : "Pourquoi vous n'étiez pas là l'année d'après pour me questionner ? Pourquoi dix ans ?" s'emporte-t-il, avant d'expliquer au juge qu'il a toujours "des traces en [lui]" de ce drame.

 

"J'ai peur de faire peur aux gens"

Muhittin Altun

 

 

Ces traces sont d'abord physiques. Son corps est couvert de cicatrices, qu'il doit cacher chaque fois qu'il va à la piscine. "Je mets un tee-shirt aux manches longues. J'ai peur de faire peur aux gens." Les séquelles paraissent aussi psychologiques. Ses réponses, souvent incohérentes, semblent témoigner d'un profond traumatisme. "Je me suis fait tabasser par la police plusieurs fois pour un simple contrôle", explique-t-il alors qu'il est interrogé par la défense sur des faits postérieurs au drame. 

Muhittin Altun est aujourd'hui au chômage. Il n'a plus de contact avec sa famille, et ce sont les proches de Bouna Traoré qui l'accompagnent et le protègent des questions des journalistes. Dix ans après, sa vie semble s'être arrêtée elle aussi dans ce transformateur EDF.

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