Il y a 5 ans naissait en France le premier "bébé-médicament"
C'est une prouesse scientifique que l'on doit au même médecin qui avait permis la naissance du premier "bébé-éprouvette" en 1982, le Professeur Frydman. Il y a 5 ans tout juste une femme donnait naissance au tout premier "bébé-médicament" en France.
France Info a retrouvé ce bébé et sa famille. Un petit bonhomme qui avait fait, à sa naissance, la une des journaux. Il souffle donc aujourd'hui ses cinq bougies sur un gâteau mitonné par sa maman. Un enfant de maternelle avec de bonnes joues, un air coquin. Un enfant de cinq ans comme tant d'autres. Son prénom : Umut. Dans la langue de ses parents, le turc, cela veut dire "espoir".
Les cellules souches du cordon ombilical d'Umut ont permis de soigner Asya
Umut a été conçu pour permettre de soigner sa grande sœur, de trois ans son aînée. La fillette avait une maladie du sang, un traitement très lourd nécessitant des transfusions fréquentes. La naissance de son petit frère a tout changé.
Umut n'a fait l'objet d'aucun prélèvement, pas la moindre piqûre. Ce n'est pas le bébé lui même qui a permis la guérison de sa sœur. C'est son cordon ombilical. Les médecins en ont extrait des cellules souches puis les ont greffées chez sa sœur Asya. En quelques semaines, les cellules saines provenant de ce don ont remplacé les cellules malades d'Asya. Leila, la maman, se souvient :
"C'était un miracle. On a eu, bien sûr, des jours difficiles... Son hospitalisation, tout ça... Mais le résultat est positif."
Asya ne va plus qu'une fois par an à l'hôpital pour un simple contrôle. Une fillette souriante, épanouie bonne élève et qui adore la lutte. Elle veut devenir championne !
Cette très belle histoire est celle d'une réussite scientifique. Mais cette naissance, celle du premier bébé-médicament français, a suscité une vive polémique. Cela a été, et est encore, une démarche très critiquée. Certains hommes d'Eglise se sont dit ulcérés, ont parlé d'une "conception instrumentaliste de la vie". Un bébé doit être "une fin" pas "un moyen" selon eux. Des philosophes ont dénoncé le poids que cela faisait peser sur "l'enfant sauveur".
Toutes les démarches ont été très strictement encadrées par l'Agence de biomédecine, dans le cadre de la loi bioéthique.
La sélection des embryons au cœur des débats
Umut, comme les autres enfants médicaments a été le produit d'une fécondation in vitro. En amont, un diagnostic génétique a été fait sur les embryons. Des chercheurs ont d'abord vérifié que les embryons n'étaient pas atteints de la maladie dont souffre Asya, puis qu'ils étaient compatibles avec la petite Asya. Et, dans le cas d'Umut, c'est parce que l'un des deux embryons implantés était compatible que la greffe a ensuite été un succès. L'histoire d'Umut et Asya reste donc rare. Il n'y a eu que 5 autres enfants médicaments nés en France ces dernières années. Le taux de réussite pour les parents qui tentent leur chance est de 10 %. C'est très peu. En France, la loi dit qu'on a le droit d'écarter les embryons malades. Mais on n'a pas le droit d'écarter les embryons sous le prétexte qu'il ne sont pas compatibles avec le grand frère ou la grande sœur que l'on souhaite soigner.
En amont cela demande pourtant beaucoup de travail aux généticiens. Un travail long et coûteux pour le laboratoire génétique de l'hôpital Necker à Paris, le seul en France à s'être lancé dans cette aventure en collaboration avec l'hôpital Beclère de Clamart. Résultat : aujourd'hui les bébés médicaments sont en voie d'extinction, si l'on peut dire. La pratique disparaît. Le docteur Julie Steffann est médecin généticienne à Necker spécialiste du sujet :
" On met la priorité sur l'embryon plutôt que sur l'enfant malade. Pour cette raison, les laboratoires en France n'ont pas très envie de se lancer dans cette aventure."
Pour les parents d'enfants malades qui fondaient leurs espoirs sur cette technique, reste deux pistes. La première est de consulter la banque de cordons ombilicaux. Il existe en effet une banque internationale de cordons ombilicaux, issus de dons, comme il existe une banque de sang, de sperme ou de plaquettes.
Deuxième solution : l'étranger. Des parents français d'enfants malades ont déjà pris le chemin de la Belgique ou de l'Espagne. Là-bas, davantage d'enfants médicaments naissent chaque année... et pour cause la loi y est moins stricte concernant la sélection des embryons.
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