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Droit à l'avortement : 81% des Français sont favorables à son inscription dans la Constitution, selon une étude de la Fondation Jean-Jaurès

Différents groupes parlementaires, dont celui de la majorité, proposent de "constitutionnaliser" le droit à l'IVG. Ils sont soutenus par une très large majorité de Français, selon un sondage Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès.

Article rédigé par Margaux Duguet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des manifestantes défilent en faveur du droit à l'avortement, à Paris, le 2 juillet 2022. (FIORA GARENZI / AFP)

"En ce moment on voit qu'il y a des régressions, l'Histoire se remet à marcher dans le mauvais sens", déplorait la Première ministre Elisabeth Borne, le 29 juin, en visite au siège du Planning familial à Paris. Elle faisait référence à la décision de la Cour suprême des Etats-Unis d'enterrer un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter.

A cette occasion, la cheffe du gouvernement a réaffirmé son souhait d'inscrire ce droit dans la Constitution française. Le groupe Renaissance, qui représente le parti présidentiel à l'Assemblée nationale, a ainsi déposé une proposition de loi constitutionnelle en ce sens, tout comme la Nupes, la coalition des partis de gauche. Au Sénat, les sénateurs socialistes et communistes ont également proposé d'inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution.

Et les parlementaires de tous bords pourront compter sur le soutien des Français. Selon un sondage Ifop réalisé pour la Fondation Jean-Jaurès et que franceinfo vous dévoile en exclusivité, mardi 5 juillet, 81% des personnes interrogées sont favorables à la constitutionnalisation du droit à l'avortement. Autre chiffre qui témoigne de l'adhésion des Français : 77% des Français jugent qu'il serait utile d'inscrire l'IVG dans la Constitution.

Un consensus dans la société française

"Il y a un consensus massif dans toutes les strates de la population, y compris celles plus conservatrices", remarque François Kraus, directeur du pôle "Politique et Actualités" de l'Ifop. "Il y a un gap culturel entre la société française et la société américaine sur ce sujet, les discours pro-Life n'impriment pas en France", explique-t-il. De fait, si on regarde dans le détail, les différents électorats se retrouvent sur cette question de la constitutionnalisation de l'IVG.

Ainsi, 91% des électeurs de Yannick Jadot, 87% des électeurs d'Emmanuel Macron et 85% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont favorables à l'inscription de l'accès à l'IVG dans la Constitution française. A droite et l'extrême droite aussi, les chiffres sont élevés. Ils sont 80% des électeurs de Marine Le Pen à y être favorables, 77% des électeurs de Valérie Pécresse et 59% des électeurs d'Eric Zemmour.

"Par rapport à ceux qui disent que c'est forcément un débat éruptif qui va ranimer de vieilles passions et qui va diviser les Français, au contraire, ça peut être un débat qui ramène de l'apaisement et qui rassemble la société", assure Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance, à l'origine de la proposition de loi sur le sujet. 

Sondage Ifop pour la fondation Jean Jaurès.  (FONDATION JEAN JAURES)

Comment expliquer ce haut score du côté des électeurs de la candidate du Rassemblement national, finaliste de la présidentielle ? "L'électorat de Marine Le Pen est jeune et complètement affranchi de la religion. C'est certes un électorat tourné vers les questions d'identité et de sécurité mais pas conservateur dans le sens anglo-saxon", observe François Kraus.

Un long chemin législatif

Autre enseignement de cette étude : les Français ne craignent pas un scénario à l'américaine. Seuls 31% d'entre eux jugent possible que le droit à l'IVG puisse être remis en cause dans un avenir proche. C'est certes 3 points de plus que lors d'une étude du CSA mené en 1995 pour le magazine Marie-Claire mais cela reste faible. "Les Français ne craignent pas un danger immédiat de remise en cause de l'IVG", affirme François Kraus.

Extrait d'un sondage Ifop pour la fondation Jean Jaurès.  (FONDATION JEAN JAURES)

"Les droits des femmes ne sont jamais des acquis tant qu'ils ne sont pas inscrits dans le marbre. Quand on a les moyens d'inscrire dans le marbre ce droit qui est une liberté fondamentale alors on doit le faire."

Aurore Bergé, députée des Yvelines

à franceinfo

Reste que le chemin s'annonce long avant que cette inscription dans la Constitution soit effective : il faut que les deux chambres du Parlement votent dans les mêmes termes le texte et qu'il soit soumis à un référendum. C'est la règle en cas de proposition de loi constitutionnelle. Le gouvernement pourrait néanmoins reprendre la main et passer par un projet de loi constitutionnelle. Le recours au référendum ne serait alors plus obligatoire, un vote du Congrès aux 3/5e suffirait.


* Étude Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 28 au 29 juin 2022 auprès d’un échantillon national représentatif de 1 009 personnes âgées de 18 ans et plus.

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